« Mais où est donc passée la France ? », s’étonnait Rémy Knafou lors de la parution des nouveaux programmes de première, visiblement écartelés entre l’échelle européenne et les territoires locaux. Partageant cette inquiétude en le citant dès les premières lignes de ce numéro 8096 de la Documentation Photographique, Magali Reghezza-Zitt, maître de conférences à l’Ecole Normale Supérieure, se propose d’offrir un regard actualisé sur la situation de la France.
Après une bonne définition du « territoire » (étendue physique, agencement spatial de faits sociaux et espace approprié), la partie introductive s’arrête sur les grandes dynamiques d’une société toujours plus urbanisée et malgré la stabilité de la trame urbaine originelle (« la mort de la ville et le triomphe de l’urbain » comme le rappelait Françoise Choay), toujours plus mondialisée malgré les réponses toujours plus attendues des « avantages comparatifs » des territoires locaux, toujours plus mobile malgré une certaine tendance au repli pour ne pas dire une tendance certaine en regard de la carte du vote Front National même si les métropoles semblent résister.
L’analyse documentaire détaillée propose un regard sur le territoire national dans sa globalité avant de se livrer à une étude par types de territoires (ruraux, industriels, touristiques, frontaliers, insulaires…) et une ouverture sur les grands enjeux de demain (reconversion, protection de l’environnement ou encore gouvernance).
Assez classiques, les documents n’en sont pas moins pertinents et on remarque bien qu’une simple photographie savamment choisie, p 19, rend idéalement compte de la diversité de la société française (âge, sexe, origine), ce qu’un bon graphique sur l’origine des immigrés, p 29, permet de compléter. Les cartes sont également soignées, celles de la DILA et de la DATAR, nombreuses, ou encore celle de l’IAU d’Île de France exposant la spécialisation des périphéries parisiennes en page 33. On pourra s’interroger toutefois, p 35, sur la catégorie « littorale » définissant certaines villes intermédiaires en fonction de la part élevée des plus de 60 ans – ce n’est qu’un critère…- incluant des communes comme Aubenas ou Montélimar pas franchement au bord des côtes.
Enfin, on soulignera l’intérêt de certains outils généraux, transposables, comme l’incontournable « échelle » qui permet d’affiner le regard sur un sujet au fur et à mesure que l’œil se rapproche (exemple des inégalités de revenus dans le cas de l’agglomération strasbourgeoise, p 54-55, tout à fait utilisable dans d’autres contextes).
Un portait complet, à la fois abordable et clairement expliqué, de notre territoire, qui pourra satisfaire les étudiants et les enseignants de tous niveaux, même ceux du primaire, comme le précise pour notre plus grand plaisir, l’édito de ce numéro.