Dans Pour l’Église – Ce que le monde lui doit, Christophe Dickès se penche sur l’apport inestimable de l’Église catholique à la construction de la civilisation occidentale. S’appuyant sur les travaux d’historiens éminents tels que Jacques Le Goff, Michel Zink, Marie-Françoise Baslez ou Philippe Martin, l’auteur démontre comment cette institution millénaire a influencé des domaines aussi divers que l’éducation, le droit, la science, la charité. Publié dans un contexte où l’Église est souvent remise en question, et parfois à juste titre, ce livre ambitionne de rappeler son rôle fondamental dans l’histoire.

Une Église obscurantiste ?

L’ouvrage de Christophe Dickès démontre comment l’Église a joué un rôle central dans la transmission de la culture antique et la construction de la civilisation occidentale. Dès le haut Moyen Âge, le travail des monastères a permis de préserver et de transmettre le savoir antique. Plus tard, l’Église a favorisé la création des universités, où se développaient des disciplines variées comme la théologie, le droit ou la médecine.

Contrairement à l’image d’obscurantisme souvent associée à la période médiévale, l’Église a posé les bases du système éducatif européen. Elle a encouragé la création d’écoles presbytérales, épiscopales et monastiques. La scolastique, incarnée par des figures comme Saint Thomas d’Aquin, illustre l’effort de l’Église pour harmoniser foi et raison, faisant de la quête de la vérité une entreprise intellectuelle essentielle.

L’Église et la société : charité, santé et organisation du temps

L’Église a également joué un rôle fondamental dans la création et la gestion des institutions sociales et médicales. Les hospices, hôtels-Dieu et maisons-Dieu ont été établis pour accueillir les indigents, soigner les malades et protéger les plus vulnérables, posant ainsi les bases des systèmes hospitaliers modernes.

Sur le plan temporel, l’Église a influencé profondément le calcul du temps. Le moine Denys le Petit est à l’origine de l’ère Anno Domini, utilisée aujourd’hui à l’échelle mondiale. Plus tard, la réforme du calendrier par le pape Grégoire XIII en 1582 a corrigé les décalages du calendrier julien, donnant naissance au calendrier grégorien toujours en vigueur.

Science et conscience humaniste : l’Église comme moteur intellectuel

Dans le domaine scientifique, l’Église a été un acteur clé de l’émulation intellectuelle et technique. Par l’impression d’ouvrages et la création d’institutions comme l’académie scientifique de Rome ou son centre météorologique, elle a su soutenir de grandes avancées. Des figures telles que Nicolas de Cues et Copernic illustrent cette effervescence intellectuelle !

L’auteur met également en lumière l’émergence d’une conscience humaniste au sein de l’Église. Francisco de Vitoria et Bartolomé de Las Casas, tout en défendant l’évangélisation, ont réfléchi aux droits des peuples indigènes et à la tolérance. Ces débats témoignent d’une dynamique morale qui a contribué à l’évolution des droits de l’Homme.

L’auteur insiste sur le rôle humaniste de l’Église face aux persécutions, notamment pendant la Seconde Guerre mondiale. Il met en avant des figures marquantes comme Maximilien Kolbe, martyr de la charité, et les prises de position courageuses de certains évêques français, tels que Mgr Saliège et Mgr Théas, contre la rafle du Vel d’Hiv en 1942.

La place des femmes et la régulation de la violence

L’ouvrage souligne la singularité du rôle des femmes dans l’Église. Dès les premiers siècles, dans les communautés chrétiennes réunies dans des maisons privées, les femmes jouissaient d’une reconnaissance particulière, souvent appelées par leur prénom, ce qui les distinguait des « filles de… ». Au Moyen Âge, l’institution du mariage chrétien indissoluble a renforcé leur position en leur offrant une protection contre la répudiation et une sécurité juridique et morale.

Sur le plan de la régulation des conflits, l’Église a introduit des principes éthiques à travers le concept de « guerre juste » et des mesures comme la Trêve de Dieu, qui imposaient des périodes de cessation des hostilités. Ces initiatives visaient à limiter les violences et à protéger les populations civiles.

 

Pour l’Église – Ce que le monde lui doit est un ouvrage riche et stimulant, qui invite le lecteur à reconsidérer le rôle central de l’Église dans l’histoire et le présent. Christophe Dickès réussit le pari de réconcilier foi et raison, histoire et modernité, tout en rendant hommage à une institution dont l’influence demeure essentielle.