La photographie offre une trace des paysages, de leur évolution et, dans le contexte du changement climatique, un outil de connaissance. L’ouvrage propose une collection de photographies, œuvres artistiques ou scientifiques classées du point de vue chronologique, de l’ensemble du massif alpin du Kitzteinhorn Glestcher en Autriche au Glacier du Clôt des Cavales, en Oisans. La première période de 1846 à 1868 correspond aux débuts de la photographie de montagne, la seconde propose des œuvres beaucoup plus récentes et plus artistiques.

L’introduction présente les principaux photographes du XIXe siècle, des premiers daguerréotypes de Girault de Prangey, Jean Gustave Dardel ou John Hobbs et ceux du XXIe siècle comme Georg Aerni, Laurence Piaget-Dubuis ou Douglas Mandry.

La magnificence 1845-1865

Nous sommes à la fin du « Petit Age Glaciaire », les glaciers ont atteint leur plus grande extension jusqu’au fond des vallées. Les photographies ont alors une valeur d’archives. Elles marquent, avec les premières études de la Société Helvétique des sciences en 1874, le début du recul glaciaire et montrent les premières infrastructures touristiques.

L’auteur rappelle les débuts de la photographie et de la science des glaciers, études de terrain dans les Alpes(Théorie des Glaciers de Savoie, Chanoine Rendu, Chambéry,Puthod, 1840, mais aussi au Groenland.

La seconde moitié du XIXe siècle est marquée par les débuts du tourisme en montagneCréation en 1857 de l’Alpine club.

À cette époque, deux formes de représentations s’opposent et se complètent : le dessin et la photographie. L’auteur présente l’œuvre de Ruskin, peintre et critique d’art britannique, la Mer de glace (p. 28-29) et celle de Giraud de Prangey (p. 35). À partir de 1850, les premiers panoramas photographiques apportent une nouvelle esthétique. Les photographies reproduites, certaines peu connues, constituent des repères temporels. Les panoramas d’Aimé Civiale se voulaient au service de la science.

De courts chapitres présentent chacun un photographe : Ciciale, les frères Bisson.

À noter la très intéressante vue de la Mer de glace en 1858. (p. 51)

La Détresse

Le titre de cette seconde partie dit le sens des œuvres présentées. Il s’agit ici d’une analyse d’art plus que d’une réflexion scientifique sur les effets du changement climatique. Chaque chapitre est consacré à un photographe.

Walter Niedermayr dénonce les usages touristiques de la montagne et les installations qui défigurent les paysages.

Georg Aerni et Nicolas Crispi illustre la notion d’anthropocène et se veulent témoins de la modification des paysages glaciaires.

Matthieu Gafsou, dans son ouvrage Alpes, publié en 2012 propose des paysages entre émotion et dérision qui témoignent d’une histoire (p. 84), le glacier comme spectacle (p.85).

Aurore Bagarry, dans son Inventaire des glaciers du Mont Blanc, met en lumière les espaces libérés par le recul des glaciers : roches striées, ruptures de langue glaciaire ; des photographies sans présence humaine.

Laurence Piaget-Dubuis et Ester Vonplon ont choisi d’illustrer la lutte, un peu dérisoire, avec les bâches déposées sur le glacier du Rhône, pour en limiter la fonte.

Jacques Pugin veut dépasser les limites de la photographie avec des images réalisée avec un drone, à la recherche de vues presque fantastiques, au plus près des séracs.

Laurence Bonvin propose sa vision du glacier d’Aletsch.

La série Monuments de Douglas Mandry est une expression graphique complexe née de la confrontation de cartes postales anciennes avec le glacier d’aujourd’hui. Une œuvre que l’auteur qualifie « d’art conceptuel et post-photographie ».

Olivier de Sépibus entraîne le lecteur dans le Massif des Écrins et Thomas Bouvier, dans le Val Ferret. Ils expriment leur perception d’une « montagne défaite », comparaison des images mémorisées et actuelles du paysage, mettant en évidence l’empreinte laissée par les glaciers.

Les glaciers : éléments de géomorphologie

Une courte annexe scientifique d’Emmanuel Reynard.

 

Un ouvrage difficile à classer … science ? art ? mais qui a le mérite de proposer des images de la transformation des paysages alpins par le changement climatique.