Chiara Frugoni est historienne, auteure notamment d’un livre « François d’Assise : la vie d’un homme ». Le livre présenté ici date de 2001. Elle choisit d’aborder le Moyen-Age sous un angle qui pourrait sembler anecdotique, car il s’agit des objets en général. Son optique et son but, c’est de montrer ce que l’on doit au Moyen Age dans le quotidien. Si on le souhaite, un index des sujets est proposé à la fin du livre. Une cinquantaine de pages de notes complète le livre ainsi qu’une bibliographie.

Un ton léger et personnel

Chiara Frugoni choisit clairement un récit fluide où elle n’hésite pas à glisser des petites remarques personnelles. Cela n’est pas au détriment de la qualité ou de l’intérêt des informations, même si on peut constater que trente pages sont consacrées uniquement aux lunettes. Elle retrace notamment les différentes pistes pour savoir qui en était à l’origine et elle souligne également les évolutions techniques connues par les lunettes avec notamment l’invention des branches. Pour les autres objets, les articles sont plus courts. L’éventail proposé est très large car on va de la fourchette jusqu’à des fêtes comme le Carnaval.

Lire, écrire et compter : les bases

Le Moyen Age a légué des inventions décisives. En effet, bien avant Gutenberg il y eut d’autres techniques pour le livre. Elle retrace ce qui se passait pour les étudiants. On créait un exemplar, c’est-à-dire un livre de cours de référence, et ensuite chaque page était recopiée. Les copies se sont alors multipliées à une vitesse incroyable pour l’époque. C’est aussi à ce moment là que des innovations, qui semblent évidentes aujourd’hui sont apparues : il s’agit à cet égard de la ponctuation, des accents ou de l’apostrophe. Les chiffres arabes provoquent une véritable révolution. En effet, à présent, un chiffre prend une valeur différente selon sa place. Il faut aussi évoquer la façon d’envisager le temps. Longtemps, il ne fut pas utile par exemple de savoir le temps précisément, à tel point que la deuxième aiguille n’apparut qu’en 1577.

«La petite histoire »

Il s’agit là d’objets plus quotidiens et par exemple ceux liés aux habits. Le bouton fut d’abord vendu par les joailliers avant de se répandre. Chiara aborde également le cas des manches et elle insiste sur leur caractère amovible. Par ce qui pourrait sembler anecdotique, on peut envisager des idées beaucoup plus larges. Ainsi en est-il de la fourchette. L’auteur souligne que le fait de manger avec ses mains révélait un autre sens de la communauté. Lorsque l’instrument se fait individuel, l’individu apparaît aussi peut-être.

Une iconographie de qualité

C’est indéniablement une force, si ce n’est la force, de ce livre. L’auteure a puisé dans plusieurs fonds. On trouve des miniatures, des tableaux avec parfois quelques flashs pour mieux cerner. Il s’agit de documents italiens ou français. Ils sont généralement commentés en détail ce qui peut faciliter leur utilisation en cours par exemple. Beaucoup ne font pas partie des « déjà vus », ce qui est très agréable.

Des témoignages d’époque pour découvrir le quotidien

Chiara Frugoni ne se sert pas uniquement des images pour traquer le Moyen Age. Elle s’appuie également sur des textes d’époque pour y déceler, selon les cas, la mention d’une invention essentielle comme le moulin. Ici, elle convoque Saint Bernard qui dit tout en peu de phrases sur les bénéfices que l’on peut tirer de l’eau : « le fleuve pénêtre à l’intérieur du monastère…il passe d’abord à travers le moulin à grains,…on le fait passer dans des machines de foulage…puis il entre dans la tannerie… » Elle utilise aussi Bernardin de Sienne qui se livre à une comparaison entre jeux de cartes et messe où ceux-ci sont présentés au total comme « une messe du diable ». Dante est aussi cité pour évoquer la notion de temps et les horloges.

Au total, l’ouvrage se lit très agréablement. Il est un peu cher peut-être, mais donne à voir un Moyen Age qui semble plus proche par cet angle quotidien.

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