Les éditions Caraktère lancent une nouvelle revue dont les deux premiers numéros ont été mis en vente début septembre et début novembre 2009. Le projet clairement défini dans le dossier de presse est assez ambitieux : « Faire revivre, jour après jour, bimestre après bimestre, l’intégralité (…) de la Seconde Guerre mondiale ». Il s’agit « grâce au concours d’historiens et avec une iconographie unique, de vivre une véritable immersion dans la période de 1939-1945. Autour de chroniques, présentant les événements au quotidien, et d’articles rédigés par des spécialistes reconnus, viendront s’éclairer les thèmes les plus divers à la lumière des découvertes et des débats récents. La politique, la diplomatie, les questions militaires auront leur place, tout comme l’économie, les sociétés, la culture, les sciences ou plus simplement la vie quotidienne ».

Une iconographie et une cartographie de qualité

Le numéro 1 paru le 1er septembre 2009 est centré sur les mois de septembre et d’octobre 1939 et le numéro 2, paru le 1er novembre, sur les mois de novembre et décembre 1939, avec évidemment des récurrences et des mises en perspective. Ils traitent globalement de l’entrée en guerre, des forces, des politiques et des stratégies, des acteurs principaux, des dictatures fasciste et nazie, des premières opérations militaires en Pologne et en Finlande. L’iconographie est abondante et de qualité, souvent originale et expressive: photographies des premiers massacres en Pologne, photographie de l’appel à Dachau en 1937 sur laquelle se lit l’immense détresse et la souffrance des hommes, diverses photographies de Hitler et de Churchill, photographies de la guerre de Finlande etc. La cartographie est simple et lisible : L’Europe des périls en 1939, l’invasion de la Pologne, la guerre de Finlande etc.

Contenu diversifié, articles de bonne tenue

Quelques articles sont rédigés par des amateurs éclairés ; la plupart le sont par des universitaires, historiens spécialisés : François Kersaudy, Edouard Husson, François Delpla, Jean-Louis Margolin, François Cochet etc.
Excepté un article superficiel et lacunaire consacré à Mussolini dans le n° 2, les articles sont solidement documentés, bien écrits, et tiennent compte des acquis récents de l’historiographie (qu’il s’agisse de la biographie de Hitler, de celle de Churchill, de la campagne de Pologne, des exactions de la Wehrmacht, et de bien d’autres faits). Des encarts thématiques, des frises chronologiques, des notes biographiques ou bibliographiques éclairent le texte et le rendent accessible à un vaste public, y compris scolaire. Dans sa composition, la revue fait alterner articles et rubriques diverses qui en forment la trame et que les lecteurs vont retrouver à chaque numéro. Une chronique quotidienne des événement des deux mois de référence de chaque revue présente « en bref » ou en plus détaillé des faits de tous ordres ; certains sont traités un peu plus longuement ou renvoient à un article (l’attentat du 8 novembre 1939 contre Hitler par exemple).
Quelques faits sont traités de manière à mettre en perspective des évènements ou des préoccupations actuels (la grippe, le pouvoir d’achat en 1939). Une double page est consacrée à l’affiche de propagande, en partenariat avec le Centre international de recherche sur l’image politique.

Le numéro 2 inaugure une rubrique « Témoins et acteurs » par un entretien avec Raymond Aubrac qui parle de son avant-guerre. Trois ou quatre pages sont consacrées à une critique d’ ouvrages récemment publiés sur cette période ; ouvrages historiques essentiellement mais aussi romans historiques, si l’on peut qualifier ainsi le dernier ouvrage de Didier Daeninckx, Missak.

S’y ajoute une revue de « littérature de jeunesse » tenue par Rolande Caussé ainsi qu’une revue des DVD et diffusions télévisées (Apocalypse bénéficie dans le n° 1 d’une présentation exagérément dithyrambique).

Le n° 1 propose neuf articles principaux : Hitler à la conquête du pouvoir ; les dernières crises diplomatiques et la marche à la guerre ; les mobilisations ; la campagne de Pologne ; Londres à l’automne 1939 ; le retour de Winston Churchill au poste de Premier Lord de l’Amirauté et son entrée au sein du cabinet de guerre le 3 septembre 1939 (par son plus récent biographe) ; une présentation approfondie de l’Aktion T4 : « De l’eugénisme de Galton aux euthanasies de Hitler » ; Roosevelt et la neutralité américaine ; les premières exactions massives de l’occupant contre les populations civiles polonaises, juives en particulier.

Les meilleurs articles du n°2 sont consacrés aux origines du système concentrationnaire nazi, aux relations d’Hitler avec les femmes, au début de la « drôle de guerre » en France, à la stratégie d’expansion soviétique et à la guerre de Finlande.

Une revue agréable à regarder, à feuilleter et à lire

Histoire(s) de la Dernière Guerre n’est pas une revue d’histoire militaire; les articles consacrés à l’invasion de la Pologne et à la guerre de Finlande n’appartiennent pas à ce type d’articles fastidieux qui vous accablent de numéros d’unités militaires et de précisions tactiques interminables comme on pouvait en lire dans les articles des revues qui dans les années 1970 suivaient elles aussi la guerre au jour le jour.
Ce n’est pas une revue scientifique pour spécialiste d’histoire politique, diplomatique ou militaire. Il s’agit plutôt d’une revue traitant des divers aspects de la période de la Seconde Guerre mondiale. Son contenu est large et diversifié ; c’est une revue de vulgarisation, au bon sens du terme, destinée à un large public. C’est une revue agréable à feuilleter, à regarder et à lire. Elle a sa place dans les CDI de nos lycées si les numéros à venir tiennent les promesses des deux premiers.

© Joël Drogland