« Population & Avenir, revue indépendante alliant rigueur et pédagogie, vous présente une analyse originale des enjeux actuels. Vous y trouverez une source d’informations, de réflexions et d’argumentaires amplement illustrés par des cartes, des graphiques, des tableaux, des schémas… »
ÉDITORIAL par Gérard-François DUMONT
Covid-19 : UNE RUPTURE DÉMOGRAPHIQUE MONDIALE ?

L’auteur se demande si la pandémie du Covid-19 pourrait amorcer  des phénomènes structurels inédits dans l’histoire de l’humanité d’un point de vue démographique.

Les projections démographiques établies par l’ONU sont traditionnellement basées à la fois sur une augmentation du nombre annuel de décès liée à un vieillissement de la population et sur une baisse de la fécondité moyenne dans le monde (de 5 enfants par femme en 1950 à 2,44 en 2019 et 2,35 à l’horizon 2030). Ainsi le solde naturel devrait diminuer et passer de 82 millions en 2019 à 71 millions en 2030.

Or, la pandémie Covid-19 a bouleversé cette projection moyenne. En 2020-2021, la courbe des décès marquera sûrement une nette orientation à la hausse. On remarque en même temps une baisse des naissances dans le monde. Il en résulte que l’accroissement naturel dans le monde a également « décroché », se rapprochant déjà des 70 millions estimés par l’ONU pour 2030.

Un ralentissement de la croissance de l’espérance de vie, voire une stabilisation de son niveau, et une fécondité qui diminuerait de manière plus rapide pourraient à moyen terme accélérer le moment où l’effectif de la population mondiale pourrait entrer dans un cycle de décroissance. Plus qu’un phénomène conjoncturel, la dépression démographique de cette période de pandémie pourrait donc aussi être le catalyseur de bouleversements plus structurels.

 

DOSSIER par Jean-François LÉGER et Alain PARANT
BASCULEMENT DÉMOGRAPHIQUE EN MÉDITERRANÉE : LE SUD DEVENU LA 1ère PUISSANCE

Les dynamiques démographiques des 3 rives de la Méditerranée sont considérablement contrastées, ce qui aboutit ou aboutira à un véritable basculement de la hiérarchie démographique en 50 ans.

La rive africaine est dorénavant la plus peuplée, devant la rive européenne. La hiérarchie démographique entre pays a également été profondément renouvelée. L’Égypte avec ses 102 millions d’habitants et la Turquie et ses 84 millions d’habitants dominent maintenant le classement. C’est donc sur les rives sud que se trouve le moteur de la croissance démographique méditerranéenne.

La comparaison des caractéristiques d’âge des populations des différentes rives est aussi éloquente. Ainsi, les moins de 30 ans représentent au moins la moitié de la population sur les rives africaines (55%) et asiatique (50%) contre seulement 31% sur la rive européenne. En contrepoint, la population de la rive nord compte plus de personnes âgées de 60 ans ou plus (28%) que celle des rives sud (10%) et est (12%). On remarque donc un déséquilibre générationnel important de part et d’autre de la Méditerranée : les jeunes au sud et à l’est, les vieux au nord.

Ces compositions démographiques très contrastées d’une rive à l’autre sont le résultat d’évolutions de la fécondité et de la mortalité elles-mêmes très différentes selon les rives. Partout autour du bassin méditerranéen, le nombre d’enfants par femme a diminué, mais selon des rythmes différents (plus rapide au nord). Sur la rive nord, la réduction de la fécondité a été partiellement compensée par l’allongement de la vie. Dans la région européenne de la Méditerranée, l’espérance de vie est en moyenne de 82,6 ans, soit près de 9 ans de plus que celle des pays de le rive africaine et 6 ans de plus que celle des pays de la rive asiatique. A natalité constante, le surcroît d’espérance de vie européenne assurerait donc un gain démographique de 12% environ par rapport à la rive sud et de 8% par rapport à la rive est. Mais cet avantage pèse peu en regard de la différence de fécondité entre d’une part, la rive nord et d’autre part, les rives sud et est.

Cette différence constitue une des explications du solde migratoire négatif de la rive africaine de la Méditerranée (environ – 200 000 personnes par an en moyenne, soit un déficit d’environ 1 million de personnes tous les 5 ans) alors que la rive européenne a globalement bénéficié d’un apport migratoire depuis une cinquantaine d’année de l’ordre de +200 000 personnes par an. La rive africaine est incontestablement celle qui est la plus repliée sur ce même espace. Elle entretient avec le nord en particulier une relation démographique très forte : quasiment la moitié de ceux qui ont quitté cette rive réside dans un des pays de la rive nord.

