« Géographie de la France », une de plus serait-on tenter de dire.
Oui, mais une géographie de la France qui propose une approche résolument nouvelle. Elle est pratique, complète et s’avère être plus un outil (indispensable avancent les auteurs) qu’un simple manuel de plus sur la géographie française.
Publié dans la collection « Hachette Université » plus connue pour ses ouvrages sur l’histoire, cette « Géographie de la France » entend combler un vide tout en offrant ses lettres de noblesses à la géographie. Une géographie bien vivante alors que d’aucuns la voyait déjà morte comme le souligne Vincent Adoumié dans un précédent ouvrage intitulé « Enseigner la géographie en lycée » paru aux éditions Hachette en 2001.
Ecrit à cinq mains (un universitaire et quatre professeurs de classes préparatoires ou du secondaire), cet ouvrage, dès les premières pages, apparaît comme un véritable manuel de référence. Le cursus même de Vincent Adoumié n’est certainement pas étranger à cette touche originale qui consiste à placer chaque approche géographique dans une perspective historique.
En effet, agrégé d’histoire (1987) et agrégé de géographie (1989), Vincent Adoumié écrit à juste titre que « la géographie de la France requiert les mises en perspectives de l’histoire afin de mieux comprendre les logiques spatiales et les dynamiques territoriales du pays qui se sont développés au fil des siècles ».
Mais, l’apport de Christian Daudel, géographe et géopoliticien français, maître de conférences à l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne s’avère d’autant plus précieux si l’on se souvient de son ouvrage « Les fondements de la recherche en didactique de la géographie » Peter Lang, Berne, 1990.
« Géographie de la France » est donc avant tout un ouvrage au pragmatisme avéré. Il analyse le territoire français à quatre échelles différentes (locale, nationale, européenne et mondiale) tout en cherchant à en dégager ses spécificités. Pour étayer les démonstrations, les auteurs apportent au lecteur un corpus documentaire particulièrement riche et varié. Ainsi, cartes, croquis, schémas, textes et tableaux (avec des données toujours très récentes) sont présentés. Mais surtout, le lecteur trouvera en fin d’ouvrage un imposant glossaire de plus de 200 termes utilisés avec des renvois tout au long de l’ouvrage. Et, en fin de chaque chapitre, les auteurs ont fourni une bibliographie très fouillée qu’ils n’ont pas hésité à commenter pour davantage orienter le lecteur qui désire approfondir tel ou tel aspect d’une question.
Un ouvrage qui, par tous ces aspects, s’apparente davantage à un manuel de référence et qui aborde la géographie de la France en cinq parties.
Partie 1 : La France diversité et unité des territoires
Les auteurs abordent, ici, l’identité de la France. Si les apports ne sont pas réellement innovants, il faut cependant saluer la concision et la précision avec laquelle, en quelques vingt-deux pages à peine, le lecteur survole l’histoire de la Gaule avant Rome jusqu’à « notre » France, celle que nous percevons. Le tout agrémenté de documents et surtout d’une bibliographie invitant le lecteur à aller plus loin.
Et cette partie se poursuit (naturellement) avec une approche plus physique. Mais là aussi, l’originalité réside dans l’approche comme par exemple cette étude climatologique qui est abordée sous l’angle des perceptions subjectives du « temps qu’il fait ».
Enfin, cette partie s’achève par une présentation du « découpage » de l’espace national avec ses particularités, ses contradictions pour terminer sur « l’élaboration d’une nouvelle France à vivre ».
Partie 2 : Les populations de la France
Dans cette deuxième partie, les auteurs traitent de manière un peu plus classique la démographie et les dynamiques de peuplement en consacrant un chapitre entier à la France urbaine. Il faut toutefois relever, dans cette partie aussi, la richesse et la variété des documents et des tableaux où chacun pourra puiser. On pourra par exemple prendre appui sur un extrait du journal « le Monde » intitulé « un exode urbain ? » (page 98), le croiser avec le tableau concernant l’évolution des 15 premières aires urbaines (page 107) puis aboutir à la cartographie sur les taux d’urbanisation et les aires urbaines présentées aux pages 114 et 115. Cet ensemble documentaire pourrait même faire l’objet d’un devoir…
Partie 3 : Les mutations de l’économie française
Avec le pan économique, le lecteur retrouvera une touche d’originalité réelle. Si l’économie française est passée en revue dans son entier, c’est l’approche qui, ici, s’avère singulière. En effet, toujours avec autant de concision que de précision, les auteurs nous présentent l’agriculture française en commençant par « la révolution silencieuse des campagnes » pour nous amener au fil des pages à l’agriculture française « première puissance agricole européenne ».
De même, l’industrie est analysée par le biais « des transformations du système productif » permettant de dépeindre en quelques pages « l’histoire de l’industrie française », de traiter de la nouvelle industrialisation pour aboutir à la tertiarisation de l’économie et finir par l’importance des réseaux qui structurent un territoire qualifié « d’attractif ».
Partie 4 : Les régions françaises
Une géographie de la France sans aborder les régions ne serait pas complète. C’est pourquoi les auteurs consacrent une partie entière à cette étude. L’originalité réside là encore dans la concision et la précision, dans la variété et le nombre important de documents mais aussi dans la bibliographie présentée.
Mais au-delà, il faut saluer l’analyse qui, pour chaque région, s’attache à nous présenter la diversité du cadre physique et le cadre géohistorique avant de retracer les lignes de forces qui organisent l’espace.
Partie 5 : La France en Europe et dans le monde
Cette dernière partie s’attache à nous montrer une France présente à toutes les étapes de la construction européenne mais aussi le rôle qu’elle peut ou doit jouer.
Enfin, les auteurs analysent la puissance française et s’interrogent sur le rayonnement mondial de la France. Dès le début du chapitre, ils n’hésitent pas à écrire que la France « prétend être porteuse d’une mission universelle » et que malgré « des statistiques flatteuses », elle n’a de cesse de s’interroger sur son rôle mondial, insistant même sur le fait que « depuis des décennies, de nombreux intellectuels français doutent de la capacité de leur pays à résister à un déclin qu’ils jugent inéluctable ».
Mais, par la suite, tableaux de chiffres à l’appui, les auteurs nous démontrent sinon « la », du moins « une » certaine puissance de la France.
Quant au rayonnement mondial effectif, les auteurs font un tour d’horizon complet en présentant d’abord les aspects de l’héritage historique, relatant ensuite les références culturelles pour aboutir enfin à une analyse de l’audience actuelle de la France dans le monde. On pourra simplement regretter que la cartographie qui accompagne ce chapitre soit une réelle bourde. En effet, sous deux titres intéressants à savoir : la francophonie dans le monde et les exportations françaises dans le monde en 2006, le manuel nous offre deux fois la même carte : celle de la francophonie…
En conclusion,
« Géographie de la France » est un titre que l’on aura du mal à classer sur nos rayons tant les homonymes se bousculent. C’est peut-être le seul véritable reproche que l’on pourra faire à cet ouvrage. Un ouvrage qui est plus un manuel de référence à mettre sur tous les coins de bureaux, des étudiants, des enseignants…
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