Au XIIIe et au XIVe siècle, trois géographes arabes ont consacré une part de leurs dictionnaires aux territoires africains.
Les articles regroupés dans cet ouvrage concernent le Maghreb, la Libye, l’Afrique occidentale et orientale. L’Égypte a été traitée par ailleurs. Ce vaste corpus, comptant plus de 800 articles, a été réuni jadis par Jacques Thiry (Université libre de Bruxelles) qui avait entrepris de l’étudier avant son décès en 2012.
Deux de ses anciens étudiants décident de lui rendre un chaleureux hommage, en prolongeant son travail dans cette publication de la bibliothèque historique des pays d’islam. Ils ont eu le souci de satisfaire un public de non-spécialistes, simplement curieux de l’Afrique médiévale.
Une description réaliste, vivante et ethnographique
Les écrits de trois grands géographes arabes (Yāqūt ibn ʿAbd Allāh al-Rūmī al- Ḥamawī (1179-1229), Al-Qazwini (mort en 1283), et Muḥammad Ibn ʿAbd al-Munʿim al-Ḥimyarī (actif au XIVe siècle) ont été réunis dans ce volume. Ils ont participé à la construction du savoir concernant l’Afrique tout en privilégiant les activités humaines ou des faits jugés historiques, plutôt situés dans le Maghreb, dans les régions supposées utiles par les auteurs anciens.
Une société ouverte sur les mondes lointains
Fournissant une quantité de détails historiques, géographiques ou économiques, ce dictionnaire comprend un nombre important d’articles comprenant des d’anecdotes, des descriptions de lieux, telles des cartes ou des plans qui accroissaient l’horizon des lecteurs contemporains tout comme ils élargissent aujourd’hui le nôtre.
Prenons comme exemple, l’article sur Carthage, précis et éloquent. Troisième site de l’Ifriqiya, Carthage semble être la ville la plus connue de l’époque, détruite pourtant par les combattants de l’Islam. Les différents monuments sont présentés très précisément (l’aqueduc est considéré comme remarquable), ainsi que les événements connus de ces auteurs anciens, la lutte des Rum (les Romains) contre le tyran Hannibal, ou un certain recul sur notamment les pratiques de sacrifices d’enfants sur les autels, lors des guerres puniques : « il est étrange que les gens s’abandonnent ainsi aux démons ».
Le dictionnaire s’achève sur un glossaire, une abondante bibliographie, des index géographique, historique, des animaux mais aussi des matières et des produits commerciaux, un ensemble bien utile pour se repérer.
Ce volume permet de relire les grands épisodes de l’histoire du Maghreb et de découvrir de nombreuses précisions ethnographiques. Le lecteur voyage de Fès vers le fleuve Niger, d’Alger au Seigneur des fleuves, le Nil si largement évoqué avec les crues mais aussi les animaux, le poisson torpille, le crocodile à 60 dents et son ennemi la loutre…
« Parmi les merveilles du monde, se trouve le Nil d’Égypte, le célèbre fleuve à propos duquel les histoires, des poèmes et des faits historiques sont rapportés. On prétend que son origine se situe dans les montagnes de la Lune, dans le pays des Zang… jusqu’à se déverser dans la Méditerranée. Tous les territoires égyptiens en tirent leur eau sans qu’aucun autre fleuve n’y coule, selon mon opinion, mais Allah est plus savant ! ».
Le dictionnaire s’achève sur un glossaire, une abondante bibliographie, des index géographique, historique, des animaux mais aussi des matières et des produits commerciaux, un ensemble bien utile pour se repérer.
Cet ouvrage s’adresse aux africanistes, aux spécialistes du monde musulman, aux historiens médiévistes et à un vaste public curieux mais très averti sur le sujet.