Déjà forte de plus de 300 titres dans des domaines variés, la collection est bien connue. De petit format et de petite pagination, chaque ouvrage affirme ses ambitions sur la quatrième de couverture : « Comprendre les questions les plus diverses présentées par les meilleurs spécialistes. Des textes clairs, fiables et précis qui vont à l’essentiel (…) Une présentation agréable pour faciliter la lecture. »

La barre est donc placée très haut : présenter la Résistance intérieure en une cinquantaine de petites pages en se pliant à des exigences éditoriales de mise en page de toute évidence très contraignantes.

Une gageure ?

L’auteur de cette chronique se souvient avoir entendu un Inspecteur pédagogique régional affirmer avec l’assurance du professionnel qu’une même question pouvait être traitée en dix heures, en trois heures ou en dix minutes. Affaire de choix et de pédagogie ! Savoir aller à l’essentiel !
Nous y sommes et Cécile Vast, universitaire auteur d’une thèse sur les Mouvements unis de résistance, connaît l’histoire de la Résistance et les problématiques de son historiographie récente. Aussi n’entend-t-elle pas se limiter à présenter la Résistance intérieure, son évolution, ses actions, ses acteurs, ses organisations. Elle affiche d’emblée de bien plus vastes ambitions :
– « Retracer les grandes étapes d’un phénomène qui s’est construit dans le temps » ;
– « Montrer la diversité des formes de l’action » ;
– « Saisir les réalités et l’environnement social de la clandestinité » ;
– « Comprendre le sens donné par les acteurs à cette expérience » ;
– « Tenter enfin de réfléchir aux appropriations successives de la Résistance et à ses interprétations ».

Le tout en 50 pages de texte auxquelles s’ajoutent deux cartes, 14 très courtes biographies (le choix en était nécessairement subjectif et donc contestable ; Jean Moulin par exemple y bénéficie du même traitement qu’un lycéen de Besançon fusillé à 17 ans), un glossaire et une bibliographie.

Les limites de la concision

L’ouvrage comporte cinq parties divisées chacune en quatre à six sous-parties. Chaque sous-partie est traitée sur une double page structurée en trois ou quatre paragraphes et son contenu est résumé en quelques mots clairement mis en évidence. Ajoutons des encarts (souvent des citations) et quelques rares et minuscules photographies.
Tous les aspects du sujets sont donc effectivement abordés : les premiers groupes de résistance, la France libre, la naissance des réseaux et des mouvements, l’unification, les actions de propagande, de lutte armée et de sauvetage, les maquis, la répression, les combats de la Libération, l’épuration. A ces aspects de présentation historique s’ajoutent les grands thèmes de l’historiographie récente : « Les Français et la mémoire de la Résistance », « Les résistants, Pétain et Vichy », « La société et les résistants », « Les héritages politiques et moraux » : au total ce sont 26 thèmes qui sont ainsi traités en trois ou quatre brefs paragraphes. Cet exercice exige de l’auteur un remarquable effort de concision, chaque mot devant sans doute être pesé et chaque phrase ciselée pour… aller à l’essentiel.

Pour quel public ?

La quatrième de couverture affirme que la collection est « accessible à tous ». Effectivement, le vocabulaire est simple, le texte aéré, les notes absentes, les renvois (trop) nombreux. Le lecteur qui connaît le sujet appréciera l’exercice de style, critiquera tel ou tel choix, tel ou tel oubli, telle ou telle allusion, reconnaîtra qu’effectivement tous les aspects sont «abordés ».
Mais qu’en sera-t-il pour celui qui ne connaît pas et veut découvrir l’essentiel ? Que retiendra le lycéen qui trouvera ce petit livre au CDI de son établissement ? Il risque de glisser sur des paragraphes trop lisses et trop impénétrables a force d’être concis. Il n’aura pas découvert l’histoire de la Résistance intérieure, il n’aura pas vraiment appréhendé les conditions de la clandestinité, il aura beaucoup de mal à comprendre les paragraphes trop allusifs traitant de l’historiographie récente. L’étudiant de première année pourra croire qu’une question aussi vaste peut être traitée dans un volume aussi réduit et donc assimilée en un temps très bref ; mais en réalité, pour un vrai travail il devra surtout recourir à la bibliographie.

Il nous semble que l’on touche avec ce type d’ouvrage aux limites de l’exercice de style qui consiste à vouloir aller vite, à renoncer aux démonstrations, à multiplier les encarts et les rappels, à se priver du bonheur d’écrire et de lire un livre.

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