Cette dernière compilation du « dessous des cartes » regroupe 18 émissions réalisées entre 2007 et 2010 portant sur le thème de la « richesse et pauvreté des nations ». Deux parties structurent le DVD, une approche thématique (12 émissions) et une approche régionale (6 émissions). La formule est rodée et c’est sur plus de 3 heures que Jean-Christophe Victor expose les terrains, les enjeux multiformes des sujets retenus ainsi qu’une critique des sources mobilisées avec grande clarté comme à son habitude.

APPROCHE THÉMATIQUE

Le Nord et le Sud se déplacent

Il s’agit là de se repérer dans la jungle des indicateurs de mesure de la richesse : PIB, RNB, IDH…et de comprendre que si la pauvreté a reculé dans le monde, on le doit beaucoup à la croissance asiatique. De même, s’il y a de moins en moins de pauvres, il y a aussi de plus en plus de riches et de très riches, ce qui accroit mécaniquement les inégalités. Le choix méthodologique de se baser sur la projection cartographique de Peters plutôt que celle de Mercator est justifié pour que le Sud ne paraisse pas si restreint face au Nord.

Le basculement de la richesse

Difficile toujours de définir quels peuvent être les nouveaux États qui entreraient dans une catégorie de pays riches. Les BRIC font consensus grâce à leur stabilité politique et à leur potentiel de croissance mais d’autres regroupements existent : BRICS avec l’Afrique du Sud ou BASIC sans la Russie, les CIVETS…La question environnementale est pointée d’emblée sur cette émission introductive pour montrer le gros décalage entre les pays « Annexe 1 » et les pays « Hors Annexe » qui estiment légitimement que le Nord est historiquement responsables des dégradations écologiques.

Le Fonds Monétaire International

Suite à la conférence de Bretton Woods, l’idée de réguler le système monétaire mondial a vu naître le FMI qui regroupe presque la totalité des États de la planète. L’organisme prête, contrôle la politique de ses membres mais au prix d’un coût social parfois élevé comme le montrent les deux exemples retenus ici, celui de la Grèce et celui de l’Irlande.

L’Organisation Mondiale du Commerce

Basée à Genève, l’OMC régule les échanges entre ses 153 membres qui représentent 90 % des flux commerciaux mondiaux. Les subventions faussent l’équilibre Nord/Sud et servent les enjeux politiques et électoraux en ne contribuant que très peu au PIB. L’agriculture semble le point le plus délicat à réguler.

A quoi servent les fonds souverains ?

Il s’agit là de réserves publiques que l’on trouve massivement dans des pays à forte croissance, possédant du pétrole et bénéficiant de rentes minières ou encore de rentes salariales. La mauvaise réputation de ces Etats a nécessité la création d’un code de bonne conduite même si ces fonds reste d’un faible volume par rapport aux fonds privés.

Les paradis fiscaux

La notion est difficile à cerner puisqu’elle est toute relative. Anciennes zones de transit et non de production, ces territoires sont essentiellement insulaires et attirent les riches pour la faible imposition qui y règne mais aussi les organisations criminelles. Leur réduction semble effective (50 en 2000 pour 7 en 2005) mais ne se base que sur des promesses qui ne sont qu’une simple condition pour être retiré de la liste.

Mafias, une géoéconomie invisible

Les mafias se définissent par leur ancrage territorial (4 des 10 mafias mondiales sont italiennes), leur ancienneté (plus de deux siècles), une hiérarchie très pyramidale et une multiplicité des terrains d’action (racket, jeu, drogue, prostitution…). Elle naissent lors d’un vide de pouvoir et témoigne d’énormes capacités d’adaptation et de capacités à corrompre. Le secret et la seule motivation économique les différencient des mouvement terroristes qui se veulent visibles et motivés par des revendications politiques.

Terres agricoles, une autre délocalisation ?

Des États peuvent décider de s’échanger des terres, qu’elles soient proches ou non, pour faire face aux hausses de prix et aux baisses des exportations. Des émeutes de la faim peuvent émerger. Le problème est marqué lorsqu’il y a partition et spécialisation d’un territoire (cas de la Corée). Les intérêts se croisent cependant car les pays loueurs, assez peu peuplés, se font financer par les pays acquéreurs pour les équiper mais quid des exploitants locaux n’ayant pas de titre de propriété ?

