Après avoir été professeur des écoles et avoir enseigné en maternelle et en primaire, Nancy Guilbert se consacre à l’écriture d’ouvrage pour la jeunesse. Elle a publié chez Oskar éditeur Ma liberté tout en couleurs (avec Sylvie Baussier) et signe aujourd’hui un très beau roman qu’il n’est pas nécessaire d’être adolescent pour lire avec plaisir. La mention « de 11 à 111 ans » qui figure sur la 4e de couverture est tout à fait justifiée. Bien que l’âge de 13 ans conviendrait sans doute mieux pour aborder ce livre.

En 1959, Louise, 15 ans, vivant seule avec sa mère, reçoit une lettre d’un jeune Allemand qu’elle ne connaît pas mais qui semble la connaître. Et qui de toute évidence connaît des choses sur sa famille qu’elle ne connaît ni ne comprend et qui s’étonne qu’on ne les lui ait pas apprises. Il lui faut donc interroger sa mère, une mère qui ne l’aime pas, ne l’a jamais aimée et supporte difficilement de la regarder, voyant sur son visage « le sourire du diable ». La question de Louise déclenche une très violente réaction de sa mère, un geste insupportable. Incapable de répondre à sa fille, elle lui confie le journal intime qu’elle a rédigé quand elle avait 17ans, en 1943, à Fontainebleau. Le monde de Louise s’écroule à la lecture de ce journal.

Le roman est construit en huit parties qui font s’enchevêtrer des récits, des extraits de journaux intimes et des correspondances. L’action se déroule à trois époques différentes, en 1943, en 1959-1960 et en 1989. Elle met en scène trois générations : celle de Louise et de son correspondant allemand, celle de la mère de Louise et de ses amis qui furent des résistants à Fontainebleau en 1943, celle de la fille de Louise qui en 1989 est conduite à interroger sa mère sur sa grand-mère qu’elle ne connaît pas. La terrible histoire de la mère de Louise est un secret que sa fille et sa petite fille vont découvrir ce qui les conduira à comprendre pourquoi elle a eu tant de mal à vivre et à aimer.

Le sourire du diable est un très beau roman, bien écrit, finement construit, passionnant. L’émotion submerge le lecteur, même adulte. Un excellent moyen de faire découvrir le plaisir de lire à des jeunes qui auraient tendance à ne pas lire volontiers. Un plaisir garanti pour celui qui aime lire.

© Joël Drogland pour les Clionautes