Alors que le travail semble être redevenu un sujet de recherche universitaire, comme en témoigne la question à l’agrégation sur le travail dans les sociétés européennes occidentales entre le XIXe siècle et le XXe siècle, Olivier Grenouilleau publie un ouvrage sur une notion centrale pour l’homme moderne, le travail. C’est une notion est au coeur de nombreux questionnements et enjeux : reconnaissance, pénibilité, salaire, durée, légitimité… mais aussi origine. Dans le sens de comprendre, non pas simplement le déroulé historique de ce que serait le travail, mais d’abord et surtout la compréhension qu’en ont les hommes et les sociétés et le sens qu’ils lui donnent.

C’est ainsi que l’historien étale sa réflexion sur une période très longue, du Néolithique à notre époque contemporaine. Dans un style précis et accessible dans son ensemble, tout en étant rigoureux et exigent, Olivier Grenouilleau interpelle le lecteur sur plusieurs idées reçues autour du travail en remettant en question par exemple Max Weber et la relation protestantisme-capitalisme.

Olivier Grenouilleau construit sa réflexion autour de 3 grandes parties chrono-thématiques : une première qui s’étend du Néolithique aux mondes antiques grecs et romains, une seconde de la Bible aux Lumières, la dernière sur les mondes contemporains. Son propos est ainsi à la fois de montrer que le travail est présenté comme un labeur ou un « fardeau » pour reprendre ses mots, mais surtout que les Hommes dépassent cette contrainte pour plusieurs raisons, comme l’accomplissement personnel ou la quête d’un Progrès lui-aussi difficile à cerner en fonction des époques et sociétés.

Une des forces majeures de ce livre est de réinterroger chacune des sociétés qui nous précèdent à travers le travail. Pour cela, l’historien s’appuie sur les dernières avancées historiographiques qui permettent de mettre à distance notre propre grille de lecture sur le travail mais aussi de remettre à jours nos connaissances sur celles-ci. Ainsi on peut retrouver des thèmes comme l’oisiveté, la religion, le machinisme à travers plusieurs époques, ce qui apporte une réelle profondeur à l’idée de travail.

Au final, un vrai plaisir que cet essai par la richesse qu’il apporte et les réflexions qu’il procure.

Présentation de l’ouvrage sur le site de l’éditeur 

« Le travail, lui aussi, a une histoire. Elle traverse les âges. Que représentait-il pour les chasseurs du Néolithique et les pasteurs du Croissant fertile ? Quelle conception s’en faisaient les scribes de Babylone, les prophètes de Jérusalem, la Bible, les philosophes d’Athènes, les juristes de Rome ? À quel point les paysans du Moyen Âge l’appréhendaient-ils différemment des ouvriers de la Belle Époque ? Et que devient-il aujourd’hui face aux mutations technologiques ?

Il fallait Olivier Grenouilleau pour dresser ce panorama sans précédent qui, entre nature et culture, malédiction et rédemption, servitude et dépassement, relate et interroge le plus singulier et le plus universel des phénomènes humains.

Comment, en Mésopotamie, les dieux condamnent-ils l’humanité à travailler pour eux sans qu’elle soit coupable de la moindre faute ? Comment pour Hésiode, au contraire, condamnée au travail car coupable de démesure, peut-elle être sauvée en s’en acquittant avec justice ? Comment la Bible fait-elle du travail une œuvre au point que les Temps médiévaux apparaissent « modernes » ? Ou, après la Renaissance, comment la réinvention du travail est-elle perçue en tant que clé de la réforme sociale afin que l’humanité puisse se réaliser et s’accomplir ? Et ce, avant les remises en cause présentes.

Signe que le travail n’aura jamais cessé de causer abondance et misère, soumission et révolte, volonté de rationalisation et désir d’émancipation. Aux récits religieux anciens auront ainsi répondu les utopies sociales modernes. Concentrant ambivalences et antagonismes, ses métamorphoses dessinent, en filigrane, la quête inachevée que poursuit l’humanité de sa liberté.

Une fresque capitale, une somme décisive pour penser hier et demain. »

Présentation de l’auteur

« Olivier Pétré-Grenouilleau est un historien français, spécialiste de l’histoire de l’esclavage. Il est professeur depuis 1999 à l’Université de Bretagne-Sud et depuis 2007 à Sciences Po Paris. Il a rejoint en 2009 le groupe Histoire et Géographie de l’Inspection générale de l’Éducation nationale (IGEN). Il étudie depuis 1990 les traites négrières et plus particulièrement la traite négrière nantaise. Son père, facteur et sa mère, ouvrière dans une biscuiterie, ont eu trois enfants. Olivier Pétré-Grenouilleau a passé toute son enfance dans la banlieue nantaise. Après dix ans d’enseignement en collège et lycée, il soutient sa thèse d’histoire sur le milieu négrier de la ville de Nantes en 1994. Il commence sa carrière universitaire en 1995, en tant que maître de conférences et devient professeur en 1999 à l’Université de Bretagne-Sud 1. En mai 2007, il succède à Jean-Pierre Azéma comme professeur des universités en histoire à l’Institut d’études politiques de Paris. »