Cet ouvrage propose au lecteur de suivre l’itinéraire d’un soldat américain à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il est illustré par l’auteur avec des photographies colorisées et l’on peut aussi prolonger la lecture par un documentaire. L’auteur précise qu’il n’a ni expérience militaire, ni d’études en histoire. Son objectif est de comprendre ce que ces jeunes hommes ont vécu. Pour cela, il dispose d’un trésor d’archives, en l’occurrence un lot de lettres complet. Il cherche à comprendre la guerre à hauteur d’homme.

Nous sommes en 1944

Clément Horvath commence par dresser un état des lieux de la situation en 1944. Il présente ensuite le soldat que l’on va suivre durant tout l’ouvrage. Il s’appelle Otis Charles Hewett, il est né en 1909 et est horloger de formation. Le 15 mai 1944, il traverse l’Atlantique et arrive en Europe après plusieurs jours de traversée. Il a l’avantage d’avoir appris le français au lycée.

Quelque part en …

L’auteur fait le choix d’offrir de larges extraits des lettres du soldat. Au passage, il explique plusieurs éléments de la vie quotidienne des soldats comme le système du V-mail. Les lettres étaient rédigées sur des formulaires spécifiques et étaient ensuite photographiées sur des microfilms puis expédiées pour impression dans le pays de destination. Parmi les autres documents ajoutés, on trouve un porte-document en toile imperméable, fabriqué à partir d’une bâche d’instruction à l’utilisation d’un canon.

Au combat

Otis est en Normandie. Il se lie d’amitié avec un fils d’une ferme. Il raconte la façon dont les soldats américains sont accueillis. Il narre notamment un incroyable repas dans la famille de cet enfant. Le 2 août, il est affecté à la 4 ème Infantry Division. Clément Horvath a fait le choix d’un ouvrage très illustré, très concret comme lorsqu’il montre une reconstitution de l’uniforme que devait porter Otis.

En route pour Paris

On trouve des extraits des sentiments d’Otis envers les Allemands, mais aussi son amour pour la France :  » Plus je découvre ce pays et ses habitants, plus il me plaît. ». Otis est ensuite un des premiers Américains à entrer dans la capitale française. Il note le contraste avec le moment où il était en Normandie marquée par des villes fantômes. Les restes de la 7 ème armée allemande sont en fuite tandis que la 4th Division, au sein de la 1st Army, est envoyée au nord-est vers la frontière belge puis vers l’Allemagne.

Brise Sigfried

Des photographies montrent les traces toujours présentes de cette ligne de défense allemande. Otis différencie ce qu’il écrit, selon qu’il s’agit de sa femme ou d’amis. Il est aussi confronté à la mort d’amis de bataillon tués par des mines. Il se montre aussi inquiet par certaines remarques de sa femme et il lui redit :  » Après tout ce temps, tu devrais savoir que je n’aime que toi ! « . Il faut aussi savoir que sa femme est enceinte et cela aide Otis à tenir. Parfois, il essaye de faire comprendre à sa femme ses conditions de vie, y compris sous forme de dessin, qu’il considère lui-même comme raté.

Avant la tempête

Par ses remarques, Otis semble dire que la vie au front est devenue une routine. Le courrier représente toujours un puissant soutien.  » Quel que soit le temps, si j’ai la chance de recevoir une lettre de ta part, tout semble lumineux et joyeux ». Otis raconte aussi comment se déroulent les IPG, ou interrogation de prisonniers de guerre. Il évoque aussi l’existence des V2 et leurs dégâts.

L’usine de la mort

Quelques jours plus tard, Otis apprend la date probable de l’accouchement de sa femme. Son fils nait le 13 novembre au moment où lui, se retrouve au coeur d’une bataille. Ce n’est pas n’imprte laquelle puisque c’est la plus grande attaque coordonnée à laquelle la division participe depuis la percée hors de Normandie. A propos du quotidien des soldats, Clement Horvath précise ce qu’étaient les foxholes, ces trous prévus pour accueillir des soldats dans la forêt. La forêt de Hürtgen est le site de l’un des plus grands champs de mines d’Europe. Avec retard, Otis finit par apprendre la naissance de son fils.

Je marche seul

Il est blessé au dos mais cherche le plus possible à le cacher à son épouse avant de le lui avouer. Il est vrai que, par rapport aux GI habituels, Otis affiche quinze ans de plus. Il décrit sa vie désormais très différente puisqu’il est en repos.  » Je suis allongé dans un lit propre, j’écoute la radio et je mange des sucreries ». Sa blessure lui permet d’échapper à la bataille des Ardennes. Celle-ci est la plus importante et la plus sanglante des campagnes menées par les Etats-Unis au cours de la Seconde Guerre mondiale et la troisième la plus meurtrière de toute leur histoire. Otis est transporté en Angleterre et il fabrique de petits objets pour s’occuper.

La douce vie parisienne

Il sert au sein d’une cour martiale ce qui lui permet de retourner à Paris. Il assiste aux procès en cour martiale de soldats pour violation des règlements de l’armée, le plus souvent pour avoir déserté leurs unités. Dans une lettre, il décrit le nouvel uniforme qu’il porte à cette occasion.

Mauvaises nouvelles

Otis apprend la mort de son frère qui combattait dans une autre partie du monde. Le corps de ce dernier est finalement rapatrié aux Etats-Unis par bateau en mai 1949. Otis exprime sa tristesse dans plusieurs de ses courriers. Il doit rester plus longtemps à Paris du fait de son excellent travail et du manque de personnel à la cour. Clément Horvath revient en fin d’ouvrage sur le destin d’Archibald qui avait fait l’objet de son premier ouvrage.

Le retour

Otis témoigne de l’ambiance le 8 mai 1945 : « il y a des foules de milliers de personnes qui défilent dans les rues, qui chantent, des orchestres qui jouent et tout le bazar ». Ses sentiments sont partagés quand il pense aux militaires qui ont tant souffert au combat. Mais, il retrouve ensuite le moral lorsqu’il pense aux retrouvailles avec son épouse.  » Tout ce à quoi j’aime penser, c’est à mon retour à la maison ». L’auteur donne la suite de l’histoire. Il ouvre avec son fils sa propre boutique de joaillerie. Il meurt en 1981, sa femme en 2007 et son fils en 2013.

Clément Horvath souligne que les lettres des soldats nous connectent à l’histoire. Il fait donc le choix de donner le plus possible la parole à ce soldat et d’illustrer par de nombreux documents pour que le lecteur approche au mieux son quotidien. C’est un ouvrage très émouvant qui est concentré sur un moment précis de la guerre.