CR de Catherine DIDIER – FEVRE, professeure au collège du Gâtinais en Bourgogne à Saint Valérien.

Le concept de territoire a le vent en poupe. Nombreux ont été les candidats à la présidentielle 2007 à avoir promis d’ancrer leur politique nationale à l’échelle locale dans « les territoires ». Médiatisée, la notion a perdu de sa clarté. Antoine Moine propose de revenir dans un premier temps sur la notion géographique et son articulation avec celles de lieux, d’espace géographique et d’acteurs ; puis, il développe des études de cas qui ont pour cadre des territoires de projet ou des territoires liés au sport.

Alexandre Moine est professeur de géographie à l’Université de Franche Comté et directeur du CERSOT (centre d’étude et de recherche sur le sport et l’observation des territoires, laboratoire THéMa UMR 6049 CNRS). Il est par ailleurs directeur scientifique adjoint du FIG (2007). Spécialiste des espaces frontaliers, il a participé à l’Atlas de France, Territoire et aménagement, volume 14. Reclus, 2001.

Un concept mis en avant

Le territoire est un concept ayant une complexité structurelle en raison du grand nombre de composants qu’il englobe et des interactions qui existent entre eux. La notion de territoire a été convoquée dès les années 1960 – 1970 dans le cadre de la logique d’aménagement propre de la France, même si la centralisation de cette politique a eu tendance à déconnecter celle-ci du territoire. En revanche, la décentralisation (1982) et surtout la LOADDT de 1999 (Loi d’Orientation, d’Aménagement et de Développement Durable du Territoire) reconnaissent aux acteurs avec les territoires de projet le rôle d’aménageurs.

Un système complexe

Généralisé, le concept de territoire devient polysémique. La tendance générale est de confondre territoire et espace alors que le territoire s’en distingue en étant un espace approprié par des acteurs (espace social – espace vécu). C’est dans le premier chapitre (très technique) que Alexandre Moine décortique les notions de système. L’ouvrage est d’ailleurs préfacé par François Durand – Dastès, qui a lui aussi travaillé dans les années 1970 sur les applications géographiques de la réflexion systémique (cf. La notion de système et la circulation atmosphérique, BAGF N°56, 1979). La notion de système est essentielle pour comprendre celle de territoire. Le territoire est avant tout un système basé sur 3 sous-systèmes (celui de l’espace géographique, celui des acteurs et celui des représentations). Un territoire est donc issu d’une construction lente et complexe. On ne peut pas le fabriquer mais on peut essayer d’orienter sa transformation et aider à l’émergence de nouvelles identités.
Alexandre Moine propose comme définition au terme de territoire : « c’est un système complexe dont la dynamique résulte de boucles de rétroaction qui lient un ensemble d’acteurs et l’espace géographique qu’ils utilisent, aménagent et gèrent. »

Méthode d’analyse du système

Pour comprendre le système complexe qu’est le territoire, il est nécessaire de posséder une méthode, celle des 5 questions : où ? qui ? quoi ? pourquoi ? quel processus ? Il faut décomposer les données spatiales complexes en données plus simples, sans oublier celles liées à la présence des acteurs. Le territoire est un système ouvert, en interrelation et en interdépendance avec les territoires dans lesquels il est inséré ou intégré. Ce système est en constante évolution. C’est pourquoi il est important de ne pas négliger l’aspect historique de la constitution des territoires.

Etudes de cas

Pour appuyer sa démonstration, l’auteur expose l’exemple du territoire transfrontalier horloger franco-suisse sur lequel il a précédemment publié dans Images de la Franche Comté, N°28, 2003 ; L’Information Géographique, N°67, 2003 et Mappemonde, N°69, 2003. C’est un exemple de territoire de projet.
Les territoires du sport constituent le second développement que consacre Alexandre Moine. Il montre que cette géographie est le résultat à la fois de volontés politiques et associatives à différentes échelles. L’ensemble manque souvent de cohérence tant au niveau des besoins que de l’offre. C’est pourquoi, afin de faciliter la prise de décision, depuis 3 ans avec une douzaine de personnes, il travaille à la mise en place d’un observatoire des territoires du sport dans le Jura (SIT : systèmes d’information territoriaux). Il explique ici la méthode de mise en œuvre et montre, avec l’exemple de l’étude de l’opportunité ou non de la construction d’une nouvelle piscine à Dôle, l’intérêt de l’observatoire. L’idée qui prévaut est celle que cet outil doit être approprié par les acteurs si on veut qu’il serve à quelque chose. Les acteurs doivent être prêts à le remettre à jour et à partager des données, y compris, stratégiques.

Si la lecture de ce volume n’est pas d’un abord très facile, force est de constater au fil des pages que Alexandre Moine est convaincant. Il alimente sa démonstration de lumineux schémas synthétiques qui permettent de comprendre en un coup d’œil l’essentiel des éléments du système étudié. La lecture du chapitre 4 (exemple du pays horloger) est à conseiller aux préparationnaires aux concours s’ils veulent pouvoir développer un exemple concret de pays et tout en montrant les limites du modèle. Ils pourront par ailleurs relever les croquis qui illustrent le propos et résument l’essentiel des enjeux. Cet exemple pourra, par ailleurs, servir comme étude de cas aux professeurs enseignants dans les classes de première.

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