Voilà vingt ans que le FIG existe. C’est pour fêter cet anniversaire qu’un ensemble d’acteurs publics (Ville de Saint-Dié, Région Lorraine) et privés ont confié à Gérard Louis éditeur le soin de publier un album souvenir dirigé par Vianney Huguenot et par Georges Roques. C’est un beau livre qui nous est offert : grand format, illustrations en couleurs, sans oublier la reproduction de la célèbre carte de Martin Waldseemüller, père de la dénomination America (1507, gymnase vosgien de Saint-Dié). Le feuilleter est un grand plaisir pour ceux et celles qui ont fréquenté de manière assidue les rues de cette petite ville dédiée chaque année à la géographie pendant 4 jours. Au-delà des photographies de personnalités invitées au fil de ces 20 années, on se prend à chercher des têtes connues ou bien encore la sienne dans les photographies du public. Comme Le Quotidien du FIG, quatre pages qui paraît 4 jours dans l’année pendant le festival et dont la lecture est très courue chez les festivaliers (pour notamment rendre compte de l’actualité et les bons plans à ne pas manquer), La GEOgraphie, quelle Histoire ! est tel un album de famille (celle des géographes) dans lequel on aime à se plonger pour revivre de bons moments.
Ce livre va bien au-delà du plaisir de regarder les illustrations. Plus de 50 auteurs ont contribué au texte. Vianney Huguenot, directeur de la promotion de la Ville de Saint-Dié-des-Vosges, a dirigé l’ensemble. Mais, il revient à Georges Roques, géographe montpelliérain (IUFM et Montpellier III) d’avoir coordonné les productions des géographes auteurs et notamment veillé à diversifier ces productions afin que les redites soient minimales. Le but double de ces contributions était aussi, par le biais du récit de cette grande aventure, de rendre compte des évolutions qu’a connu la géographie en 20 années : rôle croissant des SIG et des géographes au sein des collectivités territoriales, alors que le nombre de géographes dans l’enseignement secondaire décroît inexorablement, rôle crucial joué par l’inspection générale pour rendre accessible le FIG (plan de pilotage national) et ses actes (mise en ligne)… sans compter la diffusion de la géographie, y compris dans des lieux incongrus, tels les Cafés.
Deux personnes tiennent une place à part dans cet ouvrage : Christian Pierret (le président-fondateur du FIG, maire de Saint-Dié-des-Vosges, ancien ministre) et Jean-Robert Pitte (le géographe de « la bonne bouffe » et président de l’ADFIG – association pour le développement du FIG-). La passion de tous deux pour la bonne chair se retrouve sur des photographies où ces deux vedettes, toquées, se prêtent au jeu des leçons culinaires qui sont données parallèlement aux conférences de géographie dans le cadre du Salon de la Gastronomie. Car, ce qu’il faut bien comprendre dans ce bilan de vingt années, c’est que mettre sur pied en 1989 un Festival International de Géographie, cela n’avait rien d’évident dans une petite ville de l’est de la France, en carence de notoriété. Loin de devenir le « Davos de la géographie », le FIG est désormais une grande fête ouverte à tous et à tous les domaines et qui attire 50 000 visiteurs chaque année. La genèse de l’évènement est racontée avec force témoignages élogieux, voire attendrissants. Mais, ce n’est pas pour autant une hagiographie du FIG (même si Armand Frémont parle de « miracle »). La mauvaise réception de la première édition par les journalistes parisiens n’est pas éludée comme le peu d’engouement rencontré par Christian Pierret à l’énonciation de son idée d’organiser un Festival de géographie. Désormais, Saint-Dié est un « repère (repaire ?) pour les géographes » (Bernard Debarbieux). C’est aussi un matériau d’une étude de cas. Car, ici, s’est joué un acte de l’aménagement des territoires, grâce à de multiples acteurs : géographes, politiques, médias. Mis sur pied grâce à une aide accordée par le FEDER, la ville doit se passer, depuis 2005, de cette subvention non négligeable (34% du budget du FIG en 2003). Elle a du pour cela se tourner vers le mécénat public et privé. Car, le festival est bien plus que la réunion annuelle de géographes autour d’un thème choisi, il est à la fois un enjeu identitaire, un outil de développement, un vecteur d’ouverture culturelle et un facteur d’animation locale.
Aujourd’hui, le FIG est victime de son succès (manque de salles et de places) comme le rappelle Laurent Carroué (directeur scientifique du FIG de 2002 à 2008). Il faut désormais réfléchir à la mise en œuvre d’une nouvelle logistique pour accueillir le flot des festivaliers. L’exercice de prospective, auquel se sont prêtés quelques auteurs dans la dernière partie de l’ouvrage, clôture le volume sur une note d’humour et d’ « optimisme » ( ?). Le FIG et Saint-Dié en 2029, cela donne une ville de deux millions d’habitants dotée d’un stade olympique Christian Pierret (les Jo y ont eu lieu en 2028), une cité de la Géographie (présentant tous les équipements nécessaires à l’accueil des festivaliers), un aéroport international (Vautrin Lud), un vaste complexe balnéaire aux bords de la Meurthe (Saint-Dié Beach) mais aussi un vaste vignoble qui a remplacé une partie des forêts, sous l’effet du réchauffement climatique. Par ailleurs, la ville a changé de statut. Elle est devenue Capitale de l’Europe, organisation à la tête de laquelle se trouve un président géographe. Le discours de clôture du 40ème FIG, par Christian Pierret, s’achève sur cette phrase : « L’humanité peut être rassurée. La survie de la planète est aux mains – et aux têtes – des géographes… » Alors, pour sûr, je suis impatiente de vivre cela !
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