Que d’os, bande dessinée adaptée du roman éponyme de Jean-Patrick Manchette (1976), s’inscrit dans la tradition du polar social français. L’œuvre, scénarisée par Doug Headline et illustrée par Max Cabanes, retrace l’enquête d’Eugène Tarpon, détective privé parisien, chargé de retrouver Philippine, une jeune aveugle disparue. À la suite de l’assassinat de la mère de cette dernière, Marthe, Tarpon s’engage pleinement dans une investigation semée d’embûches, de meurtres et de rebondissements narratifs. Pour préserver le suspense et les surprises du récit, nous nous abstiendrons de dévoiler les péripéties ultérieures.

 

Un polar ancré dans son époque

L’intrigue, située en 1975, offre une immersion dans la France des années 1970, marquée par des enjeux politiques et sociaux majeurs. Manchette y explore notamment les collusions entre les services de police et l’extrême droite, la corruption policière, ainsi que l’influence des sectes. Le lecteur découvre également, à travers les planches de Cabanes, des éléments matériels aujourd’hui disparus : téléphones filaires, cabines téléphoniques, automobiles d’époque, ou encore une géographie parisienne transformée.

L’œuvre restitue par ailleurs une société empreinte de machisme et de virilisme, reflétant la place des femmes dans la société française de l’époque. Le personnage de Charlotte, bien que parfois caricaturé en « James girl », incarne une tentative de Manchette de donner une certaine visibilité aux figures féminines, ce qui constituait déjà une avancée pour l’époque. Enfin, le dialogue intègre des expressions et un argot typiques des années 1970 (« tu me remets », « ça vous épate ? »), renforçant l’immersion historique.

 

Une adaptation fidèle et cinématographique

L’écriture de Manchette, par son approche visuelle et cinématographique, se prête particulièrement bien à une transposition en bande dessinée. D’ailleurs, l’auteur considérait le polar comme une étape vers l’écriture de scénarios pour le cinéma. Doug Headline, son fils, a assuré l’adaptation scénaristique de plusieurs de ses romans, dont Fatale et Nada, publiés chez Dupuis. Le dessin de Max Cabanes, quant à lui, restitue avec précision les ambiances et les décors des années 1970, témoignant d’un souci du détail et d’une recherche esthétique qui servent parfaitement l’atmosphère du récit.

Pour aller plus loin

Les amateurs d’adaptations des œuvres de Manchette en bande dessinée pourront se tourner vers les travaux de Jacques Tardi, notamment La Position du tireur couché (Futuropolis, 2010) et Ô dingos, ô châteaux ! (Futuropolis, 2011).