Dominique BUCHETON a été enseignante, formatrice et professeure des Universités en sciences du langage et de l’éducation à l’IUFM de Montpellier. Yann MERCIER-BRUNEL a été professeur des écoles, formateur puis maître de conférences en Sciences de l’éducation à l’université d’Orléans puis à l’université Côte d’Azur. Accompagnés de leur équipe, ils nous proposent cet « ouvrage qui vise à faire comprendre le rôle de médiation indispensable des formateurs d’enseignants, à l’interface de l’expérience de terrain et des savoirs théoriques universitaires.

Il est surtout le résultat d’une recherche collaborative de plus de 10 ans visant à une compréhension approfondie des enjeux et des dilemmes de cette tâche d’accompagnement des débutants demandée aux formateurs. Il a fallu, souvent plusieurs fois, retranscrire des entretiens pour y repérer un certain nombre d’invariants et dégager des postures révélatrices de l’accompagnement des stagiaires par leurs tuteurs. Se dégage ainsi un « agir formateur » définissant leur capacité à mettre en réflexion les enseignants débutants, en quête de leur identité et leur développement professionnels (et quelquefois personnels).

Après une 1ère Partie dressant un état des lieux et des recherches sur ce développement professionnel et pointant un système de formateurs d’enseignants « dans la tourmente », les résultats de leurs investigations sont développées dans une 2ème partie sous forme de modélisations. Les auteurs, et notamment Dominique BUCHETON, propose donc d’adapter son modèle de Multi-Agenda (MMA) de l’enseignant au formateur (MAF). On retrouve les grandes préoccupations invariantes et organisatrices de l’agir enseignant dans la classe mais c’est la cible centrale, beaucoup plus complexe, qui diffère. En effet, l’objet central de l’entretien est en principe le développement réflexif du stagiaire à partir de sa séance. Celui-ci passe, au cours de l’entretien, « par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel ».

Au-delà de ces « macro-préoccupations » du formateur, les auteurs proposent une ronde de 7 postures d’étayage, associées à des gestes et des dilemmes : d’accueil, de valorisation, d’exploration problématisante, de traduction technologique, de traduction surplombante, de conseil et de description. Du côté du stagiaire, l’analyse des entretiens a permis d’analyser son parcours réflexif, c’est-à-dire sa capacité à être critique par un retour sur soi pour interroger, réguler, évaluer ses actes, intentions, conceptions, valeurs,… Différents registres réflexifs indiquent alors le niveau développement réflexif du stagiaire : retour d’expérience, registre de questionnement, de théorisation personnelle, épistémique, de projection ou de l' »auteurisation ».

Pour tout accompagnateur, tuteur ou « mentor » d’enseignants débutants, ce livre est passionnant. Il révèle des gestes et des postures, non insoupçonnés, mais souvent peu explicités ni modélisés. Il apporte des réponses concrètes à des questions que tous les formateurs, récents ou plus expérimentés,  se posent. En conclusion, les auteurs militent pour le développement des recherches collaboratives, comme la leur, pour permettre une montée en compétence des formateurs et rappellent qu' »on ne rendra pas les formateurs efficients en les outillant de grilles compétences à valider, mais en les aidant à se construire comme professionnels de la formation ». Impossible ?

 

Voir aussi la recension de Jean-Pierre Costille ICI