Michel Boccara, chercheur au CNRS, anthropologue tente ici d’écrire à partir des entretiens avec les Anciens une histoire de la province Burkinabé du Kiritenga du point de vue des populations autochtones. Depuis le village de Silaléba où il s’est immergé son travail à partir de la tradition orale nous plonge dans un univers mythique, magique tout en permettant une approche de la société mossi.
L’histoire du village de Silaléba, le village des hommes nuages introduit les mythes fondateurs qui constituent le cœur de l’ouvrage.

Entretiens avec les Anciens du Kiritenga et du Risiam

La transcription des entretiens réalisés entre 1991 et 1999 en langue Mooré et traduits introduit le lecteur dans le monde fantastique des mythes fondateurs des différents groupes sociaux qui constituent le peuple moose ( mossi). Les hiérarchies sociales, les traditions, la relation aux animaux totem sont tour à tour abordés par les différents interlocuteurs de l’auteur. On notera l’importance du rêve comme mode d’entrée en contact avec les ancêtres, le rapport de certains animaux à l’annonce d’une mort à venir, mais aussi la notion de pouvoir, les chefferies traditionnelles, leur rapport à la colonisation ou au pouvoir étatique à l époque de Thomas Sankara. L’importance des chefs coutumiers pour la vie de la communauté , les fêtes comme le kiougou en relation avec la vie agraire, les sacrifices pour la pluie si importante en pays sahélien rappelle les bases de la vie rurale. On remarque également que les migrations depuis Ouagadougou, Le Ghana oui le Niger sont inscrites dans les récits fondateurs.

Yamgana et Pasanga

Cette seconde partie est consacrée à l’analyse, sous une forme qui peut dérouter le lecteur: alternance entre chapitres et « vocabulaires » qui développent quelques termes qui seront, en fin d’ouvrage, repris dans un glossaire.
Les points forts: le point de vue recherché par Michel Boccara, écrire une histoire vue d’en bas, ni celle du colonisateur ni même celle des « princes » les enfants de la force selon la terminologie moose mais celle des « autochtones, les enfants de la terre et du ciel.
Une explicitation de la société mossi, réduite ici à une province, de l’organisation politique résumée sous la formule: « Le roi règne, la coutume gouverne ». L’analyse donne à voir une combinaison réussie entre un groupe autochtone issu de la terre mère et du ciel et un groupe étranger figuré par un animal qui demeure symboliquement très présente dans les noms de famille : Sawadogo et Ouedraogo.
L’auteur aborde enfin la question de la transmission de ces traditions en particulier en ce qui concerne les rapports hommes-femmes, les relations jeunes-vieux, aînés-cadets, la question de la monnaie des cauris aux francs et la valeur symbolique de l’argent.

Le DVD fourni avec le livre montre l’aventure de cette recherche au Burkina : les rites, les mythes fondateurs mis en voix française, les entretiens sous-titrés, la fabrication du dolo, des paysages, les cérémonies, un dépaysement, une première approche du Burkina Faso.