Au final, on peut affirmer que d’ici 2050, la prééminence démographique de la rive africaine de la Méditerranée devrait continuer de s’affirmer.

 

DOCUMENT PÉDAGOGIQUE (libre de droits)
POPULATIONS ET CIRCULATION MIGRATOIRE DANS LE BASSIN MÉDITERRANÉEN

 

EXERCICE PÉDAGOGIQUE par Eric GACHET
LE DETROIT DE MALACCA : UN POINT DE PASSAGE MAJEUR ET STRATÉGIQUE

Cette étude de cas s’insère dans le premier sous-thème du thème 3 du programme de Géographie de la classe de 4ème intitulé « Mers et océans : un monde maritimisé ». Il  s’agit de montrer que le détroit de Malacca est un axe essentiel des flux maritimes mondiaux. Enjeu économique et militaire majeur à l’échelle mondiale, il est également au cœur des stratégies géopolitiques des acteurs de la région.

Dans l’introduction, les élèves localisent le détroit de Malacca à plusieurs échelles. Dans une 1ère étape, ils tentent de montrer qu’il est un passage stratégique et convoité à l’aide de cartes et d’un texte. L’objectif final est de réaliser un schéma cartographique du détroit de Malacca. Dans une 2ème étape, ils étudient un texte pour aboutir à un schéma fléché expliquant en quoi le détroit de Malacca est au coeur d’enjeux de puissance. Dans une 3ème étape conclusive, le détroit de Malacca est replacé dans le cadre des flux mondiaux de marchandises à l’échelle mondiale.

 

DOSSIER SPÉCIAL par Gwenaël DORE et Jean-Marc CALLOIS
LE VÉRITABLE BILAN DE LA FUSION DES RÉGIONS EN FRANCE

Pour le gouvernement français qui l’a fait voter en 2015, la création de vastes régions « plus fortes aux compétences élargies, c’est plus d’économies, plus d’attractivité, plus de simplicité ». Cet article se demande si ce raisonnement a été validé ou s’il s’agit uniquement d’une illusion du mythe du « Big is beautiful« .

En tablant sur des économies d’échelle et des suppressions des doublons, l’objectif du gouvernement était un gain d’annuel de 12 à 15 milliards d’euros à moyen terme. Pourtant, les fusions de régions se sont d’abord accompagnées de coûts directs inévitables et parfois permanents. « L’expérience montre que les coûts croissent avec la taille ». En 2021, les dépenses annuelles supplémentaires en matière de régime indemnitaire du personnel des régions fusionnées représenteront entre 49,35M d’euros et 53,35M d’euros par rapport à l’édition de 2016 et constituent une des principales composantes des coûts pérennes de la fusion des régions. L’argument de la simplicité se heurte également à celui de la distance physique. Qui dit région plus vaste dit aussi de plus longs déplacements. Certaines nouvelles régions sont très grandes et leur étendue risque de provoquer un éloignement d’une partie des populations des centres de décision. En termes d’économies et de simplicité, la fusion des régions n’a donc rien apporté.

La fusion des régions, selon le gouvernement, devait les rendre plus fortes et plus prospères dans tous leurs territoires. Pourtant les gagnants sont les départements-capitale des régions non-fusionnées qui ont, en moyenne, créé davantage d’emplois marchands que les départements-capitale des régions fusionnées. Globalement, les départements des régions non fusionnées ont de meilleurs résultats que les départements des régions fusionnées, qu’il s’agisse du département siège de la capitale ou des autres. La situation la moins enviable est celle de la catégorie des départements périphériques des régions ayant perdu le statut de capitale. Il était donc totalement faux d’affirmer que les petites régions (Auvergne, Limousin…) allaient bénéficier d’un effet d’entrainement du fait de leur rattachement à des régions plus grosses. L’analyse développée dans cet article ne montre au contraire aucune plus-value en termes de créations d’emplois, et encore moins en termes de développement des départements périphériques des régions fusionnées. En effet, ce sont avant tout des régions non fusionnées, non pénalisées par les contraintes de l’organisation administrative d’une fusion et de ses conséquences qui voient leur département-capitale être plus attractif depuis 2016. La fusion des régions n’a pas eu l’effet global de dynamisation économique attendu, et plutôt des effets négatifs en matière d’aménagement du territoire et d’équité territoriale.