Cela fait bien longtemps qu’un atlas consacré à la population française n’avait pas été publié. On dispose certes de nombreuses études, données mais reste à assembler et à donner du sens à l’ensemble. Cet atlas propose 160 cartes nouvelles, des mises à jour indispensables sur de nombreux thèmes et des analyses détaillées. Cet atlas a donc pour but de renouveler et parfois de bousculer certaines idées reçues et il propose aussi de nombreux zooms locaux.
Organisation de l’atlas
Les données récentes sont aussi un rempart contre les instrumentalisations politiques. Certaines thématiques proposées dans l’atlas sont très étudiées tandis que d’autres passent souvent sous les radars. Les phénomènes démographiques possèdent une forte inertie ce qui ne doit pas dispenser d’actualiser les données. Se rend-on bien compte que les plus de 60 ans représentent 28 % de la population contre 20 % il y a vingt ans ? Les quarante-trois thèmes sont regroupés en huit domaines. Les six premiers portent sur les incontournables d’une géographie de la population, le septième sur les ménages et comportements familiaux et le huitième sur les aspects socio-économiques. Les auteurs précisent ensuite leur méthodologie.
Le peuplement et les dynamiques démographiques
La France compte 105 habitants au km2 mais avec de grosses différences. La macrocéphalie parisienne est bien connue avec pas moins de douze millions d’habitants sur 12 000km2. Entre 1968 et 2020, la France a vu sa population augmenter de dix-sept millions d’habitants. Trois tendances majeures sont à noter : l’étalement urbain autour des grandes métropoles, la concentration de la population sur les littoraux de l’ouest et du sud et l’extension des bassins de vie aux basses densités du massif central au nord-est. L’atlas insiste ensuite sur la diversité de configurations géographiques pour le peuplement rural et urbain. Les agglomérations urbaines constituent des pôles de croissance démographique depuis 1975. Cependant, la ville-centre a souvent une trajectoire de décroissance ou de perte de vitesse. Plusieurs exemples détaillés sont proposés.
Les structures de la population
La population française est légèrement plus jeune que la moyenne de l’Union européenne avec une surreprésentation des individus de moins de 25 ans et une sous-représentation de ceux de 65 ans ou plus. Les territoires ruraux se distinguent néanmoins par une population vieillie. Pour les jeunes, on constate une géographie différenciée selon le cycle de vie. Les auteurs s’interrogent d’ailleurs sur les bornes d’âge exactes de ce groupe. L’atlas évoque aussi une gérontocroissance urbaine accentuée. On peut relever aussi qu’il y a 94 hommes pour 100 femmes en 2024 alors que le rapport est de 105 pour 100 à la naissance.
La fécondité
2010 marque une rupture car la fécondité baisse constamment depuis. Les auteurs notent la quasi disparition du « croissant fertile » ou du moins sa recomposition. Les cartes nationales mettent en évidence un modèle centre-périphérie : les villes centres ont une fécondité plus faible que les territoires alentour. On constate aussi une fécondité plus tardive dans les villes. On note des inégalités spatiales d’accessibilité aux services de santé et des disparités d’utilisation de la contraception.
La mortalité et la santé
La France apparait parmi les dix pays du monde où l’on peut espérer vivre le plus longtemps avec une probabilité moyenne de vivre jusqu’à 85,4 ans pour les femmes et 80 pour les hommes selon les chiffres de 2024. Il faut rappeler que dans la première moitié du XIX ème siècle, l’espérance de vie plafonnait à 40 ans. On note qu’à tous les âges les hommes meurent plus que les femmes. Les inégalités sociales face à la mort restent importantes. Les causes des décès s’expliquent en partie par l’âge et le sexe. Une entrée s’intéresse à la surmortalité liée à la covid 19 : la surmortalité a été un phénomène plus marqué dans l’Est, dans les DROM et en milieu urbain en général.
Les migrations
Le pays compte actuellement 6,6 millions d’immigrés et 4,9 millions d’étrangers. La population immigrée a progressé en France depuis l’an 2000 mais moins que dans le reste de l’Europe. La hausse vient d’abord de la migration estudiantine et économique tandis que la migration familiale recule. Les auteurs prennent le temps de définir précisément les termes d’étrangers et d’immigrés. On note une répartition plus homogène des immigrés sur le territoire métropolitain avec une progression nette de la part des immigrés dans la population de l’ouest du pays et dans les zones rurales et périurbaines. L’atlas détaille ensuite les migrations internes avec des changements résidentiels marqués par le cycle de vie. 11 % des habitants ont changé de logement au cours de la dernière année. Pour le covid les auteurs constatent que les migrations constatées sont plus une accélération de tendances migratoires préexistantes plutôt que de réelles nouveautés.
Les ménages et familles
Le mariage est en recul tandis que le nombre de Pacs augmente. Jusqu’aux années 60, les naissances hors mariage étaient rares avec moins de 10 % des naissances. Aujourd’hui, le chiffre est de plus de 65 %. Le divorce apparait comme un phénomène plus marqué dans les villes, le sud du pays et les DROM. Après 2000, plus d’un mariage sur deux se termine par un divorce.
Les dimensions socio-économiques
L’accès à la propriété individuelle est devenu difficile. Le taux de propriétaires progresse doucement passant de 50 % en 1984 à 58 % en 2013. On peut noter par ailleurs que depuis 1968 le nombre de résidences secondaires a été multiplié par trois. L’atlas propose un zoom sur la situation de la Bretagne à ce propos. Côté éducation, les auteurs rappellent que de 2015 à 2023 le premier degré a perdu 400 000 élèves. Pour l’enseignement supérieur, on constate des inégalités territoriales malgré une décentralisation de l’offre de formation. 60 % des étudiants ont quitté la zone d’emploi de leur domicile après le baccalauréat. L’atlas revient aussi, en les comparant, sur plusieurs définitions des personnes au travail selon le sens de l’Insee, de France Travail ou encore du BIT.
En épilogue, les auteurs ont choisi de porter leur attention aux défis territoriaux et aux changements climatiques. Les impacts de ces derniers sont régionalement différenciés. Les DROM sont parmi les zones les plus touchées. Le paradoxe c’est que d’autres régions pourraient devenir attractives. Cet atlas constitue donc un outil très précieux à la fois pour actualiser les données et proposer des cartes. Nul doute qu’il trouvera sa place dans la bibliothèque de tout enseignant d’histoire et géographie.


