Contacté par l’attachée de presse de cette maison d’édition qui publie des premiers romans, j’ai eu entre les mains cet ouvrage qui se présente comme un thriller, terme difficilement traduisible qui doit peut-être signifier : « roman policier à suspense faisant référence à l’actualité ». L’attachée de presse m’a sans doute contacté en référence à la trame historique qui inspire ce polar. Je le confesse, j’ai une certaine appétence pour le genre, souvent dépaysant mais dont les codes connus apparaissent plutôt rassurants.

De ce point de vue cette histoire de « cendres froides », répond tout à fait à la commande. Une mise en situation précise et minutieuse une construction de l’intrigue, avec des retours en arrière dans le passé, (dire flash-back pour faire branché !) et nous voici entraînés dans cette histoire jusqu’au dénouement final. Il faut le dire, Valentin Musso a une sacrée plume.

Son roman se déroule à partir d’une enquête familiale qui révèle un passé sulfureux, celui de ces Lebensborn, ces maternités nazies accueillant des femmes enceintes de membres de la SS et chargées de régénérer la race aryenne. Ces maternités ont été ouvertes dès 1936, par Heinrich Himmler lui-même. Le service du lebensborn était sous la direction du général SS Sollmann. Une dizaine d’établissements ont été créés en Allemagne avant la guerre (8 000 enfants y naîtront).

Les Nazis très motivés pour la race aryenne de type nordique, version grands, blonds aux yeux bleus, type dolicocéphale, les amène à ouvrir ce type d’établissements en Norvège notamment. Dans le roman de Valentin Musso il est fait référence, pour la France à l’institution de Lamorlaye près de Chantilly. Le narrateur, le jeune Aurélien, plutôt misanthrope et qui semble avoir du mal à supporter l’absence de son père et la fragilité de sa sœur, se retrouve malgré lui engagé dans une enquête qui l’amène à rencontrer Héloïse, une thésarde en histoire contemporaine. Au fur et à mesure, les deux jeunes gens démontent tout le non-dit qui pouvait exister dans les campagnes françaises autour de ces « maternités d’un genre particulier ». Héloïse Tournier, fille de vignerons bourguignon, ce qui me la rend à priori sympathique, pratique la technique de l’enquête orale, recueillant les témoignages des personnes qui ont connu cette période et elle les confronte à différentes sources documentaires, notamment un film en 9,5 mm, un format qui a effectivement existé dans les années 40.
Pour les thrillers on imagine bien un complot sur fond d’anciens criminels de guerre nazis ayant échappé à Nuremberg, une mystérieuse organisation d’extrême droite visant rien de moins que la domination du monde, infiltrée au plus haut sommet de l’État. On connaît le genre, et les maîtres américains remplissent les présentoirs des libraires .

Mais justement, ce n’est pas aussi simple, et on se gardera bien de donner le moindre indice quant à la chute de cette histoire étonnante. Ce qui est sûr en tout cas, surtout lorsque l’on est familier de ces polars sur trame historique, c’est que l’on a envie de savoir la fin et que l’on a du mal à lâcher ce roman.

Bref, une réussite incontestable et même si la trame historique aurait mérité d’être un peu plus dense, ne boudons pas notre plaisir !

© Bruno Modica