La bande dessinée militaire est un sous-genre généralement associé à la Seconde Guerre mondiale, ses chars, ses avions et ses opérations de commandos. Mais ce petit album en format livre emmène son lecteur sur les champs de bataille napoléoniens. Son héros est un sapeur de la Grande Armée dénommé Adélard Michaudon. On fait connaissance avec ce grognard dans les tranchées du siège de Dantzig en 1807. Il suit les aigles impériales à travers les campagnes suivantes. Son personnage est un médiateur qui permet de découvrir les tâches et les missions du génie militaire au cours de ces campagnes.

Deux épisodes saillants sont particulièrement mis en valeur. Dantzig en 1807 permet de se faire une idée des travaux d’un siège. L’évocation de la campagne de Russie en 1812 est logiquement centrée sur la construction des ponts sur la Bérézina. Reprenant du service sous la Première Restauration, Adélard fait partie de la compagnie de sapeurs du 3e régiment du génie qui marche en tête du détachement chargé de stopper le Vol de l’Aigle sur la route de Grenoble. Mais la troupe se rallie d’enthousiasme à l’Empereur dans la plaine de Laffrey. Et le grognard Michaudon arrive au bout de son chemin sur le champ de bataille de Waterloo dans les rangs du dernier carré français.

La création de cet album résulte d’une démarche mémorielle soutenue par l’actuel 3e régiment du génie pour entretenir le souvenir de ses vaillants anciens. Il s’agit d’une initiation grand public, qui pourra laisser indécis le lecteur initié. Car, si emblématique que soit le bonnet d’ours de l’épopée impériale, cette coiffure indissociable de Michaudon n’a pourtant jamais été portée par les sapeurs. Leur couvre-chef réglementaire était un casque, même dans la Garde. On ne saisit pas clairement le lien, formulé dans le titre, entre le héros et cette dernière, d’autant que les Sapeurs de la Garde ne sont créés qu’en 1810. Sans doute cela tient-il simplement au fait que le 3e RG est l’héritier des traditions de cette unité napoléonienne. Enfin, la description de l’affaire de la Bérézina occulte le rôle des pontonniers, unités distinctes dépendant à l’époque de l’artillerie. Il est néanmoins tout à fait exact qu’ils furent secondés par les sapeurs dans l’exploit technique et humain que fut la construction des ponts.

Mais ce sont là des réserves superflues pour un lecteur non averti, qui appréciera de suivre un fil didactique solide. Un petit dossier final bien conçu apporte d’intéressantes informations historiques complémentaires. On apprécie particulièrement le style graphique, au dessin à la fois précis et âpre. Le choix d’un rendu en noir et blanc renforce l’ambiance guerrière du sujet. Au bilan, cet album de petit format répond bien à son objet et ses intentions. Il conviendra aux sapeurs curieux du passé de leur arme comme à un public scolaire au profil de collégien