« En détail » est une publication du Commissariat Général à l’Égalité du Territoire (CGET). Faisant suite à la regrettée collection prospective « Territoires 2040 » (malheureusement plus disponible en ligne), elle entend rouvrir les collections scientifiques du CGET. Ce dernier numéro a pour objectif de montrer la diversité des situations des villes moyennes en France, mais aussi par souci de comparaison dans d’autres pays.

Le premier problème qui se pose est celui de la définition d’une « ville moyenne ». Elles sont en effet multiples. Celle retenue ici croise les données démographiques (aires urbaines comptant entre 30000 et 200000 habitants) et fonctionnelles (« villes intermédiaires » assurant des fonctions de centralité en accueillant activités et emploi, établissements de santé et d’enseignement, équipements scolaires, sportifs ou culturels, sites patrimoniaux et accès aux infrastructures de transport). Dans les 6 départements ne comptant pas d’unité urbaine de plus de 20000 habitants, les unités urbaines dont la commune-centre est le chef-lieu de département ont été considérées. Au total, on dénombre 203 villes moyennes dont 191 en métropole et 12 dans les DROM.

1. Quel est l’état de la recherche ? : Que ce soit en Europe ou en France, la catégorie des villes moyennes n’émerge que récemment. Ni grandes villes ou métropoles, ni petites villes ou bourgs ruraux, elles sont des « entre-deux ». Elles assurent en partie des fonctions de centralité mais desservent des espaces assez peu denses. Elles ont pour point commun d’assurer un rôle d’articulation interterritoriale. Leur image s’est fortement détériorée depuis les années 1970 car une bonne partie a été touchée par les crises industrielles successives. Pourtant, depuis peu, leurs atouts en terme de cadre de vie sont de plus en plus mis en avant. Ce regain d’intérêt semble validé par des études au Japon, en Algérie, en Inde ou au Vietnam.

2. Principales caractéristiques des 203 villes moyennes françaises : Le maillage de la France en villes moyennes est hérité de l’histoire. Les 3/4 des 203 villes moyennes françaises sont ainsi des préfectures ou des sous-préfectures. Elles sont aussi des maillons essentiels en terme d’offres de santé, d’enseignement supérieur et de recherche, de services ou encore de commerce. En 2013, elles réunissent 15 millions d’habitants soit près de 23% de la population française. Toutefois elles rencontrent des évolutions démographiques très variables. Entre 2009 et 2014, près de 50% d’entre elles ont connu une hausse de leur population, 39% une baisse et 11% ont été stables. En 2013, elles rassemblent environ 7 millions d’emplois, soit 26% de l’emploi total en France, près d’un tiers des établissements de santé, un quart des lycées et un quart des effectifs étudiants. Elle sont parfois des noeuds ferroviaires et aéroportuaires. Mais la présence d(une desserte dans une ville moyenne ou sa proximité ne suffisent pas à en assurer l’accessibilité qui dépend aussi de la fréquence des trains au regard des différents besoins de déplacement. Nombreuses sont celles qui connaissent des signes de fragilisation économique et sociale.  Le maintien de la spécialisation sectorielle d’un  grand nombre de villes moyennes qui se sont industrialisées dès la fin du XIXème siècle ou dans le cadre de la décentralisation industrielle des années 1960 peut également poser problème. Dans les 3/4 des villes moyennes l’évolution du taux de chômage est supérieur à celle de la moyenne nationale. Le taux de pauvreté y aussi est plus élevé. 88% des villes moyennes comptent un ou plusieurs quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). En moyenne, 10% des habitants des villes moyennes vivent dans des QPV.

3. Action de l’Etat en faveur des villes moyennes : La première politique spécifique en faveur des villes moyennes date des années 1973-1979. Il s’agissait alors de contrats permettant de cofinancer des actions, notamment d’embellissement et d’amélioration des cadres de vie puis d’attirer de nouvelles activités (à partir de 1976). Ensuite, les villes moyennes ont pu bénéficier de différents dispositifs, mais qui ne leur étaient pas forcément directement destinés (politique des réseaux de villes, plan Université 2000, restructuration des cartes hospitalières, universitaires, militaires et judiciaires). Les villes moyennes sont par exemple de « bonnes élèves » de la rénovation urbaine (des exemples en Bretagne sont traités). 21 pôles de compétitivité sur 71 concernent aussi les villes moyennes. Face à la multiplication des acteurs et au développement de la contractualisation pour le financement des projets, une majorité de villes moyennes tentent et réussissent à s’adapter.

4. Approche multicritères des villes moyennes : Le CGET propose un gradient de situations, qui peut permettre de mieux cerner les types et le degré de fragilité de chaque ville moyenne. Il croise 3 critères cumulatifs : dynamique démographique, dynamique économique, fragilité sociale. 3 principaux positionnements apparaissent alors : inscription dans une dynamique métropolitaine, polarisation d’un département, interrelation avec d’autres villes moyennes. Des exemples sont ensuite proposés.

Maillons essentiels, et pourtant souvent oubliées, de l’armature urbaine française, les villes moyennes peuvent alors apparaitre, pour un certain nombre d’entre elles en tout cas, comme une alternative à la « métropolarisation ».

Il faut saluer cette publication qui réussit à résumer en une centaine de pages l’état et le résultat des recherches (à plusieurs échelles) sur les villes moyennes et à en dresser un tableau précis. Les textes sont clairs et directs. Les exemples détaillés, ou non, sont nombreux. Les graphiques, les tableaux et les cartes sont explicites et utilisables, notamment au lycée.