Guillaume Prévost est un de nos collègues, c’est en historien autant qu’en romancier qu’il commémore ici le centenaire de la grande guerre.

Des personnages attachants, un récit plein de rebondissements qui captive le lecteur et qui est servi par une culture historique rigoureuse au service de l’hommage rare aux troupes coloniales engagées dans le premier conflit mondial.

Le premier chapitre peut dérouter le lecteur, nous sommes en 1984, les protagonistes ont des prénoms désuets, la situation de famille recomposée où s’agite une adolescente semble bien loin de la guerre mais cette introduction rend possible la rencontre d’Alma et du vieux tirailleur sénégalais Bakary Sakoro né sur les rives du fleuve Niger à la fin du XIXe siècle.

Dès le second chapitre le lecteur est entraîné par le dialogue des deux personnages la fantasque Alma et le vieux tirailleur qui au fil du roman lui raconte sa guerre.

La description de sa vie dans un village, un éclairage sur les relations sociales et les croyances animistes indispensables pour comprendre la psychologie du héros.

On suit le jeune homme depuis son engagement à Ségou à 17 ans, le voyage vers la France, la formation rapide à Fréjus et la découverte des réalités du front dans les trachées de 14-18. C’est aussi sa rencontre avec une jeune française et la difficulté d’un couple mixte dans la société de l’époque.

Tout au long du récit, ponctué des remarques très contemporaine d’Alma, se croisent le récit de la guerre et de la vie sentimentale et les amitiés du vieil homme.

La force noire évoquée dans le titre est à la fois le talisman du grand-père de Bakary, ancien adversaire des Français lors de la conquête de l’AOF, un gri-gri vendu aux jeunes recrues africaines par des compatriotes crapuleux et le nom donné par le général Mangin aux troupes coloniales dont les effectifs ont augmenté dans les années 1910 pour faire face à la baisse de natalité en France.

C’est avec précision et rigueur historique que sont rappelés les conditions des combats, la place en première ligne des troupes coloniales, leur sacrifice dans des missions périlleuses. On va suivre Bakary de son arrivée au front en mai 1916 à Verdun, du Chemin des Dames jusqu’à la dernière offensive allemande de 1918.

Un récit passionnant qui amène Alma à la découverte de l’histoire de sa propre famille.