Savez-vous qu’au hasard de promenades en Ile de France voire plus loin, vous pouvez aujourd’hui encore voir quelques vestiges de l’exposition coloniale de 1931 et pas seulement dans la récente cité nationale de l’histoire de l’immigration.
C’est à une visite textuelle à défaut d’être virtuelle que nous invitent Catherine Hodeir et Michel Pierre.

Les palmiers de Vincennes

Le 6 mai 1931, Gaston Doumergue inaugure à la Porte Dorée, entrée du bois de Vincennes, une grande exposition à la gloire des colonies qui fait suite aux grandes expositions universelles du XIXème siècle où les terres lointaines étaient déjà représentées. Constructions et figurants sont décrits dans ce premier chapitre.
La genèse de l’exposition fut lente, elle doit beaucoup à Lyautey et fait suite aux célébrations du centenaire de la conquête de l’Algérie, le but: mettre en image l’idée coloniale et son ancrage économique croisant aux lendemains du premier conflit mondial.

Les bâtisseurs de l’éphémère

Tâche délicate que la construction à la fois solide pour accueillir le public durant 6 mois mais facile à démonter tout en respectant le boisement du lieu, même si un projet de conserver un musée : le Palais des colonies dont l’architecture est présentée ici en détail. Ce second chapitre est consacré au projet avec une place particulière à la « cité des informations », sa grande salle de cinéma et l’évocation des aventuriers modernes de la « croisière noire ». Les auteurs nous invitent à une visite de l’exposition coloniale, après les pavillons des missions catholiques et protestantes, Angkor et ses temples, on perçoit une mise en valeur de l’AOF tandis que l’AEF est juste évoquée, c’est ensuite Madagascar et enfin le Maghreb.

Vincennes aux couleurs du monde

Quittant les colonies françaises le visiteur pénètre ensuite dans les territoires sous mandat: Togo, Cameroun et Liban. De l’autre côté du lac Daumesnil voilà les colonies étrangères, si la Belgique, l’Italie, les Pays-bas et le Portugal et même le Danemark avec le pavillon du Groenland ont répondu à l’invitation de la France, on remarque l’absence de l’Espagne et surtout de la Grande Bretagne.

Décors et figurants

Au-delà des expositions l’exposition coloniale fut aussi marquée par quantité de spectacles, feux d’artifices mais aussi le zoo, conçu à l’époque comme temporaire qui demeure aujourd’hui la trace de l’exposition au bois de Vincennes. L’idée était de faire comprendre, par des mises en scènes, le quotidien des habitants des colonies et des troupes indigènes.
On trouve une amorce timide de réflexion sur la place des « indigènes » (p 131) quand les auteurs défendent surtout le projet officiel contre l’amalgame avec les initiatives privées au jardin d’acclimatation dont la scandaleuse présentation des Kanaks. C’est l’occasion d’évoquer l’opposition de la ligue de défense de la race noire, proche du parti communiste. Si les auteurs récusent le terme de « zoo humain » car utilisé au début des années 80, ils concèdent l’existence de textes, chansons, images résolument racistes dans la presse de l’époque.

Le vertige du succès

Les très nombreux visiteurs et la place dans la presse attestent du succès de l’exposition. Pour promouvoir l’idée coloniale des congrès réunissent les savants du monde entiers qui vont jusqu’à proposer des résolutions pour une charte coloniale, idées exprimées dans le livre d’Albert Sarraut: Grandeur et Servitudes coloniales qui pose la question du statut de l' »indigène » même si la colonisation reste avant tout une question d’exploitation économique.

Cette mise en valeur des colonies a des influences dans maints domaines y compris l’art.

Les opposants

Le mot d’ordre des Surréalistes: ne visitez pas à l’exposition, introduit ce chapitre consacré aux opposants: parti communiste mais aussi chez certains cadres des colonies qui dénoncent les répressions et violences y ont lieu. Le Parti communiste organise une contre-exposition anticoloniale que les auteurs nous font visiter, évocation en particulier du chemin de fer Congo-Océan décrit par André Gide et Albert Londres.
Ce chapitre tente un très rapide bilan de la situation coloniale française en ce début des années 30.

Le regard piégé

Après l’évocation des dernières cérémonies en novembre 1931, les auteurs décrivent le démantèlement et le devenir des plus belles pièces de l’exposition dans l’esprit du temps ou colonisation rime avec civilisation.
Un ouvrage plus descriptif, malgré l’absence d’illustration, qu’analytique sur un événement populaire qui amène le lecteur à imaginer plus qu’à comprendre.

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