C’est clairement un manuel pour étudiants du supérieur et on n’y trouvera pas, ce n’est pas le but, de thèse hardie ou d’innovation épistémologique. On pourra donc l’utiliser de façon linéaire mais aussi en s’y référant pour y piocher avec beaucoup de facilité le renseignement dont on a besoin.
En quelques dizaines de lignes par sujet, les différents aspects de la question sont ainsi abordés. Une brève présentation de la zone, pour la première partie, un résumé d’histoire de l’Asie au XIXe et au XXe siècle, dix pages de rappel sur la guerre froide, et, globalement on peut avoir une vision succincte mais globalement juste du cadre historique.
Développement économique
La troisième partie de l’ouvrage concerne l’économie avec quelques rappels sur les modes de développement économiques. On reviendra alors sur les quatre dragons et les bébés tigres, avec un rappel sur les recettes du succès. Evidemment le passage d’une économie extravertie à un développement ouvert où le marché intérieur commence à prendre de l’importance est largement traité, ainsi que le krach de 1997 qui, dix ans après a quand même largement marqué les consciences. Toutefois ses effets macroéconomiques ont été effacés mais les acteurs ont su en tirer des enseignements. Son analyse est quand même un peu trop schématique et surtout ses causes auraient pu être plus clairement expliquées. Certes les fondamentaux y sont mais les phénomènes monétaires ont été assez peu évoqués, notamment l’Endaka, la revalorisation continue du Yen par rapport au dollar. C’est ce phénomène qui a été à l’origine des pertes de marchés des entreprises nipponnes.
On parcourt ainsi les différents thèmes qui concernent l’Asie. Une évocation indispensable du mode de développement chinois, avec un paragraphe sur l’économie de marché socialiste, expédié en une page, mais le cas chnois est repris en tant que tel en dernière partie; une évocation de la junte militaire birmane assez précise mais qui ne prend pas en compte le jeu assez trouble de l’ASEAN. Cette dernière s’accommode assez bien de la junte allant jusqu’à l’intégrer dans ses structures de sécurité.
Le rappel historique sur le processus de démocratisation est par contre tout à fait pertinent. Le Japon est également traité dans cette partie, ce qui peut surprendre mais qui est tout à fait juste.
Des rappels sur l’approfondissement démocratique
Pourtant, il y aurait beaucoup à dire de la réalité de cette démocratie où les cliques politico-financières font toujours la pluie et le beau temps. Les choses ont changé depuis les années 90, et cela explique aussi les difficultés du Japon qui découvre finalement assez tardivement la démocratie à l’occidentale. Certes les libertés fondamentales sont garanties, mais les populations pendant une assez longue période se sont coulées dans un moule conformiste peut-être plus pesant et aussi plus efficace qu’un régime autoritaire classique. De ce point de vue l’héritage confucéen a sans doute pesé et pèse encore dans le développement des dragons et également des bébés tigres issus de l’aire culturelle chinoise.
On retrouve aussi dans cet ouvrage deux parties fort pertinentes consacrées pour l’une aux fléaux de l’Asie et l’autre aux foyers de tension. Sont ainsi évoqués successivement les problèmes d’exode rural et d’environnement mais aussi les mafias, la piraterie et les phénomènes divers de corruption. Rapidement traités dans le cadre forcément limité de l’ouvrage ces articles peuvent constituer une première approche de la question.
Pour ce qui concerne les conflits, la situation géopolitique est traitée de façon très complète sauf pour ce qui concerne les conflits insulaires liés à des litiges qui relèvent du droit maritime international. Pourtant ce sont ces conflits qui sont toujours d’actualité, bien plus que le litige entre la Chine et l’Inde aux confins du Cachemire clos depuis près de deux ans.
Une présentation des trois grandes puissances d’Asie, Japon, Chine et Inde précède un développement sur la présence des Etats-Unis assorti d’une carte.
Sans doute que cette approche commode et logique ne risque pas de désorienter le lecteur pourtant on se prend à souhaiter un petit peu plus. Une double démarche opposant les acteurs externes à la zone, comme les Etats-Unis, les forces de regroupement comme l’ASEAN qui n‘est pas traitée en tant que telle, et les logiques propres des grands acteurs locaux aurait été préférable. Cela aurait été plus satisfaisant intellectuellement mais aurait pu désorienter l’étudiant de base, venu apprendre dans ce manuel les éléments indispensables à la rédaction d’une copie en relations internationales acceptable.
Cet ouvrage peut également servir les préparationnaires des concours de secrétaires de chancellerie ou autres prép. ENA, souhaitant accéder rapidement à un socle de connaissances de base, précises et mises à jour. De ce point de vue, les ouvrages de ce type doivent impérativement être accompagnés d’une lecture soutenue de la presse internationale. Les pays d’Asie utilisent suffisamment la langue anglaise pour que l’accès à leur presse soit facilité.
Au final, cet auteur qui est un essayiste et qui le revendique a fait œuvre utile et beaucoup d’étudiants lui sauront gré de leur avoir fourni une première approche d’une question qu’ils pourront alors approfondir si besoin.
Bruno Modica © Clionautes