Parue aux éditions Les Arènes durant l’été, l’incroyable histoire de l’Eglise s’inscrit dans la collection éponyme qui entend marier le savoir avec l’humour et l’autodérision. Cette fois-ci le regard pointu, mais plein de tendresse, des deux auteurs se porte sur l’Eglise catholique.
2000 ans d’histoire passés sur le dessin de Pascal Magnat et le texte d’Olivier Bobineau. Les deux compères incitent à la mise à distance de nos interprétations sur le message christique Objet du premier chapitre de la bande dessinée. Loin des représentations caucasiennes du Christ, nous retournons au peuple sémite qui a vu la naissance de Jésus. Les ruptures saillantes qu’apporte son discours dans une société juive conservatrice sont rappelées et expliquées : rapports entre hommes et femmes renouvelés, accomplissement de la Loi, rejet du marchandage religieux, fondement de la laïcité etc.
À l’aide de nombreuses références humoristiques ou empruntées à la Pop Culture, les auteurs nous conduisent dans les grandes étapes de la construction théologique et politique du christianisme : nous pourrions citer les grands théologiens des quatre premiers siècles (entre autres Paul, Augustin ou encore Tertullien), les a priori et fausses idées sur les textes bibliquesLe fruit de l’arbre de la connaissance, non précisé, devenu une pomme au Moyen-Age, la latinisation de l’Eglise en Occident ou encore les tensions grandissantes entre grecs et latins au moment même où apparaît l’islam (qui est brossé rapidement en quelques pages) et qui fait concurrence à l’Eglise d’Orient.
Sur près de 600 pages, les deux auteurs nous conduisent dans les grandes étapes de l’Eglise catholique dont l’histoire fut tout sauf calme ! Nous pourrions citer, entre autres, les réformes architecturales, les ordres mendiants chargés de chasser les hérésies, les croisades et autres complots des templiers accusés de satanisme et de sodomie, le grand schisme d’Occident, le trafic des indulgences et la Réforme du moine défroqué Luther, les affaires de coucherie motivant la Réforme anglaise, l’apparition de la Contre-Réforme et la conversion des peuples coloniaux, l’apparition du gallicanisme ou du jansénisme etc.
L’inventaire presque à la Prévert que nous venons de faire nous donne une idée de la richesse des événements que l’ouvrage veut brosser. Bien qu’humoristique, la bande dessinée est appuyée par une solide connaissance historique et théologique permettant aux lecteurs d’aborder simplement les principales dimensions des conflits spirituels et temporels qui se sont joués au cours des deux derniers millénaires.
Jusqu’au pontificat de François, Olivier Bobineau et Pascal Magnat abordent les grands défis que cette institution de deux millénaires doit relever. L’Eglise peine à s’intégrer dans la modernité et embrasser un monde qui accélère et bouscule des fondements qu’elle a quelque peu, et c’est un avis tout personnel, perdu de vue : le message profondément révolutionnaire du Christ
Un bande dessinée d’une grande érudition en somme qui a su, avec une grande tendresse, dresser un portrait sans faux-semblant de l’Eglise catholique. Et Rome a besoin de cela.
Interview d’Olivier Bobineau sur les antennes de la chaîne LN24