Désireux de faire œuvre de mémoire auprès du jeune lectorat, Laurent Jarneau, dans son ouvrage Signes de vie, a choisi de présenter la Première Guerre mondiale sous la forme d’un recueil de tweets classés de manière chronologique. Il le souligne : « Écrire l’histoire contemporaine à coups de messages éclairs (…) n’est pas un phénomène nouveau » (p. 130). Pourtant, le puriste peut protester : les tweets n’existaient évidemment pas durant la Première Guerre mondiale. En opposition, il peut lui être répondu que les tweets trouvaient leur équivalent dans les cartes postales échangées durant le conflit (p. 8). Suivant cette logique, Laurent Jarneau livre un récit rédigé dans un style concis et précis, vivant et évocateur malgré la contrainte du nombre de caractères.

Contrainte de caractères

Laurent Jarneau propose de suivre le récit de la guerre de six personnages. Chacun illustre un point de vue sur le conflit : celui d’un journaliste français, d’un curé de campagne éloigné du front, d’une adolescente, d’un officier français, d’un soldat français et d’un soldat allemand. Deux personnages sont connus du grand public : Charles de Gaulle, l’officier français, et Adolf Hitler, le soldat allemand. Mais tous ont existé. L’auteur s’est appuyé sur des archives pour retranscrire la pensée de chacun. Tous les points de vue, présentés de manière alternée, sont complémentaires et offrent une vue plus complexe du conflit que ne le laisse supposer la narration chronologique.
Laurent Janneau présente un récit de la guerre se déroulant du 31 juillet 1914 à l’après 11 novembre 1918. Chaque année du conflit est un chapitre. Chaque chapitre est construit de manière identique. D’abord l’auteur rappelle les faits principaux de chaque année de combats. Puis, sous la forme de tweets, il expose les faits tout en traitant différentes thématiques : la mobilisation, les combats, la vie dans les tranchées, à l’arrière… Chaque tweet se présente comme un témoignage court et percutant. L’auteur partage les émotions et les réflexions de ses personnages. Il parvient à créer une proximité avec les acteurs du conflit et permet une compréhension du conflit et des souffrances endurées par les combattants. Aussi si elle peut surprendre ou irriter au premier abord, la forme de l’ouvrage séduit par sa simplicité et son efficacité.

Des Tweets en témoignage

La lecture révèle alors la richesse du titre de l’ouvrage. Chaque tweet est doublement un signe. Il est un signe car il est un témoignage de ceux qui, encore vivants, ont vécu et ont survécu aux événements. Il est un signe car il retranscrit, par des mots, des idées et des émotions ce que ces témoins ont analysé et ressenti. Ainsi permet-il à la fois de témoigner et de donner une signification à chaque événement du conflit.
Laurent Janneau livre un ouvrage original et réussi d’abord destiné à de jeunes lecteurs (p.131) mais qui intéressera les enseignants. D’abord parce que ce livre est un support pédagogique original pour aborder la Première Guerre mondiale. Ensuite parce qu’il offre des pistes de réflexion intéressantes pour une transposition de cet exercice narratif à d’autres thèmes et périodes des programmes d’histoire de collège et de lycée. Une utile et agréable lecture.

Jean-Marc Goglin