Dans ce livre, l’auteur nous fait découvrir le parcours exceptionnel de Milon de Crotone, miliaire et athlète originaire de cette ville du sud de la Grande Grèce antique. Vivant au VIe siècle avant notre ère, Milon se distingue à la fois par ses faits de guerre, ses multiples récompenses aux Jeux Olympiques et son appartenance au groupe pythagoricien.

Réédition d’un ouvrage paru en 2016, déjà l’occasion de précédents Jeux Olympiques, en l’occurence ceux de Rio de Janeiro, ce livre fait partie de la longue liste de parutions à l’occasion de l’édition 2024 à Paris.

C’est donc un destin riche qui est évoqué par l’auteur. Pour cela, il divise son étude en 9 chapitres, auxquels s’ajoutent une introduction, une conclusion et une somme pharaonique de notes: ces dernières comptent pour presque le quart de l’ensemble de l’ouvrage, le tiers si l’on rajoute la riche bibliographie de fin d’ouvrage.

Les grandes lignes de cette étude sont assez précises. Tout d’abord, l’auteur nous démontre ce qu’est être un historien à travers les recherches documentaires entreprises afin de retracer ce parcours de vie quelque peu tumultueux. Puis, il apparaît très clairement que le sport, mais aussi l’athlète, remplissent, déjà, des fonctions au sein de la société antique. L’athlète représente une ville et son pouvoir, exerce une influence sociale, possède un rôle économique et religieux, et est le témoin de la discipline et de la rigueur de vie nécessaire à la réussite de chaque homme. Le succès, tout comme la défaite, sont interprétés et utilisés par les pouvoirs politiques et religieux en place, aboutissant, in fine, à la création de mythes et légendes. En tout cela, le parallèle avec notre époque gagne en profondeur.

Ce dernier aspect compose une grande partie du récit présenté ici. L’athlète , pour réussir, doit s’astreindre à des règles ui font de lui un modèle et une exception. C’est un esprit, mais c’est aussi un corps. Et un corps s’entretient, au grand dam des habitudes alimentaires, gargantuesques, de Milon. De peur d’être figuré avec un embonpoint sur les amphores, ce détail n’échappant pas aux artistes.

De ses autres vies, notamment auprès de Pythagore et de sa communauté, il y a moins de sources probantes, moins de richesses documentaires et cela n’est pas tout à fait le sujet de cet ouvrage. Néanmoins, l’auteur y consacre, grosso modo, les 3 derniers chapitres. Les multiples notes et la bibliographie renvoient à ce moment-là à tout un ensemble de lectures complémentaires.

Au final, un ouvrage qui ouvre de multiples réflexions quant à la dimension si particulière que prennent et le sport dans l’Antiquité, ceci étant bien évidemment à mettre en parallèle avec nos pratiques contemporaines. Un apport bienvenu à quelques mois des JO de Paris.

Présentation de l’ouvrage sur le site de l’éditeur 

« Lutteur d’exception, Milon de Crotone accumule, au VIe siècle av. J.-C., le plus extraordinaire des palmarès sportifs de l’histoire. Multiple champion olympique, sa légende, antique comme moderne, a fleuri autour des exploits qu’on lui prête, qu’il s’agisse de prouesses physiques ou alimentaires. Érigé par les Anciens en figure exemplaire de la force, de l’énergie ou encore de la virilité, Milon a frappé les esprits tant par son rôle déterminant dans la guerre contre Sybaris que par les conditions dramatiques de sa disparition, dévoré par des loups dans une forêt de Crotone, les mains prisonnières d’un chêne qu’il avait tenté de fendre. Mais Milon est avant tout le témoin et l’un des acteurs principaux de la naissance d’un phénomène majeur de la culture occidentale, le sport, et de l’émergence d’une figure sociale d’un nouveau type : l’athlète. »

Présentation de l’auteur sur sa page professionnelle

« En matière d’histoire sociale de la Grèce ancienne et de subaltern studies, j’ai notamment travaillé sur l’analyse des hiérarchies sociales et ai publié, dans ce cadre : Les cités grecques (VIe-IIe siècle av.J.-C.). Essai d’histoire sociale, Paris, PUF, 2015, ouvrage ayant pour objectif de mettre en évidence, à rebours d’un usage utopiste du modèle grec,  le système d’inégalités en vigueur dans les cités.

Je poursuis mes recherches d’histoire sociale sous la forme de sociobiographies. Après avoir réalisé un portrait du philosophe cynique Diogène et étudié, à travers lui, la place de la mendicité et le rôle des appartenances sociales dans les cités (Diogène, l’antisocial, Paris, PUF, 2020, qui a fait l’objet d’une traduction grecque, Διογένης. O αντισυμβατικός, Enalios, 2022, et d’une traduction anglaise, The Dangerous Life & Ideas of Diogenes the Cynic, Oxford University Press, 2023), je prépare actuellement une sociobiographie d’Alcibiade.

En matière d’histoire du sport antique, j’ai notamment étudié les origines du sport, explorant les conditions d’apparition de la figure sociale de l’athlète, de la diététique athlétique, de l’articulation entraînement-compétition, et plus largement de la raison sportive (Milon de Crotone, ou l’invention du sport, Paris, PUF, 2016).

J’ai mené à bien, ensuite, dans une perspective d’anthropologie historique et d’histoire comparée, une histoire de la boxe dans le monde gréco-romain (À poings fermés. Une histoire de la boxe antique, Paris, PUF, 2022), visant à mettre en relief l’existence, dans le monde gréco-romain, d’une véritable culture pugilistique. La boxe antique est encadrée de règles et d’interdits, et résulte de pratiques corporelles complexes, combinant alimentation contrainte, abstinence sexuelle, entraînement spécialisé, et vaste répertoire technique. À travers la boxe, et sa violence codifiée, ce sont les liens unissant le sport et la guerre que l’on peut appréhender.

Dans le prolongement de ces travaux, j’ai réalisé un essai d’histoire du sport antique (Le Sport. Récit des premiers temps, Paris, PUF, 2024), combinant une approche d’histoire longue (couvrant un millénaire d’histoire du sport, depuis le VIe siècle av. J.-C. jusqu’à la fin de l’Antiquité), et une approche d’histoire totale, abordant le phénomène sportif sous ses différents aspects (contexte d’apparition et contexte de disparition du sport, goût des concours, nature des disciplines sportives, quotidien du gymnase, pratiques d’entraînement, diététique, idéaux corporels, érotisation des athlètes, institutions sportives et enjeux politiques du sport, dimension identitaire du sport grec, carrières, critique anti-sportive, mauvaises pratiques, etc.). Au fil de l’étude, les pratiques athlétiques en vigueur dans les gymnases et les stades anciens sont comparées à celles en vigueur dans le monde contemporain, afin de faire apparaître les continuités reliant ces deux moments de l’histoire du sport mais aussi les singularités et traits propres des premières formes du sport. »