On sait, depuis que des comptes rendus de lecture ont paru dans la Cliothèque, que les éditions HongFei privilégient l’approche de la Chine et de sa culture. Cette fois, avec ce Si j’étais ministre de la Culture, on a plutôt un manifeste. Non : pas « plutôt ». C’est un manifeste : on le trouve d’ailleurs sous la forme d’une affiche A2 en fin d’album, à diffuser largement.

Le récit adopte la forme de l’absurdité. La ministre de la Culture cherche à démontrer l’importance de son domaine de compétence, mais pour cela, il faut convaincre les barbons qui peuplent le gouvernement. Elle décide de faire lancer des journées absolument sans culture. Pas de musique ; aucun spectacle, ni dans les rues, ni dans les postes de télévision ; évidemment, aucune activité dans les cirques, salles de concert, cinéma ; l’Internet est brouillé ; les tableaux sont retournés dans les musées ; interdiction d’ouvrir le moindre ouvrage, de regarder le plus petit monument, les statues. Pas question de porter des vêtements, hormis un uniforme laid, d’utiliser autre chose que les objets standardisé (un par gamme d’accessoires)… Et advienne que pourra. Le ministère de la Culture doit montrer qu’il est celui « de l’équilibre des âmes, du battement des cœurs, de la respiration », le ministère « de l’oxygène ».

Le texte a été écrit lors de la campagne électorale au Québec, en 2014, en forme d’interpellation des candidats, ce qui explique le ton avec lequel il a été conçu. Il s’ouvre sur la réplique qu’opposa Churchill à l’un de ses conseillers qui lui demandait de transférer des crédits culturels vers l’armement : « mais alors, pourquoi nous battons-nous ?».

Un manifeste qui doit inspirer les dirigeants européens, à commencer par les Français.

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Frédéric Stévenot