Tout enseignant d’histoire confronté à la baisse du niveau des connaissances de ses étudiants de première ou de seconde année, ne pourra que saluer cet ouvrage parfaitement adapté à une mise à niveau rapide sur des notions et des concepts qui paraissant parfois bien éloignés de ceux qui prétendent à des études d’histoire.
Bien entendu, il est illusoire de prétendre faire le tour du XIXe siècle européen en cent fiches mais la maîtrise de leur contenu devrait sans doute permettre à tout étudiant qui se donnerait la peine de lire les 255 pages de cet usuel de répondre à la plupart des questions qui lui seraient posées dans le cadre de ses examens.
Organisé en cinq parties de taille inégale, l’ouvrage de Yannick Ripa, maître de Conférences à Paris VIII couvre l’ensemble de la période et des centres d’intérêts. Si les régimes politiques ou les doctrines sont largement traitées, ainsi que l’économie, ce qui n’est pas étonnant, les parties consacrées aux peuples sont tout à fait utiles, avec des fiches bienvenues sur la Franc-maçonnerie ou la philanthropie. On lira par exemple avec intérêt la partie sur le religieux, les savoirs et les arts avec des notices sur la psychanalyse ou le scientisme et le positivisme.
L’intérêt de l’ouvrage est d’associer avec beaucoup de bonheur une fiche de synthèse qui ne dépasse que rarement une page et des documents illustrant la notion. Même les fiches sur les écoles artistiques, impressionnisme ou romantisme par exemple sont illustrées, (en noir et blanc c’est dommage !) d’une reproduction du tableau. On voit bien l’intérêt de la démarche. Même si parfois les choix dont difficiles. Sur la fiche « Marxisme » par exemple, il n’aurait pas été inutile aux côtés de quelques lignes du Manifeste, d’opposer un texte de détracteur. Bakounine par exemple, théoricien du cité pour expliciter l’anarchisme, aurait pu fournir un écho pertinent. Bien entendu, la bibliographie de base proposée avec chaque notion expliquée complètera utilement la lecture de la notice.
Les événements majeurs sont également traités et ne se limitent pas à au cadre chronologique du calendrier. Premier janvier 1801 – 31 décembre 1899. L’auteur ouvre son ouvrage en 1815 et le termine à la veille de la guerre de 1914 ce qui est somme toute logique. C’est bien l’Europe héritée du Congrès de Vienne qui disparaît dans la Grande Guerre. Cela explique dans la série d’événements la fiche sur le Dimanche rouge de 1905 illustrée par la pétition au Tsar et un texte de Trotski.
Si les fiches sur les doctrines ou les relations internationales sont très classiques, y compris dans le choix des documents, certains concepts ne sont pas évidents à traiter. Celle sur les classes moyennes illustrée par trois documents n’a pas dû être facile à réaliser. On discutera par contre à ce propos des risques de prolétarisation qui ne se sont pas, loin s’en faut, réalisés, sauf peut-être dans les années trente. En fait, le risque était davantage dans la perception de cette prolétarisation que dans la réalité. C’est plutôt la marginalisation des prolétaires qui s’est produite avec la création d’un lumpen-prolétariat évoqué par les auteurs marxistes.
Le classement des fiches dans les parties est surprenant et impose un recours à la table des matières ou l’index. Pourquoi diable l’aliénisme (P. 217) est il précédé par le romantisme dans la partie sur des savoirs et des arts ? À moins que l’on imagine que l’un conduit immanquablement à l’autre, ce qui serait quand même excessif !
Parfaitement intéressant également dans ce manuel, l’index, très utile et qui rend l’utilisation ponctuelle de l’ouvrage très commode.
Sur la quatrième de couverture, l’éditeur évoque l’utilisation de ce livre comme un manuel destiné aux étudiants de tous niveaux. C’est sans doute un excès de modestie. Cet usuel très bien fait peut-être aussi un auxiliaire précieux pour les enseignants du secondaire qui peuvent trouver dans leur labo une place à cet ouvrage qui demeure un excellent aide mémoire permettant de disposer de connaissances précises sur des concepts qui sont tout de même abordés au lycée. Par ailleurs, le livre est d’un prix très accessible, (19 €) ce qui ne gâte rien.
On se prend à espérer que l’éditeur aura la bonne idée de poursuivre l’expérience, sur le XXe siècle mais aussi pourquoi pas sur le siècle des Lumières ou encore sur le XIIIe siècle. Sur le fond, on n’a pas le droit d’espérer trouver dans cet ouvrage des innovations majeures dans le traitement des sujets, mais simplement, et c’est déjà beaucoup, un véritable usuel, un outil commode destiné à trouver un large public.
© Clionautes – Bruno Modica