Pêche : la fin de l’abondance ?

Les changements alimentaires (hausse de la consommation de poisson), l’industrialisation de la pêche et la pratique d’une pêche plus profonde sont les raisons d’une surexploitation de la ressource à laquelle s’ajoute la pêche illégale. Les convoitises des territoires marins sont nombreuses à l’image des volontés d’extension des ZEE. La solution privilégiée est l’aquaculture mais nécessite de nourrir les poissons et donc d’en pêcher d’autres massivement (cas des anchois du Pérou).

2015, les objectifs du millénaire

Il est question ici de 8 objectifs thématiques (santé, éducation, environnement…) mais foncièrement interdépendants fixés par l’ONU en 2000. Le bilan à plus de la moitié du parcours est très mitigé : les BRIC affichent quelques bons résultats mais la réduction de la pauvreté n’est le fait que de la croissance asiatique. Le rôle des États doit s’accompagner d’autres formes de soutien mais l’offre est désordonnée.

Le pic pétrolier, c’est maintenant

On le nomme « pic oil » et il se situe entre 2010 et 2050. La fourchette est large mais les énormes enjeux portant sur la ressource en pétrole expliquent les différences d’estimation entre les États et les experts. Les solutions passent par la recherche d’un pétrole offshore, d’un pétrole non conventionnel et d’un pétrole en milieu arctique, le réchauffement climatique et la fonte de la banquise facilitant le passage pour les exploitants.

L’empreinte écologique

Il s’agit là d’une mesure un peu complexe, exprimée par surface à l’aide de « l’hectare global » se déclinant à toutes les échelles. On voit très nettement que si tout le monde consommait comme les États Unis ou les Émirats Arabes Unis, une seule Terre ne serait pas suffisante…

APPROCHE RÉGIONALE

Chine, lendemains de croissance

La fulgurante croissance chinoise est à surveiller dans les années à venir car l’évolution de la structure par âge (hausse des plus jeunes et des plus âgés) sera une explication de sa fragilisation. Le poids des traditions familiales (prise en charge des enfants, des parents et des grands-parents) risque d’amener une population qui deviendra vieille avant d’être riche.

Que fait la Chine en Afrique ?

La Chine est très présente en Afrique (voyages officiels notamment) pour des enjeux commerciaux (mais les échanges africains ne représentent que 3 % des échanges avec la Chine) mais surtout diplomatiques (pour s’afficher contre les États Unis et contre le Japon). Cette stratégie est critiquable car la Chine soutient les régimes dictatoriaux et corrompus, fournissant même des armes à certains de ces États.

Russie, moyenne puissance

Les États satellites de la Russie se sont tournés vers l’Union Européenne et l’OTAN vus comme des rivaux. Les relations sont moins tendues avec la Chine avec qui la Russie trouve des intérêts communs (exploitation de certaines ressources aux abords de la frontière). Le grand enjeu d’avenir passe par la contrôle de la zone arctique revendiquée aussi par le Danemark et le Canada.

Retours d’Afrique

Il s’agit là d’un bilan mitigé du NEPAD (nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique). La vision des choses en cinq grandes zones régionales et non en États a permis quelques réalisations concluantes mais les financements ont été faibles et la société civile peu impliquée.

Nigéria, état riche pays pauvre

C’est un exemple marqué d’écart entre les forts revenus générés par le pétrole et l’absence d’investissement dans le développement même du pays. Corruption et enlèvements sont légion et pourtant les investissements se maintiennent comme si Shell ou Total avaient plus de poids que l’ONU.

Mondialisation culturelle dans le Golfe Persique

Ces États préparent l’ère de l’après-pétrole en proposant des projets à la fois originaux et démesurés. La concurrence est forte entre la construction de tours, l’ouverture de musées, l’implantation d’universités (dont la Sorbonne)…Des photos de ces projets, au sol ou aériennes, amènent un peu de fraicheur dans l’analyse.