Ce roman, publié par épisodes dans la presse en 1941, retrace un moment de la conquête coloniale.

L’auteur retrace, dans un récit prenant, l’histoire d’une colonne légère au Soudan français en 1895. Ces soldats, français et indigènes, sont confrontés dans des heurts violents à l’armée de Samory. Ce roman n’est pourtant pas une apologie de la colonisation. Il en montre les aspects divers, le rôle des hommes, les relations complexes avec les populations locales. L’auteur s’il écrit en 1941 exprime son respect pour les hommes colonisés.

C’est aussi une occasion de se replonger dans l’histoire des résistances à la conquête, sur fond d’islamisation des paysanneries animistes. Une histoire qui a laissé des traces dans les mémoires en Afrique de l’Ouest, rappelons que Samory Touré1 prend le titre d’Almany (commandeur des croyants).

L’ouvrage et précédé d’une longue préface de Christian Manso et Dolores Thion Soriane-Mollà de l’université de Pau et des Pays de l’Adour. Ils évoquent l’auteur Joseph Peyré et son œuvre dans laquelle il rend hommage aux troupes coloniales. Ils rappellent que ce genre littéraire était assez répandu entre les deux guerres2. Pour Joseph Peyré s’était « rendre hommage à l’engagement, à la bravoure et aux sacrifices de tant de militaires oubliés »3 mais il me semble aussi que c’est dans le respect des peuples, tant dans l’hommage aux tirailleurs que dans les rapports aux villageois. « Il évite le simplisme de l’affrontement du blanc et du noir, des coloniaux et des natifs. »4.

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Présentation de l’intrigue sur le site de l’éditeur : http://www.atlantica.fr/livre/22240/Bataillons_noirs

« Une horde de sofas de Samory s’approche du village de Diamé. Un paysan, Serpent Gris, alerte la colonne française du lieutenant Masson, qui compte parmi ses tirailleurs un frère de l’indigène, Serpent Noir. à marches forcées, la colonne se porte vers le village… »

Bataillons noirs fait exception à tous les romans qu’a pu écrire Joseph Peyré sur la présence des troupes françaises sur le sol africain puisque sa trame se situe en l’ancien Soudan.
Paru dans Gringoire en 1941, au début de la reconnaissance des peuples à l’autodétermination, il garde toute son actualité.
Assiégés par des sofas, tirailleurs sénégalais, troupes coloniales et peuples indigènes, dans les péripéties qu’ils traversent, font preuve de solidarité et patriotisme.
Alors même que se font jour une conquête de nouveaux espaces, une soif de pouvoir exacerbée, mais aussi la lutte pour la liberté. Ce qui entraîne la découverte de l’autre et de soi-même dans des situations extrêmes. Un récit haletant où l’Histoire et les individus sont mis à nu.

« Si je remonte ici au temps de la conquête soudanaise, et à l’histoire ignorée de Diamé », nous dit Peyré, « c’est pour rendre une double justice, révéler un double secret : celui d’un officier de l’ancienne infanterie de marine, tombé en 1914 à Charleroi, celui d’un tirailleur sénégalais, tombé en 1940, dans les blés de l’Île-de-France, deux hommes que liait l’un à l’autre une dette cachée. »

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1 Sur Samory et ses campagnes contre la France coloniale on pourra se reporter à :

Julie d’Andurain, La capture de Samory, 1898 : l’achèvement de la conquête de l’Afrique de l’Ouest, Soteca, 2012 

L’almany Samory Touré (1830-1900)

Samory, le Vercingétorix africain, L’histoire 1985

2 Voir par exemple : Colonel Albert Baratier, A travers l’Afrique et Epopées africaines, L’Harmattan, 2015

3 Citation p. 15

4 Cit. p. 20-21