Ce qui est plaisant au premier abord avec l’ouvrage de Michel Goussot, maître de conférences à Sciences-Po Paris, c’est son design. Il est rare sur ce site de lire des commentaires sur le design d’un ouvrage, mais celui-çi est particulièrement réussi, à la façon de romans policiers de luxe, un noir mat rehaussé par quatre symboles incontournables (la statue de la liberté, Abraham Lincoln dans son marbre, le Stars and Stripes et enfin le panneau qui sépare Broadway de Wall Street), le tout en format 16/24 facile à manier et à emporter partout. Car c’est un livre qu’on peut lire à n’importe quel moment, une sorte de memorandum pratique pour toute question touchant aux Etats-Unis. Le titre aurait d’ailleurs pu être « tout ce que vous avez voulu savoir sur les États-Unis sans jamais oser le demander ». Michel Goussot est à l’aise partout, que ce soit dans la partie économique où il retrace le parcours des Etats-Unis de l’époque des fermiers-colons jusqu’à la dérégulation amorcée sous Clinton – paradoxal démocrate, on le verra beaucoup dans ce livre – qui aboutit à la crise de 2008, ou encore dans le passionnant chapitre 9 qui brosse deux cent ans de relations extérieures entre isolationisme, interventionisme et remise en cause contemporaine de leadership. On y trouvera aussi des précisions sur le système juridique complexe, sur le pouvoir des Etats, la vie politique, le code électoral, les différents groupes ethniques, le rapport à l’Etat (le Big Government que les Américains redoutent tout en le reconnaissant indispensable), à Dieu….En onze chapitres d’égale densité et d’égal intérêt, Michel Goussot nous présente un portrait complet des États-Unis, un portrait qui est loin de véhiculer la plupart des clichés européens concernant ce pays. Michel Goussot affine, montre la complexité d’un système bâti sous plusieurs influences, ses réussites, ses contradictions et ses failles aussi (excellent chapitre sur la pauvreté et sa signification, son acceptation teintée de fatalisme religieux), mais jamais il ne fait dans le raccourci.
A l’intérieur de chaque chapitre, des encarts éclairent le lecteur sur des points précis comme le mouvement chicano, le homestead act de 1862, le système électoral du winner takes all ou encore la figure de John Winthrop. Chaque terme technique est donné en version originale, ce qui ravira les enseignants exerçant en section européennes anglais et qui pourront ainsi se faire un lexique personnel. C’est un livre qu’on peut garder à portée de main, sur lequel on peut revenir pour approfondir un sujet particulier. On regrettera juste quelques coquilles de typographie, des lettres sautent souvent et le Star and Stripes devient , par exemple, le Star and Stripe, du coup plutôt…stripped.
Mathieu Souyris