Michel Fabre, dans sa préface, nous l’explique en reprenant les définitions que l’on pourra lire au cours de l’ouvrage. Néanmoins, il retient celle de Mathieu Gagnon et ses collaborateurs Stéphane Marie et Etienne Bouchard : réflexivité, autocorrection, documentation, critères, contextualisation.
Les auteurs préfèrent parler de pratiques critiques plutôt que de pensée critique.Depuis les années 1960, le document tend à occuper une place centrale dans le développement de cet esprit critique. Ceci pour des raisons pédagogiques (mettre en activité l’élève) et didactiques (calquer l’apprentissage sur les pratiques de l’histoire savante). Cela permet aux élèves de ne plus être passif et simplement écouter le cours magistral du professeur.Michel Fabre reprend l’exemple de l’investiture de Donald Trump et les propos de Sean Spicer, porte-parole de la Maison Blanche, qui avait déclaré qu’il s’agissait de la plus grande audience jamais vue pour une investiture. Michel Fabre rappelle plus loin que la pensée critique, c’est l’aptitude à douter de soi, à se remettre en question, à s’ouvrir aux objections des autres… Vraiment ? Les objections vont pourtant dans les deux sens, or, il ne semble pas y avoir d’ouverture aux propos de Spicer… Une petite contradiction qui amuse.
Introduction (écrite par Marc-André Ethier, David Lefrançois et François Audigier)
– Les auteurs qui ont rédigé l’ouvrage ont participé au REF 2015 sur La Pensée critique, la pensée historienne et l’enseignement de l’histoire et de la citoyenneté. Il leur a fallu poursuivre leurs échanges de 2015 à 2017. Ils ont du s’entendre sur ce qu’est l’esprit ou la pensée critique et les reconnaître dans l’enseignement de l’histoire
Première partie :
– le chapitre 1 « L’esprit critique et l’enseignement de l’histoire : quelles pratiques pour quelles fins ? » est écrit par François Audigier. Tout d’abord il défini le terme « critique » pour ensuite développer l’évolution de la critique dans le milieu scolaire. C’est l’occasion de faire un peu d’historiographie en revenant sur les écrits d’historiens du XIXe et du XXe siècle. Ceci, pour mieux expliquer la place des documents dans la méthode historique et dans l’enseignement de l’histoire.
– le chapitre 2 « Quelle conscience historique pour les élèves de l’école élémentaire en France ? » est écrit par Benoît Falaize. Il a mené une enquête à travers le récit de plus de 1800 élèves, le récit ayant pour titre « Raconte-moi l’histoire de France ». A travers cela, nous pouvons voir ce que les élèves retiennent le plus, entre les personnages historiques, les guerres, les raccourcis, les erreurs parfois… L’idée est de voir si les élèves (ou enfants) ont une conscience historique.
– le chapitre 3 « Quelles pratiques critiques manifestées par des élèves du secondaire en contexte de situations d’apprentissage en histoire ? » est écrit par Mathieu Gragnon, Stéphane Marie et Etienne Bouchard. Nous avons des études réalisées par des universitaires québécois. Ce chapitre est ponctué de figurés permettant une meilleure explication de la démarche de recherche mais ce chapitre reste difficile à lire.
Deuxième partie :
– le chapitre 4 « Croiser l’histoire des techniques et l’histoire pour construire un milieu didactique favorisant une pensée critique ? » est écrit par Didier Cariou et Sylvain Laube. Nous arrivons cette fois à Brest pour étudier les résultats d’un jeu d’apprentissage réalisé avec des élèves de troisième. Il s’agit de voir comment les élèves vont se débrouiller pour résoudre la question du « pourquoi » il y a eu un pont construit sur la Penfeld et pourquoi ce type de pont. L’étude des archives est une étape indispensable pour les élèves qui ont ainsi accès à la source.
– le chapitre 5 « Autonomisation de la classe d’histoire et critique d’historienne » écrit par Sylvain Doussot et Nadine Fink. On apprend que la critique externe et interne de documents ne permet pas aux élèves de réaliser un travail historique au sens scientifique du terme ; il s’agit plutôt d’une expertise. Les auteurs de ce chapitre ont mis en œuvre la critique de témoignages sur la base d’une étude de cas avec des élèves de CM2 et de 3ème. L’objectif de confronter les élèves à une contradiction de façon à poser un problème. Ils doivent critiquer leurs interprétations du document étudié et ainsi effectuer le travail d’une communauté scientifique : la critique des propositions d’interprétation de la source.
– le chapitre 6 « Etat de la recherche sur la pensée historienne et la critique historique des films de fiction » écrit par Marc-André Ethier et David Lefrançois. Pourquoi les films ? Car il s’avère qu’au Québec, 20 % des enfants passent en moyenne 25h par semaine devant un écran. Tout comme dans les chapitres précédents, les auteurs expliquent leur démarche de recherche, font état de leurs résultats et de leur analyse.
Troisième partie :
– le chapitre 7 « Critiques des usages cinématographiques du passé et apprentissage de l’histoire » écrit par Dominique Briand. Il s’agit d’étudier ceux qui voient le passé installé devant un écran.
– le chapitre 8 « Jeux vidéos et interprétations historiques : étude d’Assassin’s Creed » écrit par Vincent Boutonnet. Une recherche intéressante dans la mesure où c’est une nouveauté dans l’apprentissage de faits historiques chez les élèves. Mais il y a toujours le débat entre réalité historique et fiction. Y a-t-il un vrai risque d’eronner un fait ou personnage historique ? « Installer » chez les élèves une représentation faussée de l’histoire ? AC peut être un jeu utile pour justement exercer ses habiletés critiques utiles au développement de la pensée historienne.
En guise de conclusion, la post face a été écrite par Christian Nadeau. Il revient sur les capacités que doivent avoir les enseignants : au de-là des connaissances, se remettre en question, ouvrir des portes sans nécessairement les refermer, anticiper les différents points de vue possibles. Il reprend l’idée de Pierre Nora, le lieu de mémoire, pour rappeler aux professeurs que les élèves se souviendront ce qu’ils ont appris mais aussi (et surtout) la manière dont ils auront appris. Comme le souligne Christian Nadeau, l’élève ne doit pas simplement établir un jugement argumenté, la compétence critique en histoire est « un élément central dans de la formation à la vie morale et politique avec autrui ».
Pour conclure ce compte-rendu, je reprendrai la réflexion de Richard Paul disant que la pensée critique représente « ce dont chaque personne a besoin pour survivre dans un monde en constant changement ».