L’histoire de l’indépendance du Congo est étroitement liée à celle d’un homme, Patrice Lumumba. C’est cette histoire que Nicolas Pitz, épaulé par le dessinateur Pierre Lecrenier, retrace dans une BD au titre énigmatique : La dent.
Pas étonnant que les deux auteurs belges soient interpellés par la décolonisation belge. Ils mettent en scène, un « colonisé éduqué », comme on disait dans les années 1950-1960, dans son parcours de StanleyvilleKisangani aujourd’hui au N-E de la RDC, en 1952 jusqu’à son assassinat en 1960.
Lumumba prend conscience au début des années 1950 des différences de statutsLe lecteur trouvera le détail des différents statuts expliqués p 20 entre blancs et noirs, une situation et des sentiments qui évoquent l’expérience vécue par Amadou Hampâté Bâ, décrite dans Amkoullel, l’enfant peul et Oui mon commandant.
Cette réalité du monde colonial conduit Patrice Lumumba à militer pour l’égalité. La qualité de son écriture lui ouvre des portes et l’amène, en 1956 à rencontrer le roi Baudouin. Il est question de réformes plus que de révolution.
La BD retrace fidèlement les événements, dont son arrestation au retour de son voyage à Bruxelles, une injustice qui va le pousser vers plus de radicalité. Il participe à la Conférence d’AccraOn pourra se reporter à l’article du Monde diplomatique daté de février 1959., en décembre 1958 au nom du Mouvement national congolais.
Les idées, les discours sont bien mis en valeur notamment en 1960, au moment de l’indépendanceTextes des discours du roi Baudouin et de Patrice Lumumba sur Cliotexte (https://clio-texte.clionautes.org/la-decolonisation-de-lafrique.html) on pourra aussi voir le film Soundtrack to a coup d’État qui sort en salle le 1er oct 2025. Très vite, la situation se tend entre les régions, entre les hommes : Lumumba, Kasa-Vubu, Tshombé, entre unité nationale et revendication d’autonomie et même d’indépendance de certaines régions notamment au Katanga, avec la sécession, soutenue par la puissance belge, riche région minière. Dans un monde marqué par la Guerre froide, même si le terme n’est pas employé, se pose la question du rôle de l’ONU et du recours possible à Moscou.
Les auteurs montrent clairement les troubles, la violence de la crise congolaise jusqu’à l’assassinat de Patrice Lumumba.
L’épilogue permet de comprendre le titre. Cette dent arrachée au cadavre par un policier belge qui fut restitué seulement en 2022.
La BD est complétée d’une interview des auteurs et de quelques esquisses et planches du dessinateur.
Voilà une BD qui peut avoir sa place au CDI pour un témoignage sur la décolonisation.