Cet ouvrage est le fruit du colloque d’octobre 2019 « Sécurité et développement dans le Sahel – Du concept à la réalité organisé à l’Unesco à Paris.

L’introduction de Maman Sambo Sidikou, secrétaire exécutif du G5 Sahel1, précise le cadre chronologique et spatial des réflexions, une immense zone semi-désertique où les frontières sont peu matérialisées, où la légitimité d’un État lointain est mal perçue par les populations, où des acteurs non-étatiques et violents mettent en péril la sécurité comme le développement. Mais l’insécurité qui menace les populations est avant tout économique et conduit bien des jeunes à tenter l’aventure de la migration. Dans ce contexte quelles ripostes, quel ancrage pour des politiques dans les territoires pour combattre la peur ? Comment former les forces armées pour éviter les dérives ? S’appuyer davantage sur les acteurs sahéliens, voilà les défis pour le G5 Sahel.

Trois grandes parties organisent les différentes interventions : Un environnement qui se dégrade, des réalités nationales, la communauté internationale en appuis des politiques de sécurité et de développement

Un environnement qui se dégrade

L’environnement est pris au sens géopolitique.

Peer de Jong2, qui a dirigé la publication de cet ouvrage, décrit dans un long article de synthèse bien documenté, la situation de forces armées au matériel quelquefois sophistiqué qui peinent à lutter contre une guérilla terroriste qui profite de l’immensité de la zone sahélienne. Il rappelle les éléments de la crise depuis l’influence du GSPC3 dans les années 1990 jusqu’en 2020 et l’émergence d’affrontements intercommunautaires avec un bilan des principales attaques4, les pays du G5 Sahel ont pu faire à la France et à l’Union Européenne.

Il montre l’insuffisance d’une réponse militaire (Serval, Barkhane, Minusma, FC G5) et la nécessité de réponses politiques, meilleure gouvernance, et économiques, un développement au plus près des besoins des populations qui pourrait contribuer à restaurer la légitimité des États.

Alain Autil5 complète ce tableau. Il revient sur les fondements structurels de l’insécurité, des appareils sécuritaires débordés à la fois par les groupes djihadistes et par les milices d’autodéfense. L’analyse s’appuie sur de nombreux exemples. Il rappelle le déficit des États dans les tâches régaliennes : justice, souvent corrompue et incapable de gérer les questions foncières entre loi et tradition ; fiscalité, faible et inégalitaire ; politique éducative.

Réalités nationales

Différents intervenants traitent de la situation de leur pays.

Pour la Mauritanie, le Général Ould Sidi Mesgharou décrit les principes et les effets de la loi de juillet 2010 qui définit la lutte antiterroriste : organisation et missions du Groupement nomade sur la frontière malienne6, police, lutte armée et aide et assistance aux populations (projets de développement, protection du cheptel, développement touristique) pour éviter la radicalisation des jeunes.

Le Colonel Mady Savadogo aborde la coopération militaire transfrontalière et les relations du GR Sahel avec la Communauté du bassin du lac Tchad, notamment la Force conjointe (FC G5) et ses domaines de compétence.

Niagalé Bayoko7 présente la situation au Mali : une histoire de l’armée et les réformes de 2013, les buts du processus de réforme du secteur de la sécurité (RSS) et les avancées dans un contexte difficile (opérationnalité des forces armées, respect des droits fondamentaux des populations, gouvernance).

Le Colonel Mahamadou Seidou Magagi aborde brièvement le cas du Niger où l’imbrication des défis de sécurité et du développement sont réels. Il présente la politique mise en place depuis 2012.

La communauté internationale en appui des politiques de sécurité et de développement

Cette troisième partie reprend les courtes présentations, discours officiels politiques des représentants de la France : Christophe Bigot, de l’ONU : Gal Babacar Gaye, de l’Union Européenne : Franck Haaser, de l’AFD8 : Bertrand Walckenaer.

On retiendra la réflexion sur la nécessité et les difficultés de protéger les populations dans le cadre des interventions militaires de l’ONU (MINUSMA) ; l’importance des questions de développement dans le cadre de l’Alliance Sahel et le maintien du lien social dans les zones impactées.

Le Colonel N’Diawar N’Diaye9 rappelle l’importance de la souveraineté des États de la Mauritanie qui a su la restaurer au Mali en déliquescence et le soutien financier des pays occidentaux.

Franck Galland10 insiste sur la question de la ressource en eau, la disponibilité notamment en ville et la nécessité même dans les zones d’insécurité de restaurer les infrastructures hydrauliques. Il s’agit d’un plan global auquel les armées doivent contribuer.

Oumar Keita comme diplomate a conclu le colloque au nom de l’UNESCO.

L’ouvrage dans sa globalité apporte des éléments de compréhension de la complexité de la question sahélienne même sin les changements climatiques semblent oubliées dans ces analyses.

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1 Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad

2 Expert reconnu de l’Asie et de l’Afrique, il est vice-présidant de l’institut Thémiis, qualifié par certain de « nouveau masque de la Françafrique

3 Groupe salafiste pour la prédication et le combat

4 Carte p. 46

5 Chercheur à l’ IFRI

6 Carte p. 101

7 Présidente de l’African Security Sector Network

8 Agen,ce française de développement

9 Consultant en géopolitique

10 Dirigeant de Environmental Emergency & Security (société d’ingénierie-conseil et de services, spécialisée en résilience urbaine)