Quand le fond et la forme communient, cela peut donner La malédiction du pétrole qui nous narre, avec sa sombre palette graphique, la non moins sombre histoire de l’avènement du pétrole (pétrolocène?). J-P Pécau livre en effet une histoire fondée sur un capitalisme cynique et triomphant d’abord au cœur de la mondialisation et de l’industrialisation du second XIXe siècle. Puis l’ouvrage aborde le XXe siècle et se fixe bientôt sur l’aspect géopolitique, sur le mode dis-moi où surgit le pétrole, je te dirai qui est on allié. La primordialité de l’or noir pour Hitler, la mainmise US sur les ressources en hydrocarbures au Moyen-Orient, etc. A l’Est, rien de nouveau, l’industrie dicte sa loi. Enfin, le terme de cette saga est forcément marqué par un bref clin d’oeil  »vert » et un autre au terrorisme.

L’ombre de Giger

On notera la répétition de motifs tout au long des 104 pages, Rockefeller et le bébé (qui évoque des dessins de Giger), Al Saoud, les Sept sœurs…. Choix qui a tendance à figer l’histoire et à lui ôter sa dynamique, mais qui présente en revanche l’avantage de dévoiler les constantes du temps long et d’installer un lancinant climat de peur. Point de dialogue non plus au fil de ces pages, mais une voix off, d’outre-tombe qui vient constater les dégâts générés par l’exploitation de l’or noir, formidable outil de développement de l’industrie et de la modernité.

Une fois la BD refermée, on ressent plus l’envie d’enfourcher son vélo que celle de démarrer son auto.

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