Dans la perspective des élections américaines de novembre, un examen attentif des ressorts de la politique étrangère des Etats-Unis n’est pas inutile. Pourtant si l’on suit l’actualité étasunienne et le long, et sans doute meurtrier duel des primaires démocrates, force est de constater que les relations internationales n’occupent qu’assez peu de place dans les préoccupations des électeurs et des candidats.

Pourtant, eu égard à l’influence des Etats-Unis dans le monde, les enjeux de cette élection sont considérables. De Jefferson à Kennedy en passant par Wilson, les étasuniens se considèrent comme la nation ayant en main le destin de l’humanité et de ce point de vue, il n’ya pas eu de véritable réorientation de la politique étrangère du pays du moins dans ses fondements.

Comme pour les précédents ouvrages de cet auteur qui a sollicité notre service de presse, http://www.clionautes.org/?p=1854 et http://www.clionautes.org/?p=1825 ,
le public visé est constitué par les étudiants de premier cycle universitaire en histoire ou dans les IEP. On n’y trouvera pas donc de grandes révélations sur la nouvelle historiographie des Etats-Unis ni d’examen de sources nouvelles. L’ouvrage est réalisé de façon chronologique et est constitué par la juxtaposition de fiches présentant parfois trop rapidement les différentes interventions militaires ou diplomatiques des Etats-Unis. Le traitement est purement événementiel et manque de hauteur de vues. Dans un certain nombre de cas des informations pourtant importantes font défaut. À titre d’exemple, pour la guerre du Kippour, l’auteur ne parle pas de la mise en état d’alerte (DEFCON 3) des forces nucléaires stratégiques des Etats-Unis en réponse à la menace soviétique d’intervenir directement au Proche-Orient pour sauver l’armée égyptienne de l’anéantissement après la contre offensive à travers le Sinaï et la traversée du Canal de Suez.

De la même façon, pour ce qui concerne l’analyse de la politique étrangère de Jimmy Carter, on en peut qu’être surpris et en même temps indulgent devant ces affirmations répandues ensuite par les reaganophiles à propos des positions incohérentes du président démocrate. C’est faire bien peu de cas de la démarche au contraire très offensive de ce dernier en faveur des droits de l’homme en jouant sur les contradictions entre la politique de ses prédécesseurs et les principes mêmes des États-Unis.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le père fondateur du wilsonisme botté est bien ce président très croyant qui a été le promoteur de la modernisation de l’armée américaine et notamment de sa doctrine d’intervention rapide. Il est vrai que la tentative de libération des otages avait été un fiasco. De la même façon, à propos de la première guerre du Golfe on reprend avec peu de nuances l’affirmation selon laquelle l’affirmation de l’ambassadeur April Gaspie « nous n’avons d’opinion à formuler sur votre différent frontalier avec le Koweit » aurait été interprétée par Saddam Hussein comme un feu vert à l’intervention militaire.

De la même façon pour la Somalie comme pour le Rwanda sous Clinton, on aurait pu chercher à savoir comment et pourquoi les Etats-Unis interviennent en Afrique. Avec l’intention de démanteler le pré-carré français ils ont multiplié les interventions indirectes en Côte d’Ivoire mais aussi en Éthiopie en soutenant l’actuel pouvoir en place à Addis Abbeba.

L’ouvrage se termine par une série d’annexes qui peuvent être utiles. Un rappel sur les institutions des Etats-Unis, des présentations rapides sur les partis démocrates et républicains d’où les ressemblances et les différences en matière de politique étrangère sont absentes, et quelques rappels rapides sur les agences fédérales CIA ou FBI entres autres.

Au final, cet ouvrage est assez léger du point de vue de son contenu. Les sources sont certes multiples mais peut-être peu utilisées. Il peut toutefois rendre certains services pour une initiation à la politique étrangère des Etats-Unis mais l’absence de présentation synthétique permettant de rendre compte des grandes évolutions et des lignes de force dans la durée est un gros handicap. Le danger est que l’on ait tendance à considérer que la politique étrangère d’un État puisse virer à 180 ° selon le locataire de la Maison blanche ou de l’Élysée, sans que l’on puisse appréhender quelques fondamentaux, à commencer par celui-ci : « La politique d’un État est dans sa géographie ». Bismarck, l’auteur de cette citation venait de jeter les bases de la géopolitique, une méthode d’analyse des relations internationales qui fait ici cruellement défaut.

Bruno Modica © Clionautes

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