Fondée en 1932, la revue Urbanisme a lancé au printemps 2013 une nouvelle formule. En 2022, son nouveau rédacteur en chef, Julien MEYRIGNAC, a souhaité encore modifier la maquette afin que la revue élargisse son lectorat, notamment vers les décideurs, et son audience. Toujours destinées « à ceux qui réfléchissent, conçoivent, financent et réalisent la ville », les principaux changements concernent la forme avec notamment une plus grande place donnée à la photographie et une mise en page plus aérée. L’actualité culturelle est toujours  traitée conformément à la promesse originelle du journal en lien avec les territoires, les villes et les sociétés.

Les jeunes et leurs liens avec la ville et l’urbain

C’est le sujet de ce numéro de mars-avril 2022. Dans son édito, Julien MEYRIGNAC, note que  « les jeunes en 2022 – la génération Z – envisagent les territoires des villes à une aune de modération responsable et de justice solidaire […]  » et il se demande si on assiste aux « prémices du woke urbain« .

Une première infographie nous engage vers quelques pistes : 85% des moins de 30 ans estiment que leur génération sera différente des générations précédentes et 35 000 étudiants, allant jusqu’à remettre en cause leur enseignement, ont signé le manifeste « Pour un réveil écologique » paru en 2018. L’exemple de quelques projets primés au 16ème concours EUROPAN ouvert aux jeunes professionnels de la conception urbaine, paysagère et architecturale est symptomatique de ce chemin vers « plus de sens et de récit et moins d’architecture ».

A une échelle régionale, un projet propose la création d’un grand parc naturel de 75 000 hectares sanctuarisé entre la France et la Belgique. A une plus grande échelle, un projet se concentre sur la valorisation et à l’augmentation de l’existant à Istres. Se dégage globalement une opposition entre une ville performante (smart city) dense et optimisée « contre » une ville plus informelle, plus frugale, plus diverse mais aussi plus complexe, plus « humaine ».

Un développement entre le smart et le good ?

Il semblerait toutefois que cette dialectique entre économie et environnement urbains, le smart et le good, peut être féconde et source de compromis. « Va-t-on voir émerger des « smart grids écologiques et sociales d’initiatives citoyennes, accompagnées par des politiques publiques locales et suivies par des opérateurs public, d’économie mixte ou de la promotion immobilière » ? Les activités productives en ville, entre logistique, cultuel et numérique, offrent des perspectives de développement de la diversité urbaine pour Anne-Catherine OTTEVAERE, Axal BASTH et Marc JOSSELIN. Le bassin de Biestebroeck à Bruxelles en est un exemple en essayant de faire cohabiter de manière verticale et horizontale les activités productives et les logements.

La déprise des centres-villes par les commerces est une autre problématique développée par Jacques SCHOMBOURGER. L’atelier Hyper de Bagnolet est une illustration intéressante de leur transformation en tiers-lieu, promouvant la culture de l’emploi des ressources disponibles localement et impliquant les habitants par son ouverture sur le quartier. Puis plusieurs auteurs insistent sur l’importance des jeunes dans les territoires urbains à l’échelle entière des métropoles (Nice) ou à l’échelle des quartiers, notamment populaires, avec la nécessité de prendre en compte leurs avis, mais aussi dans les petites et moyennes villes qui souffrent souvent de leur départ (Clamecy). David ATTIÉ parle même de « disparition des enfants de l’espace public ». En moins d’un siècle, le périmètre d’autonomie des jeunes aurait rétréci de 90%.

A l’image des travaux sur la place des femmes dans l’espace public, il apparaît de plus en plus nécessaire de changer de regard pour penser la ville à hauteur de rue, à hauteur d’enfant, à hauteur de jeune, pour en faire réellement une « ville « all » inclusive ».