Il est des moments où l’on ressort avec plaisir des ouvrages de qualité de sa bibliothèque. Le catalogue Le blé, l’autre or des Romains, est de ceux-là.

Catalogue d’exposition

Cinq articles et un « catalogue des objets » en constitue l’ossature.

A. Ferdière offre une première contribution intitulée « L’agriculture dans le nord de la Gaule romaine. Techniques et développement ». L’auteur évoque tout d’abord les exploitations agricoles, constituées de « fermes modestes, surtout en bois et en terre, et encloses de fossés » qui côtoient « des villae « à la romaine », parfois très vastes, dans lesquelles coexistent une résidence souvent luxueuse (pars urbana) et des bâtiments et équipements d’exploitation (pars rustica) ». Les principes de la culture céréalière sont ensuite mentionnés avec le labour (assuré par l’araire), les semis, les techniques de bonification des terres (drainage et enrichissement par les engrais), la moisson (effectuée à la faucille mais également, plus exceptionnellement, chez les Rèmes et les Trévires notamment, avec un vallus, la fameuse « moissonneuse gauloise » dont une reproduction sur un bas-relief est présentée page 16) et enfin le battage puis le vannage. Les céréales sont conservées dans des greniers avec des plateformes surélevées à l’aide de poteaux et des exploitations disposent également de grands greniers ou de granges construits en dur. La farine est réalisée en fonction des besoins, le foyer disposant probablement d’un petit moulin manuel à cet effet. De grands moulins, de différents types, sont utilisés par les boulangeries ou dans le cadre de grandes exploitations rurales.

Enfin, A.Ferdière rappelle que les céréales pouvaient servir à la fabrication de la bière et que d’autres productions agricoles existaient également, telles celles des légumineuses, des plantes pour le fourrage et le textile ou encore la viticulture.

F.Boyer et P.Picavet, dans « Les meules romaines de Bavay » expliquent le principe de fonctionnement du moulin rotatif durant la période romaine, avec une meta, une meule dormante qui demeure immobile et un catillus, la meule supérieure, qui « est mise en rotation autour d’un axe pour que le grain soit moulu régulièrement et que la farine et le son soient évacués ». Suit une étude circonstanciée des catilli et metae de Bavay.

Dans « le blé et la santé sous l’Empire romain, témoignages littéraires et archéologiques », D. Gourevitch, en se basant notamment sur les témoignages d’auteurs comme Théophraste, Galien ou encore Oribase, évoque tout d’abord les qualités nutritives du blé pour les Anciens et leurs différents modes de consommation de cette céréale (la mésaventure du médecin Galien, victime d’une indigestion à la suite de l’ingestion de blé en grain bouilli à l’eau, est haute en couleur), mangée sous forme de bouillie ou de pain.

Les parasites et les maladies du blé sont ensuite mentionnés tout comme les conséquences, disette et famine, de son absence, auquel cas, écrit D.Gourevitch (p.38), « aussi paradoxal que cela puisse paraître à première vue, c’est à la campagne que la situation est la plus grave, du fait de l’annone ou des particuliers des villes prélevant largement leur part ! Aux paysans reste à manger d’abord le fourrage, puis à tuer le cochon qu’ils ne peuvent plus nourrir, enfin à se rabattre sur les plantes sauvages ».

N.Monteix, « L’art du pain dans l’Antiquité romaine », offre une description complète et intéressante de l’univers de la boulangerie dans le monde romain avec une évocation détaillée du processus de fabrication du pain (on notera la présence d’une reproduction d’un très beau relief fragmentaire, conservé au Museo civico archeologico de Bologne, figurant les différents stades de la préparation du pain : mouture, pesée, façonnage et cuisson).

I.Bollard-Raineau et A.Szabó dans « Les moules à crustulum de la Pannonie romaine au musée/site archéologique départemental à Bavay» s’intéressent donc aux crustula, « considérés comme des moules à gâteaux ». Ceux-ci, ornés, présentent des scènes variées avec des figurations de divinités, de héros, des références à l’empereur… Les deux auteurs écrivent (p.58) que « les crustula étaient confectionnés à l’occasion des cérémonies liées au culte impérial et aux fêtes officielles qui étaient accompagnées de jeux ».

Le « catalogue des objets » est particulièrement intéressant, comportant outillage (serpes, faucille…), répliques d’un joug et de la « moissonneuse des Trévires », représentations de divinités (avec, entre autres, une très belle Cérès reproduite p.74, figure 9), monnaies ou encore moules à gâteaux.

L’ouvrage est encore facilement disponible et il offre une très belle vision des problématiques liées au blé dans le monde romain. Il peut, en sus, servir de support, avec un réel intérêt, à une séance dédiée à la vie quotidienne dans le monde romain.

C Grégoire Masson