Thème fascinant, moyens spectaculaires pour fouiller et exposition avec des objets visibles pour la première fois en France et issus des musées égyptiens forment le cocktail alléchant de l’exposition qui vient de s’ouvrir à l’Institut du Monde arabe. Un bel ouvrage, en lien direct avec elle, parait donc au même moment. Le format à l’italienne se révèle un bon atout pour appréhender certaines réalités décrites, comme des paysages ou des scènes reconstituées.

Un parti pris graphique très audacieux

Disons-le d’emblée : il y a un vrai pari graphique qui vient de Renaud Vigourt. C’est audacieux dans les couleurs et les formes et on pourra adhérer ou non. Les enfants se révèlent parfois plus traditionnels que leurs parents et les avis étaient au final assez partagés. Le livre offre donc un mélange de création (avec le dessin), de présentation d’objets archéologiques et d’un peu de reconstitution, par l’ordinateur. Ce qui est particulièrement réussi, et que favorise le format du livre, c’est une lecture à plusieurs niveaux. En effet, dans un premier temps, on peut ne lire que les bandeaux du haut qui disent l’essentiel sur les cérémonies liées au mythe d’Osiris. Ensuite, on peut se pencher sur les documents du bas qui sont commentés, et en lien avec la phrase du haut. Ainsi par exemple, pages 24 et 25, le texte du haut évoque une ville cosmopolite et les objets commentés en bas valident complètement cette idée.

Le mythe d’Osiris en images

La première partie retrace en quelques pages, et en laissant une grande place aux illustrations, le mythe d’Osiris. Il forme avec Isis le couple divin par excellence. Il est le symbole du retour des récoltes ce qui explique qu’il soit tant célébré. Rappelons brièvement aussi que victime de la jalousie de Seth, Osiris finit démembré avant qu’Isis ne le reconstitue. Peu après, il renonce au royaume terrestre et, en quittant Isis, il lui laissa un fils, futur Pharaon, que l’on rencontre plus loin dans l’album au moment de l’évocation des mystères d’Osiris. En effet, Osiris c’était aussi « le maître du silence », ou encore « celui dont on ne prononce jamais le nom ». Il apparaît finalement comme un dieu paradoxal, à la fois fort et fragile. L’ouvrage propose donc de lever le voile du mystère des cérémonies qui lui étaient consacrées.

Les mystères d’Osiris

Ces cérémonies, qui se déroulaient chaque année, étaient empreintes de mystère. Le livre présente d’abord le cadre géographique avec la ville d’Héracléion. Celle-ci était alors la porte d’entrée obligatoire pour les navires qui venaient du monde grec. Au milieu de la ville, on trouvait le sanctuaire d’Amon Géreb où se déroulaient les cérémonies. La première étape des mystères consistait en la fabrication d’une momie d’Osiris baptisée Osiris végétant. Cette effigie était ensuite placée dans une barque et commençait alors une procession funèbre de prêtres et de pleureuses. La légende dit aussi qu’Isis métamorphosée en oiseau se posa sur le cadavre reconstitué de son époux qui reprenait vie et la fécondait. Le livre évoque la figure d’Harpocrate, c’est-à-dire Horus enfant, qu’il fallait protéger de Seth. Chaque souverain se voyait comme le représentant d’Horus et le «  principal rempart du monde contre les forces du mal ».

L’apport de l’archéologie

En quelques pages, on découvre des images et des méthodes de l’archéologie liées aux fouilles menées par Franck Goddio. Elles sont déclinées autour de quelques verbes.  On prend un peu mieux conscience du travail qu’il a fallu fournir pour commencer à envisager de reconstituer les cérémonies. On découvre notamment un peu avant dans le livre une barque retrouvée et qui servit sans doute aux cérémonies liées à Osiris.

Cet ouvrage propose donc une vision à la fois onirique et scientifique d’un aspect de la civilisation égyptienne. Il permet une lecture très agréable à plusieurs niveaux. A sa façon, il propose également une déclinaison différente de ce que peut être un ouvrage jeunesse, et si ce n’était déjà que pour cela déjà, il mériterait d’être à découvrir. Comme on y ajoute l’Egypte, il intéressera sans doute un large public.

© Jean-Pierre Costille pour les Clionautes avec l’aide de Nina