Ponctuée de nombreuses illustrations, parfois inédites (photos, publicités, gravures, dessins ou cartes), cette troisième édition de L’histoire de l’ours des Pyrénées conserve son attractivité pour tout lecteur épris des Pyrénées, ou du plantigrade, ou des deux à la fois.
En outre, l’ouvrage, servi par la plume alerte du journaliste et écrivain Olivier de Marliave, séduit par son organisation rythmée en six chapitres : Géographie des ours et état des lieux, De la guerre à l’ours à l’Armistice, Les ours du troisième millénaire, L’ours au Panthéon pyrénéen, Quel avenir pour les ours en Europe ? Ces derniers sont subdivisés en parties brèves mais denses au travers desquelles l’auteur livre une » histoire des hommes et des ours en termes de conflits sur des territoires communs et partagés » (p.37). Ainsi, ces pages vont de la cohabitation préhistorique forcée à la guerre entre ces deux acteurs, à l’apogée démographique pyrénéenne de l’époque contemporaine.
Une mention spéciale peut être décernée au chapitre L’ours au Panthéon pyrénéen qui foisonne de référents culturels liés de près ou de loin (le conte Jean de l’ours) au plantigrade. Bêtes de foire (les orsalhers, montreurs d’ours ariégeois), amants improbables, fêtes de l’ours garnissent cet édifice qui constitue de nos jours un pan du folklore pyrénéen.
De la strychnine à la réintroduction
Ainsi, cette histoire de l’ours multiplie les anecdotes, dont les plus anciennes remontent aux alentours de l’An Mil, quand Sanche IV de Navarre écrit avoir tué quatorze ours à Roncevaux. Par ailleurs, les questions du piégeage, de la traque, des accidents de chasse ou encore des primes émaillent le récit, rendant compte de l’importance des relations entre l’animal et l’homme dans ce massif méridional à l’époque moderne. Mais, selon l’auteur, c’est à partir des années 1920 qu’un tournant se confirme à la faveur de la modernisation des armes à feu, alourdissant le tableau de chasse. Et quand les armes font défaut au cours de la Seconde guerre mondiale, alors l’usage de la strychnine placée dans des cadavres d’animaux pour empoisonner les ours est attesté.
Pyros et les autres
Un autre tournant majeur se dessine à la fin du vingtième siècle, quand la question environnementale s’installe dans le débat public. Dès lors, la dualité absence-présence de l’ours dans les Pyrénées se pose en d’autres termes qui font émerger de nouvelles voix et de nouveaux conflits entre les hommes (Ecolos des villes, écolos des estives, p.183). Ces débats se concrétisent par la réintroduction médiatisée de 1996-97 : rappelez-vous, la petite oursonne Pyros qui saute d’une fourgonnette puis s’époumonne dans un sous-bois de Melles (Haute-Garonne).
Au rang des regrets, l’offre cartographique, insuffisante, constituerait pourtant un levier idéal pour ancrer davantage le propos et approfondir certaines réflexions, sur les traces des travaux de l’historien et spécialiste d’éthologie Eric Baratay par exemple.
In fine, le livre se referme sur le chapitre Quel avenir pour l’ours en Europe ? Un jeu d’échelles qui s’avère très pertinent, notamment pour mesurer et nuancer les enjeux du couple nature (ou environnement) / développement.