Une grande voix à l’écriture limpide

Michelle Perrot, historienne reconnue, publie un ouvrage dans la collection du CNRS les grandes voix de la recherche. Cette collection a pour but de proposer des « textes courts et vivants » dans lesquels des « chercheuses et des chercheurs retracent leurs parcours, nous présentent leurs travaux, nous transmettent leur passion ». Le pari est plus que réussi. Michelle Perrot, par la grande clarté de son propos et la qualité de son écriture, passionnera nombre de lecteurs.

Devenir historienne

               Les premières parties de l’ouvrage sont consacrées aux fils du présent qui ont relié M. Perrot au passé. En effet, plusieurs « espaces-temps ont énormément compté et ont façonné [sa] mémoire d’historienne » : le Paris populaire et le Poitou des années 1930, les terribles contraintes de la Seconde guerre mondiale… Puis viennent les lectures, les études, la Sorbonne et les « grands professeurs » qui l’ont marquée : Pierre Renouvin et Ernest Labrousse. C’est ce dernier qui alors qu’elle est nommée professeur à Caen l’encourage à faire une thèse. Ce sera, pour cette catholique de gauche, qui rompra avec l’Église, et fut membre un temps du Parti communiste, un travail sur la grève et sur le monde ouvrier.

L’histoire, « un regard enraciné dans le présent »

Michelle Perrot a eu des engagements politiques ou sociaux multiples : proximité avec la gauche politique, opposition à la guerre d’Algérie, intérêt pour le mouvement syndical, participation au mouvement de Mai-juin 1968, soutien aux mouvements féministes, réflexions sur les prisons et la justice… C’est ainsi écrit-elle, que dans « les années 1970, le mouvement de libération des femmes m’a submergée et séduite » et lui a permis de percevoir ce qu’était alors la « béance du récit » historique sur cette question.

Ces engagements ont fréquemment nourri et enrichi son travail d’historienne : ouvrant de nouveaux champs de recherche et de nouvelles problématiques, favorisant des approches différentes et permettant de travailler avec des chercheurs issus d’autres domaines des sciences humaines. Elle répond ainsi favorablement à l’initiative d’un éditeur italien et co-dirige avec Georges Duby, L’Histoire des femmes en Occident, paru dans les années 1990

L’histoire, « une quête de vérité »

Elle conclue l’ouvrage en rappelant toutefois que l’engagement citoyen doit exclure l’aveuglement. D’où le rappel de la nécessité de la rigueur et de la précision dans le travail d’historien ainsi que de la « multiplication des hypothèses et le croisement des variables ». Ce qui la rend dit-elle « ouverte à la notion actuelle « d’intersectionnalité » » si souvent caricaturée et décriée par certains.

Un beau livre à conseiller à tous les passionnés d’histoire