Synthèse sur les peuples et cités gauloises.
Vivifiée par les nombreux acquis récents de la recherche archéologique, l’historiographie gauloise s’est enrichie, ces dernières années, d’un solide bouquet d’études de référence. Spécialiste des oppida celtiques, Stephan Fichtl, professeur d’archéologie à l’Université François-Rabelais de Tours, est l’un des auteurs qui contribuent à cet effort scientifique. Dans ce nouvel écrit, il examine avec autant de rigueur que de clarté l’état des connaissances et des hypothèses sur le découpage territorial et l’organisation politique et administrative des cités gauloises avant la conquête césarienne.

Une leçon de méthode

Longtemps dominante, la vision «Lavissienne» des ancêtres de la France a été largement déconstruite en l’espace de deux décennies, en particulier grâce aux acquis d’une archéologie de terrain particulièrement féconde. L’occupation et l’organisation de l’espace figurent en bonne place parmi les nombreuses certitudes révisées. A quelle compréhension de la territorialisation des peuples gaulois, de leur organisation politique et spatiale et de leurs rapports mutuels est-on parvenu aujourd’hui ?

Sur ces enjeux, Stephan Fichtl croise avec une maîtrise parfaite les données archéologiques disponibles, les peu nombreuses sources littéraires antiques subsistantes, les interprétations de la recherche ancienne et récente, avec les indices issus de la toponymie et les acquis de la numismatique et de la céramologie. Il les confronte aussi à l’étude régressive des limites administrative et religieuses postérieures ainsi qu’à l’analyse cartographique de l’espace permise par l’application de la méthode théorique des polygones de Thiessen.

Le tour d’horizon ainsi effectué ne laisse rien à désirer et démontre le caractère abouti du « modèle gaulois de la cité », en dépit des incertitudes factuelles inhérentes à l’état lacunaire des sources. Un point solide est fait sur ce que l’on sait ou suppose des limites géographiques des civitates, de leur organisation spatiale et administrative, et des fonctions de commandement imparties aux oppida et aux sanctuaires. Les relations hiérarchisées établies entre les peuples celtes durant l’ère laténienne (empires, alliances et clientèles) et les structures interceltiques sont envisagées avec la même rigueur d’approche. L’auteur sonde également la datation et les mécanismes d’apparition du modèle de de la cité en Gaule, marqués par des décalages chronologiques et régionaux.

Enfin, ce tableau d’ensemble est complété par un répertoire récapitulatif des différents peuples gaulois, classés par ensembles géographiques. Chaque entrée rassemble sous forme monographique ce que l’on connaît des origines, de l’emprise territoriale, de l’organisation politique et des allégeances du groupe humain considéré. La facilité de consultation de ce petit dictionnaire des peuples gaulois en fait une ressource très appréciable.

Une synthèse riche et réussie

Au plaisir de lecture assuré par la clarté de la démarche méthodologique et la solidité de l’érudition scientifique, s’ajoute l’agrément de la maquette : la démonstration s’appuie sur une splendide iconographie en couleur, associant un appareil cartographique magistral à un abondant ensemble de vues photographiques des principaux sites mentionnés. La qualité de ces images s’ajoute à l’absence de la moindre coquille -atout de plus en plus rare dans la production actuelle- pour souligner la qualité irréprochable du travail d’édition accompli.

Sur le fond comme dans la forme, voilà donc un volume qui mérite tous les éloges. Étudiants, enseignants et archéologues ne pourront que se réjouir de disposer désormais d’un tel outil de documentation. Cette belle synthèse de Stephan Fichtl s’inscrit ainsi, dès à présent, parmi les références nécessaires à l’histoire gauloise.

© Guillaume Lévêque