Maurice Laval est né en 1920 à Saint-Symphorien en Touraine. Quittant avec sa famille sa région natale, il se retrouve, encore adolescent, à travailler dans une imprimerie de Montrouge avant d’intégrer le service « technique graphique » des usines Renault de Billancourt et, en 1939, l’unité de production mécanique des automobiles Celtaquatre.
Il s’engage tout aussi jeune en politique, d’abord chez les Faucons rouges puis chez les jeunes socialistes révolutionnaires. D’obédience trotskiste (il rencontrera son mentor en 1935 à Paris), Maurice Laval rejoint le Comité laïque des auberges de jeunesse dont il assumera le secrétariat général durant l’été 1940.
Il entre ensuite en résistance, subtilisant des fichiers en lien avec son ancien poste de peur qu’ils ne servent Vichy dans sa traque des opposants à son régime.
Maurice Laval devient l’agent P1 puis P2 au sein du réseau Vélite-Thermopyles des Forces françaises combattantes. Il multiplie les opérations de lutte contre l’ennemi : repérage, sabotage, plasticage, déclenchement d’une grève dans une usine de fabrication de pales d’hélices d’avions allemands.
Arrêté à Montrouge le 8 mars 1944, il est interné ensuite dans le camp de transit de Royallieu avant d’être transféré dans le camp de Neuengamme. Il est ensuite déplacé dans les camps de Gross-Rosen, de Mauthausen et de Sachsenhausen avant d’être contraint à une marche de la mort entre le 21 avril et le 5 mai 1945
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Revenu de l’enfer concentrationnaire, Maurice Laval reprend le combat politique d’abord au sein du RDR (Rassemblement démocratique révolutionnaire) puis à la SFIO (il sera un temps maire-adjoint chargé des affaires sociales à Montrouge). Il intègre ensuite le PSU (où il siège au comité politique national) qu’il quitte en février 1963 pour un retour à la SFIO. Il renouera avec le Parti socialiste en 1993.
Cette activité intense de militant à gauche se double d’une carrière d’homme de presse.
D’abord à Octobre (1946-1947), il passe à Combat avant de cofonder l’Observateur avec Claude Bourdet, Gilles Martinet, Hector de Galard et Roger Stéphane. Son poste à l’hebdomadaire l’amènera, entre autres, à connaître des démêlés judiciaires avec Maurice Papon. En 1967, il quitte le Nouvel Observateur et poursuit d’autres aventures avec les revues Trois Continents et Nouvel Adam (revue de mode) et à La Quinzaine littéraire. En 1971, il cofondera encore 50 millions de consommateurs.
Maurice Laval avait accepté de témoigner dans les établissements scolaires pendant une dizaine d’années. Il a dit ainsi (p.51) : « j’ai essayé de montrer dans les écoles que la barbarie reste à fleur de peau, qu’il faut lutter, absolument lutter contre l’antisémitisme, la xénophobie, l’islamophobie, qu’il faut être vigilant à ne pas agresser ou blesser les autres. Je ne suis pas un moraliste. Ça fait sans doute un peu cul-cul aujourd’hui, mais on doit écouter son prochain pour le comprendre. C’est le point de départ d’une société acceptable pour tous ».
Le petit ouvrage du journaliste Bruno Salaün, basé sur des entretiens avec Maurice Laval et son épouse ainsi que sur l’utilisation d’archives, se révèle d’une lecture particulièrement agréable.
Ce beau récit témoignage permet de prendre connaissance du parcours d’un grand militant de gauche, franc-maçon et hommes de lettres, dont la vie, comme l’écrit fort bien Bernard Poignant, rédacteur de la préface, inspire le plus grand respect.
Grégoire Masson