Des « instants suspendus » de 25 explorateurs français
Connaître son environnement lointain est une constante des sociétés humaines depuis le Néolithique. Explorer le monde est donc une activité qui demande des connaissances scientifiques, une curiosité envers le monde ou de réelles aptitudes physiques.
Ces explorations sont parfois l’occasion de moments de grâce, d’instants suspendus. C’est précisément l’objectif de ce recueil. Coordonné par Elodie Broussard, ce volume rassemble ces moments à travers 25 « mémoires poétiques ».
Chaque auteur décrit l’un de ces moments en 6 à 8 pages. Que ce soit en Antarctique (Matthieu Tordeur), au Tibet (Simon Allix), en Patagonie (Luc-Henri Fage), en Ethiopie (Dany Cleyet-Marrel), sur l’ile canadienne d’Ellesmere (Vincent Munier) ou au Ladakh (Jeanne Mascolo de Filippis), ces hommes et femmes qui parcourent le monde décrivent, chacun à leur manière, un instant qui les a marqué.
Parmi les 25 contributions, Sophie Planque raconte sa visite dans le village de Dawé en Ethiopie. L’excision est une pratique répandue dans ce village. En compagnie d’une sage-femme et d’une représentante de Medecins sans frontière, elle assiste à l’interdiction de cette pratique par le conseil villageois.
C’est la visite du site bouddhiste de Bamiyan qui forme un moment poétique pour Jean-Christian Kipp. Reporter devenu vice-président de la Société des Explorateurs Français, Jean-Christian Kipp a rejoint l’expédition automobile Paris-Kaboul monté entre 2005 par Edouard Cortès et Olivier Weber. La vallée de Bamiyan est alors profondément différente de sa visite réalisée en 1986. Les statues de bouddhas géants ont été dynamités en mars 2001 par les Talibans. Jean-Christian Kipp aide une archéologue à trouver et étudier les vestiges subsistant après cette explosion. Une partie se trouve dans des grottes à proximité. L’une d’elle est différente des autres. Le panorama sur la vallée est pratiquement le même mais les vibrations y sont différentes et l’atmosphère, apaisante.
Quelques pièces, d’habitation certainement, aux dimensions variabls et aux formes plus distinctives, s’étaient succédé, sans que j’y pénétrasse. A un moment cependant, sur ma droite, s’ouvrit une grotte à la forme plus aboutie. Ce quart de sphère régulier, pas très grand, d’un diamètre de quatre ou cinq mètres l’attira immédiatement et, comme mû par une force tranquille mais déterminée, je me trouvai en son centre. Je m’y assis lentement, sans quitter un instant du regard le panorama sublime qu’elle dévoilait. C’était pourtant le même panorama que celui offert par les autres grottes mais, comment vous dire, il me paraissait différent, plus accueillant, plus accessible. L’air aussi, sa température, sa texture, y était différent. Rien de spectaculaire, de tangible, de mesurable mais c’était comme si les éléments s’étaient mis au diapason de mon corps. Dans le même rythme, la même vibration, bénéfique et apaisante.
Mémoires poétiques d’explorateurs, Les Belles Lettres, 2024, pages 68-69
Ce recueil géopoétique est une véritable invitation à l’aventure et à la rêverie.
A noter que l’intégralité des droits d’auteur de ce livre servira pour la dotation d’un prix décerné par la SEF (Société des Explorateurs Français).
Pour aller plus loin :
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