Médiapart et la Revue Dessinée ont compilé des articles de différents auteurs dans ce numéro spécial sur le monde merveilleux d’Amazon.

La « galaxie Amazon » présente l’entreprise comme l’hydre de Lerne, un empire économique mondial. Créée en 1994, la petite librairie en ligne est devenue la plus importante des multinationales classées parmi les GAFAM. Ses superprofits gagnés grâce à l’optimisation fiscale (ne pas payer d’impôt mais réclamer des financements publics) permettent au boss Jeff Bezos d’effectuer son premier vol spatial… L’entreprise investit dans de multiples domaines : le numérique, les médias, le streaming, le cinéma, la presse sous la menace des lois antitrust américaines… qui ne sont pas votées. Le lobbying intensif tente de faire échouer les projets limitatifs. Le bilan carbone est désastreux en dépit d’une communication qui se verdit. Amazon a mis en place un redoutable outil d’incitation à la consommation.

L’arbre qui cache la forêt montre la volonté du patron d’Amazon de planter des arbres pour sauver le climat. Le géant du e-commerce crée des fonds pour la restauration et la conservation des forêts afin d’absorber les émissions de CO2.

L’article, « Chair à carton » raconte l’affaire baptisée la « pause-pipi-gate ». Au printemps 2021, un élu du Wisconsin s’attaque à Amazon. Il proclame que les employés, pressurisés par les rythmes infernaux, sont obligés d’uriner dans des bouteilles d’eau. Si l’entreprise annonce que 8 salariés sur 10 sont satisfaits selon un sondage, une plongée dans les entrepôts montrent une autre réalité : limitation du droit de grève et de l’appartenance à un syndicat, le recours massif à l’intérim et la difficulté d’obtenir des CDI, toujours les rythmes et le fantôme des quotas de productivité (en une heure, il faut scanner et ranger 250 articles, ne pas trop parler à des collègues), les accidents du travail et les douleurs dues à des gestes répétitifs. Travailler doit paraître cool. Un martelage de storytelling bien huilé impose un niveau de contrôle sur l’ambiance imposée sur le lieu de travail : Work hard, have fun et make history. Depuis 2017, les représentants du personnel de la CGT multiplient les procès pour des faits de discrimination syndicale et de licenciement abusif. Les prescriptions du médecin du travail ne sont pas respectées non plus.

On parle de sacrifiés du Covid pour les employés de l’entreprise. Les entrepôts français ont fermé en avril 2020 pour un mois sous la contrainte d’une condamnation judiciaire. Cet épisode signe le dénouement d’une saga de plusieurs semaines passées à ignorer les craintes des salariés quant à leur santé alors que les commandes affluent, les recettes flambent et les cours des actions s’envolent. Amazon joue sur la notion de « produits essentiels ». Dans certaines unités, ni lunettes ni gants, ni masques de protection, même le gel hydroalcoolique manque.

Quant à la fortune de l’homme le plus riche du monde, elle est passée en 6 mois de 115 à 200 milliards de dollars !!!

En fin de revue, la bataille du livre montre les tentatives d’Amazon de s’attaquer à l’exception culturelle française qui est de fixer un prix unique au livre arrivé sur le marché dans le but de protéger le réseau des libraires indépendants. Il ne s’agit pas non plus d’offrir la gratuité des frais d’envoi et de faire des remises de plus de 5%.

Cette édition spéciale de la Revue dessinée montre à quel point le géant du e-commerce cherche à s’infiltrer dans tous les interstices de la vente en ligne.