Si l’intérêt procuré par les cartes est vivace dans l’imaginaire enfantin, la question de l’enseignement cartographique reste en revanche un vrai problème. Bien souvent, les élèves sont confrontés à des lectures de cartes déjà réalisées et lorsqu’il y a activité, celle-ci se limite souvent au coloriage de figurés zonaux. Le peu d’accès à des documents couleur est également très handicapant.
Cet ouvrage de rentrée rédigé par Christine Leconte, architecte-urbaniste en région parisienne, affiche de grandes ambitions (puisque « destiné aux enfants pour savoir lire une carte et comprendre comment se forme le paysage, naturellement ou du fait de l’activité humaine ») et pourrait bien aider à remplir cette mission en amenant de solides réponses théoriques et méthodologiques sur le sujet.
Présenté sous la forme d’un cahier d’activités directement utilisable par l’enfant, le livre s’arrête sur la définition et l’historique de la carte (citant Hérodote, Marco Polo, Cassini et Vidal de la Blache mais aussi en reproduisant des cartes historiques comme des cartes royales), ses éléments constitutifs (avec une page spécifique pour la légende, une pour l’échelle, une pour l’orientation) ou encore les différentes utilisations de la carte (pour se repérer, pour comparer des évolutions, pour identifier des composants paysagers via la très importante étape des vues aériennes).
Des entrées plus originales encore évoquent la toponymie (avec une initiation à la langue bretonne !), le modèle pavillonnaire (où il faut se sortir d’un labyrinthe de maisons identiques) ou la skyline des villes (où il convient de relier des points pour voir apparaître le profil de Paris). Même le petit quizz final, pourtant une page « facile » et incontournable dans ce genre d’ouvrage, est bien ficelé, proposant des réponses alternatives fausses pas trop éloignées de la bonne, demandant à la réflexion de l’enfant d’être suffisamment aiguisée.
Côté réalisation, le soin et la qualité sont également au rendez-vous tant dans la mise en page que dans les reproductions couleurs des cartes et des photographies aériennes. Le dessin, ici joliment signé par Gala Vanson, est un pari assez osé qui prend son sens dans de nombreux cas mais qui interpelle tout de même lorsque les consignes demandent d’associer des lieux à des photos…qui justement n’en sont pas (seules les vues aériennes verticales ici reproduites sont de vraies photos).
Cette remarque s’associe à quelques autres comme le fait que, parfois, certaines consignes manquent d’un peu de précision (p 2-3 : « place les noms des pays suivants » sur une planisphère où les continents ne sont pas subdivisés en pays », p 6 « dessine où tu veux les éléments du paysage du bassin d’Arcachon légendés dans la carte alors que celle-ci est déjà presque complète »). Auraient pu également être présents une petite introduction et un sommaire (où l’on aurait vu qu’il aurait peut-être été intéressant de placer le travail sur les vues aériennes obliques avant celui sur les vues aériennes verticales pour montrer la prise de hauteur mais ici les deux activités apparaissent indépendantes).
Ceci étant, ce livret apparaît être une réussite et même un véritable « ovni éditorial » puisque ni un manuel, ni un album, ni un fichier d’exercices de systématisation…mais un réel support méthodologique complet pour maitriser la construction de cet outil essentiel de la compréhension de l’espace qu’est la carte.
S’il pourra trouver sa place dans les foyers pour les amateurs et les passionnés, il serait très important qu’il la trouve surtout dans les classes, d’autant que les programmes à venir insistent bien sur ce besoin de « pratiquer différents langages » mais surtout de les « concevoir, créer, réaliser ». Dans ce cadre, l’adéquation idéale pourrait se réaliser, souhaitons-le !