Imaginez un peu cela ! Une carte de France où figurent les très petites communes. Entendez par là les 1000 communes de moins de 50 habitants que compte la France. Leur répartition n’a rien à voir avec le tracé de la « diagonale du vide » (cf. Béteille, La France du vide, 1981). Elles se trouvent dans un grand quart nord-est, à l’est des Pyrénées, au sud des Alpes et en Corse. Des cartes régionales se déplient et permettent de localiser, très précisément, les communes de moins de 50 habitants, même si l’absence des villes importantes, des métropoles complique l’exercice.

Le sujet de la thèse de doctorat de Jean-Baptiste Grison, soutenue en 2009, a le grand mérite d’être original. A l’heure de la mondialisation, des villes-monde, il s’intéresse à l’infiniment petit, à cette drôle de particularité territoriale de la France des 36 000 communes. La publication de ce texte dans la revue CERAMAC n’a rien d’étonnant puisqu’elle consacre ses travaux aux espaces ruraux et à leur problématique de développement. Un texte sur la marginalité (y compris communale) a toute sa place. La question du devenir de ces très petites communes a d’autant plus d’actualité dans le contexte des exigences à tenir en matière de gestion du territoire et d’action politique.

Pour rendre compte de la situation, un travail quantitatif et qualitatif a été mené. Le profil des très petites communes est relativement marqué même si la diversité l’emporte. Très souvent, le monde agricole est très présent à la tête de la commune. Généralement, le manque de moyens y est dénoncé. Il apparaît toutefois que la personnalité du maire est centrale dans la gestion d’une très petite commune. Le profil électoral des habitants est très souvent homogène et le maire peut s’appuyer sur ses électeurs (qui composent de manière non négligeable le conseil municipal). Les choses bougent et les initiatives ne sont pas rares. Autre élément d’optimisme : les très petites communes sont de moins en moins nombreuses. L’exode rural du XIXème siècle, qui les a vidé, s’est aujourd’hui inversé sous l’effet de la périurbanisation ou d’une reconquête des campagnes en tant qu’espaces de loisirs. Si la « Renaissance rurale » existe bel et bien, ces constats ne peuvent pas être généralisés à l’ensemble des très petites communes. Les zones en fort déclin démographique n’arrivent pas à attirer de nouvelles populations.

L’environnement régional des très petites communes est central dans leur dynamisme. Les tentatives de fusion (Loi Marcellin de 1970) ont été un échec relatif car les habitants sont attachés à l’échelon communal initial. Si l’intercommunalité a pu apparaître comme une solution intermédiaire entre le maintien et la fusion, sa mise en place forcée en 2012 (pour les communes récalcitrantes) n’a pas d’avenir si elle n’est pas portée par les acteurs locaux qu’ils appartiennent à des très petites communes ou pas.

Catherine Didier-Fèvre ©Les Clionautes