Programmable, contrôlé à distance mais ni robot, ni missile, le drone (qui signifie en français faux bourdon) a commencé à envahir notre quotidien depuis 2010.
Les usages avérés et potentiels de ce nouvel outil sont tellement nombreux qu’un ouvrage de synthèse était nécessaire pour tâcher de faire le tour de la question.
Rédigé par Isabelle Belin, journaliste scientifique et Sylvain Labbé, directeur de l’IrsteaInstitut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture. de Montpellier, cet essai interroge les géographes de par le rapport fondamental qu’entretiennent les drones avec l’espace. Et si les drones terrestres et marins existent, l’étude se concentre ici sur les drones aériens.
Les avantages principaux de cette machine sur l’homme se lisent autour de trois axes, les trois « d » dans le langage anglo-saxon : le « dull » (le fastidieux qui déconcentre), le « dirty » (le sale, le pollué), le « dangerous » (les survols de zones volcaniques, incendiées…).
A bien y regarder, les domaines d’application sont extrêmement nombreux et variés et la densité de l’ouvrage oblige à en passer par un énoncé de ces fonctions de surveillance, préalable à la prise de vue et/ou à l’action.
La mobilité du drone supplante la fixité de la caméra et trouve de nombreux terrains d’application : dans le domaine militaire initialement pour repérer l’ennemi, le colis suspect, éclairer le terrain au sol mais également dans la sphère civile au travers des convois sensibles (personnalités, fonds, prisonniers, matières dangereuses, embouteillages, manifestations qui s’échauffent…ou éventuels dérapages policiers si l’on se place « de l’autre côté »), de l’état des réseaux, de la biodiversité.
Mais les drones sont aussi des géomètres précis, rapides et moins coûteux ; des météorologues capables d’analyser l’intérieur d’un nuage ; des gardiens du patrimoine en péril et des archéologues de demain ; des agriculteurs sachant où épandre très exactement et où lutter contre les nuisibles ; des pompiers efficaces repérant les lignes de feu, les parcelles menacées et les possibilités d’accès en cas d’incendie ; des guides de montagne pouvant déclencher l’avalanche au bon endroit au bon moment.
Ils assurent enfin des livraisons, notamment en zones peu accessibles : médicaments, blessés mais aussi la captation/destruction d’un éventuel objet dangereux en vol (mais là, le recours aux aigles est encore privilégié). En drones mégaphones, ils peuvent aussi jouer le rôle d’avertisseur de dangers.
Autant de possibilités nécessitant d’organiser la cohabitation avec l’homme pour reprendre la formule du préfacier Michel Polacco, pilote professionnel, d’autant qu’il s’en est déjà vendu environ 500000 en France. Il faut donc se poser clairement la question du survol des espaces privés et du partage des espaces aériens avec les avions (là, les drones peuvent profiter de couloirs inaccessibles aux autres transports volants), notamment dans le cadre de vols de drones en essaims. On peut également se demander si cet engouement peut être fournisseur d’emplois : a priori oui, mais plutôt dans le secteur de l’interprétation des images récoltées que dans celui du pilotage lui-même. Les questions techniques s’invitent bien entendu dans le débat, notamment celles de la miniaturisation, de l’allègement et bien sûr de l’autonomie (et là, le largage du drone par parachute apparaît une solution).
La fin de l’ouvrage se veut prospective et imagine l’avenir en 2050 où les usages possibles interrogent peut-être moins les géographes mais où les auteurs imaginent une banalisation encore plus forte de l’outil qui deviendrait un assistant domestique : exploration des toitures, éclairage d’appoint en terrasse, caméra d’inspection de la cave, aide à la taille des arbres ou à la peinture murale mais aussi assistance des malvoyants, ou encore projecteurs de lumières, de lasers dans le cadre de spectacle. Et à terme, pourquoi pas un moyen de transport courant, comme le TGV, pour visiter la stratosphère ?
Des pistes riches et stimulantes pour interroger la façon d’appréhender l’espace, les façons de le parcourir et d’agir sur lui mais un essai assez difficile à suivre au style étrange mélangeant base écrite et formules orales.