Née d’une coopération entre chercheurs rennais et suisse, ce livre vise à travers toutes les approches et disciplines à étudier le corps, sujet longtemps délaissé ou du moins marginal.
Il s’agit d’un ouvrage collectif regroupant des contributions présentées lors de trois manifestations scientifiques en 2004.
Il est édité par les Presses universitaires de Rennes en 2006 et compte 390 pages. Cet ouvrage rassemble 25 contributions et s’inscrit dans une collection : Les Cahiers d’Histoire du corps antique. Il s’agit du deuxième volume de cette collection.Née d’une coopération entre chercheurs rennais et suisse, cette série vise à travers toutes les approches et disciplines à étudier le corps, sujet longtemps délaissé ou du moins marginal.
L’approche est très large en terme de chronologie puisque l’on va de l’époque archaïque à romaine, et en terme de support puisque sont étudiés à la fois les vases et les mosaïques.
Les thèmes abordés sont très variés allant du banquet au sport, à la mythologie ou à la guerre.Trois thèmes organisent cet ouvrage : tout d’abord l’identité et la mise en scène des postures et des attitudes, puis les rencontres faites d’échanges de regards et de manœuvres de séduction, enfin, les tensions et les affrontements, les contraintes faites aux corps.
Soulignons l’effort d’illustration même s’il s’agit évidemment de noir et blanc et pas de pleine page, mais cela facilite la lecture et la compréhension de l’ensemble.

Le principe de base affirmé dès l’introduction est que la gestualité est propre à chaque culture, il n’y a pas a priori d’universalité des gestes. Les représentations figurées ne reproduisent pas le réel auquel elles se référent. Les attributs et les gestes constituent la clé permettant l’interprétation des images. On ne peut se contenter de l’étude de l’œuvre, mais il faut parler du lieu, du contexte ou de la formation de l’artiste. Le fait est que le message d’une même scène peut changer dans deux contextes culturels différents. Fort habilement, dans une introduction O Touchefeu-Meynier et F. Lissarrague montrent combien il est difficile parfois d’interpréter un document.

Parmi les articles, signalons pour la première partie- sur l’identité et la mise en scène des postures et des attitudes, la contribution « Gestes des hommes, gestes des dieux. La représentation des gestes dans la plastique grecque archaïque et classique ». L’auteur met en évidence le fait que la gestuelle divine offre un répertoire très restreint et peu varié. Jamais les Grecs n’ont défini leurs dieux par l’immobilité, c’est même le contraire : or la sculpture paraît totalement contredire cette impression. La représentation du geste est superflue tant l’image est investie des potentialités propres au dieu qu’elle incarne.
Quittant le monde grec, l’ouvrage aborde également le monde romain à travers « La représentation des valets d’armée sur les stèles funéraires : quelles interprétations de leurs fonctions et de leur statut ?  » Dans cet article, Anne Morin s’interroge sur le fait de savoir si les esclaves pouvaient porter des armes : le droit romain dit que non, mais les stèles funéraires semblent dire une autre histoire. Il faut distinguer parmi les esclaves ; ceux-ci ne sont pas une catégorie homogène. Un type se détache particulièrement : c’est l’agaso, sorte de serviteur personnel. Au-delà, c’est un aspect fondamental qui permet de montrer que l’extrême variété des esclaves empêchait toute conscience de classe. C’est aussi un nouvel exemple de la capacité d’adaptation de l’armée romaine au-delà des statuts théoriques.

Pour la deuxième partie sur les rencontres faites d’échanges de regards, signalons la contribution « Gestes de banqueteurs « L’auteur montre que les très nombreuses représentations de banquets se rangent en deux catégories : les images à fonction publique et les images privées. Une seconde distinction entre les divers types de représentations de banquets se dessine elle aussi naturellement : certaines représentations ornent des objets de la vie quotidienne, d’autres semblent destinés à l’espace funéraire. Leur sens n’est probablement pas le même.
Autre article intéressant : celui consacré à « La disponibilité à l’Autre : le geste de la séduction passive dans l’art romain ». La mise en scène de la passion amoureuse est bipolaire et un ensemble de conventions sert à montrer le dominant et le dominé. Partant de là, l’auteur montre que les gestes s’inscrivent dans la même logique. Certains servent à montrer la domination dans le rapport amoureux. Seule la mise en par nous éclairer en faisant apparaître de petites différences significatives. Il s’intéresse particulièrement au geste du bras levé et replié sur ou autour de la tête. C’est un geste de repos, d’ouverture, d’accueil de l’Autre. De nombreuses illustrations donnent à voir ce geste qui passait parfois inaperçu. Il s’agit d’un geste de disponibilité érotique qui peut être fait par un homme ou une femme, mais qui dans les deux cas souligne la « féminité », c’est-à-dire ici, la séduction soumise.

Enfin, dans une troisième partie consacrée aux tensions et affrontements, signalons « La maîtrise du regard par les peintres de vases athéniens » Pendant longtemps les peintres n’ont dessiné qu’un œil de face dans un visage vu de profil. Les peintres de vases athéniens vont arriver, avec le développement de la figure rouge, à suggérer des échanges entre les personnages, ils s’attachent à les rendre plus expressifs.

Cet ouvrage est clairement à destination des étudiants en histoire ancienne car il aborde des problématiques nouvelles qui supposent une bonne connaissance d’une base contextuelle gréco-romaine comme le sacrifice, le banquet par exemple.
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